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Actes - Forums du Champ Lacanien

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Camille CORNETLa petite dame au bord de lřaquarium aux requinsIl répète ces mots sans arrêt, qui sans arrêt circulent ; lřécho se propage de façon assourdissante, lřécholalieest institutionnelle. Le centre se bouche les oreilles. Dans son quartier, cela avait pour conséquence quřilétait battu par les grands garçons exaspérés.Il parle souvent avec une grosse voix. Il ne se tient à aucune activité. Il passe de lřune à lřautre sanstransition et les abandonne à peine commencées.Il mange ses mots et les écrase de façon incompréhensible.Tombe, à certains moments, de cette « bouillie de mots et de bruits langagiers », ce qui ressemble à desquestions, à cause, je crois, dřune intonation qui sřélève comme lřaccent dřun point dřinterrogation, sur unchangement de voix.La règle sociale ne tient pas.Voici, rapidement dit, pour témoigner <strong>du</strong> phénomène rencontré à ce propos, un résumé.La règle, son énoncé, son rappel, donner de la voix, hausser le ton, dire non, tracer une limite, fermer laporte <strong>du</strong> frigo, <strong>du</strong> meuble ne lřarrêtent pas, ne le limitent pas, ne lřapaisent pas. Au contraire, il fonce,bouscule, défonce, bouffe, avale, mord, jette, vide, écrase, déborde, salit, salive… La pulsion orale semble icià lřavant-plan. On rapporte une exception à cela, quand il fait la cuisine avec D… qui lřavait invité à lécher lacrème restant au fond de la casserole, ce quřil a fait délicatement après avoir vérifié sřil pouvait vraiment lefaire. Et il a pu même attendre avec patience… . Elle a voulu, une autre fois, répéter lřexpérience avec unepraline quřil a Ŗboufféeŗ sans enlever le papier car, dira-t-il à son é<strong>du</strong>catrice étonnée « cřest une praline ».Le fond crémeux de la casserole presque totalement vide nous servira de modélisation.Je vais vous parler des premières séances dites dřobservation.a. En séance, il prend la boule de plasticine à pleines mains, lřenfourne toute ronde jusquřà se décrocherles mâchoires, prêt à suffoquer. Je lui dis le souhait de son papa de lřemmener manger proprement auxrepas de famille, je regarde ailleurs, simplement pour ne pas voir ça, pour ne pas arracher. Il la retire et medemande de modeler la boule de plasticine : « fais la boule ». Il me regarde lřarrondir, la lisser, la battre, etlřécraser pour en faire une pâte. Il me demande ensuite de pouvoir peindre à la couleur à lřeau avec <strong>du</strong>rouge, de lřorange et <strong>du</strong> bleu. Il est apaisé.b. En séance, il veut couper et découper la feuille, ce quřil fait. Il découpe en rondelles de plus en pluspetites. Il reste le cœur de la feuille, le tout petit morceau, trop petit, indécoupable. Il veut le coller dans safarde avec le tube de colle quřil écrase. Il colle tout sur tout. Cela devient une énorme bouillie. Le tube decolle se vide. Il sřagite très fort. Il découpe tout dans tout. Je ne sais pas comment il a fait son compte mais lenom de famille D…, qui était écrit au marqueur gras sur sa farde, se découpe et tombe dans la mélasse,se pique de façon étonnamment visible. Devant la chute <strong>du</strong> nom, Chr… sřécrie « merde, merde ». A la suitede quoi il dit « tombé/bé » que jřentends, étonné, tombe bébé. La mélasse, la chose collante reste dans lapoubelle. Je mime « que faire de cela ! »c. Jřavais de la conjonctivite. Ça coule. Il me demande <strong>du</strong> doigt ce que jřai. Il ne se contente pas delřexplication médicale, il dit « battu ». Ensuite, il prend la boule de plasticine, la met en bouche pour lamordre, ce quřil fait, et tenter encore une fois de lřavaler toute. Je lui redis que son papa veut quřil mangeproprement. Il dit « pa pa fou, t’es fou, toi ? » Je lui dis que ma maman et mon papa voulaient aussi quandjřétais petit que jřarrête de tout mettre en bouche. Il remet la plasticine dans le pot, de lui-même. Il prendalors une feuille dont il découpe les coins pour en faire un rond sur lequel il dessine, d’un côté, unejupe et de l’autre, un gros ballon noir. Il dit « moi ». Le papier mouillé se déchire. Il le met en boule etpuis à la poubelle. Il veut me donner un bisou et dit « ton œil ? »d. Il va à la fenêtre et regarde longuement en silence. Il parle de D…, qui est absente. Il dit « elle bat lebébé, elle a une jupe, son homme la bat ». Il me demande de pouvoir venir chez moi me faire la cuisine,manger et jouer, il mettra une jupe. Il la dessine. Je dis « D… » 2 (2).2 Le « pousse-à-la-femme ». Là où la dimension foncière de la castration est exclue, apparaît le pousse-à-la-femme ou la nécessitédřêtre une fille pour lřAutre.N.B. Ch. a mis une « jupe » prise à la maison dans le sac de D.Association des <strong>Forums</strong> <strong>du</strong> <strong>Champ</strong> <strong>Lacanien</strong> de Wallonie (Belgique)Colloque <strong>du</strong> 20 octobre 2007ACTES73

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