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Actes - Forums du Champ Lacanien

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Zehra ERYORUKLa lettre volée des Arméniens de TurquieL'histoire de la Turquie contemporaine révèle, d'une part, la disparition progressive de la gauche, étouffée parla montée <strong>du</strong> nationalisme et, d'autre part, et corrélativement à cela, une progression des islamistes.Ceci peut-il être une ébauche d'explication au symptôme Turc ? Y a-t-il un point de jonction avec la présenceconstante de l'Armée, celle-ci maintenue à une place de suprême autorité face à toute tendance supposéemenaçante à la pensée kémaliste ? Quels ont été les effets de la laïcité et des réformes de Mustafa KemalAtatürk imposées depuis près de 80 ans aux Turcs ? La montée de l'islamisme en Turquie en est-elle unesuite "logique" ?Quoiqu'il en soit, reste que les événements de 1915 n'ont à ce jour aucune reconnaissance. Voilà donc unreste "bien embarrassant", comme l'écrivait Edgar Poe dans sa nouvelle, à propos de la Lettre originale voléeet laissée à découvert et que l'on cherche dans les moindres recoins, sans soupçonner qu'elle peut se trouverà vu d'œil. Quant à la "Lettre des Arméniens de Turquie", elle reste "en souffrance" en attente d'une adressede reconnaissance. Le vide béant persiste et appelle à être nommé, encore aujourd'hui, mais pour cela, ilfaudrait d'abord que la parole soit libérée en Turquie.Le symptôme de la Turquie semble être la parole bâillonnée, au sens propre et figuré. Ce symptôme qui doitêtre déchiffré quant à sa jouissance, reste la seule manière pour les sujets d'objecter au "faut que ça tourne<strong>du</strong> Maître" par un "faut que ça cloche" qui permet aux sujets d'ex-sister, "pas-tout" pris dans le discours <strong>du</strong>Maître. Un symptôme, ça parle aussi, à sa façon…Pourquoi ces armes se pointent-elles contre des journalistes, des intellectuels, en sommes des empêcheursde tourner en rond, nous dirons des empêcheurs de "parler en rond" ?Dans un système qui favorise le déni, ou le moulin à parole, les personnes qui s'aventurent dans les sentiersbattus de la parole juste, sont, tôt ou tard, soit sous les verrous, soit en exil, soit tus définitivement.A côté de l'injonction "jouis", l'autre injonction <strong>du</strong> discours est : "Tais-toi" "Jouis et tais-toi!".menace : "Si tu ne te tais pas, je te tue". Puis l'acte qui dit : "Je te tue pour que tu te taises".S'ensuit laTrois formes de "tu" : Tu <strong>du</strong> verbe "se taire" - Tu <strong>du</strong> verbe tuer - Et enfin Tu, le pronom personnel, celui quidésigne le sujet de la deuxième personne <strong>du</strong> singulier. Celui qui dira qui tu es et que je n'arrive pas à ledire… Et donc, je te tue pour que tu te taises… Pour que tu sois tu!C'est le sort qu'a connu Hrant Dink. Il parlait et soutenait un autre discours, celui qui dit que « lareconnaissance <strong>du</strong> passé de la Turquie Ŕ avec, en première ligne, la reconnaissance officielle <strong>du</strong> génocidearménien Ŕ ne peut se faire quřà travers un processus douloureux de démocratisation de la société turque.Dans tous les forums arméniens auxquels il a participé, il a toujours mis lřaccent sur cette maturation plutôtque sur la reconnaissance <strong>du</strong> génocide par les Etats étrangers » 16 .Ici, nous pouvons repérer dans le discours <strong>du</strong> journaliste que celui-ci fait appel à un Grand Autre, Autre del'Autre. La reconnaissance <strong>du</strong> génocide par les Etats étrangers n'est pas suffisante. Celle-ci peut tout au plusoccuper la place <strong>du</strong> sujet supposé savoir, mais l'appel de Hrant Dink convoque le sujet supposé savoir qu'ily a <strong>du</strong> sujet. Non pas un père interdicteur, au visage d'un surmoi féroce, mais un père autorisant. Il invoqueet convoque le grand Autre, lieu de nomination.Même si Lacan a pu dire en fin de compte qu'il n'y a pas d'Autre de l'Autre, néanmoins, il faut qu'il y ait del'Autre ou, sinon, c'est la psychose Ŕ psychose collective dans ce cas-ci. Le psychanalyste Nazir Hamad, écritque « le verbe tuer est à entendre sous la plume de Lacan comme "tu es". Lacan veut dire que cela parledans l'Autre et cet Autre désigne non pas une origine qui permet à l'identité d'y trouver ses appuis et augroupe d'y puiser les éléments de sa "mêmeté". Mais que cet Autre désigne et est le lieu où se constitue le"JE" qui parle avec celui qui entend. Le bon entendeur, n'a pas son Autre puisqu'il n'y a pas d'Autre del'Autre » 17 .Cela nous amène à nous poser la question de savoir qui est le "père de la horde" pour les Turcs dont ilsdevront inévitablement passer par son meurtre pour que la Loi barre la toute-jouissance ? Est-ce l'Empire etses empereurs ? Est-ce Atatürk ou l'Armée ? Peut importe. Ce qui se répète, c'est le discours que lesdifférents successeurs tiennent. Celui-ci persiste dans le discours <strong>du</strong> Maître, soutien <strong>du</strong> discours capitaliste16 Extrait <strong>du</strong> Monde Diplomatique <strong>du</strong> 23 janvier 2007, VICKEN CHETERIAN.17 Nazir Hamad "Identité et l'Autre maternel"32Association des <strong>Forums</strong> <strong>du</strong> <strong>Champ</strong> <strong>Lacanien</strong> de Wallonie (Belgique)Colloque <strong>du</strong> 20 octobre 2007ACTES

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