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122 Art. 22. Passage du Rhône Art. 22. Passage du Rhône 123
« Quant au lieu que choisit Annibal pour
traverser le Rhône, je pense que ce fut entre
Avignon et la rivière de Sorgue, et cela par
plusieurs considérations très-sensées : l’une que,
sachant Publius en mer, il devait craindre que
ce général ne vînt au secours des Marseillais,
avec lesquels les Romains avaient contracté une
étroite alliance ; par conséquent il était de sa
prudence de ne rien retarder pour prévenir cette
jonction.
En second lieu, s’il trouvait dans ce pays-là
le fleuve plus large et plus rapide, il n’y a avait
pas d’apparence de pouvoir le remonter à travers
un pays plein de montagnes, de défilés, entre
lesquels ce fleuve se trouve plus resserré, et
dont souvent les rives sont escarpées de part et
d’autre, et par conséquent ou aisées à défendre,
ou impossibles aux embarquemens ; outre que
les peuples qui en habitent les rives n’avaient
fait encore nulle alliance avec lui, au contraire
de ceux de Languedoc et de Rousillon, qui l’assistaient
en conséquence de leur traité.
Je pense que le détachement d’Hannon s’arrêta
entre Roquemaure et le Pont de Saint-Esprit :
du moins les paroles de l’auteur semblent l’indiquer
».
M. de Folard ne s’en tient pas à la lettre
du texte en énonçant cette opinion. Polibe dit
formellement qu’Annibal arrivé environ à quatre
journées de l’embouchure du Rhône, entreprit
de le passer, parceque ce fleuve n’avait là que la
simple largeur de son lit. Or il suffit de jeter un
coup d’oeil sur la carte de France par Cassini,
pour y reconnaître que l’espace choisi par M.
de Folard entre Avignon et l’embouchure de la
Sorgue, est occupé par l’île de la Barthalasse
qui est d’une très-grande largeur, par laquelle
celle du lit est très-augmentée. La conjecture de
M. de Folard ne paraît donc pas exacte. Je reviendrai
sur ce sujet quand j’aurai rapporté ce
que nous dit Polibe sur le chemin que fit Annibal
depuis le passage du Rhône jusqu’aux Alpes,
et le récit de Tite-Live que je donnerai ensuite
achèvera d’éclaircir cette matière, de manière à
n’y laisser aucun nuage dans l’esprit des lecteurs.