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juin 2012 - BIR HAKEIM – 70 ans

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CARNETSbeaucoup plus de détails sur ma vie de lapin sauvage d<strong>ans</strong> montrou. Pour l’instant, le bombardement recommence, je vaisarrêter.Je ne sais s’il y a eu des morts ou des blessés. Le capitaine deBricourt est mort certainement peu de temps après le colon. Jevais arrêter, je ne peux continuer avec les mouches et je suis tropmal pour écrire.Les fusiliers marins avec leur unique pièce quadruple de mitrailleuse de 13,2 mmHotchkiss, montée sur un camion Chevrolet (Imperial War Museum).Jeudi 11 <strong>juin</strong> 1942, 399 e jouret vendredi 12 <strong>juin</strong>, 400 e jourMidi. À cette heure, je suis d<strong>ans</strong> mon camion, je respire à pleinspoumons, je ne suis plus d<strong>ans</strong> mon trou, l’oreille tendue écoutantles avions mais, pour en arriver là, j’ai dû vivre des heures horribles,des scènes que je souhaite ne jamais plus revoir. Mercredisoir, juste quelques minutes après avoir écrit mon journal, unevague d’avions – environ une centaine – est venue nous bombarder.Quel bruit de tonnerre ! Notre position n’était qu’un nuagede poussière… Puis, aussitôt après, l’artillerie n’a pas cesséd’arroser. Je me demande encore comment les bombes et lesobus ne sont pas rentrés d<strong>ans</strong> mon trou. Vraiment quelle tristemine nous pouvions avoir d<strong>ans</strong> ce trou !Mercredi 10 <strong>juin</strong> 1942, 398 e jourJe suis toujours d<strong>ans</strong> mon trou boyau, les copains sont avec moi.Dehors, il y a un brouillard à couper au couteau. Il peut être 7 heures.Quelques coups de fusil ou de mitrailleuses sont tirés par lesAllemands qui sont en bas, d<strong>ans</strong> la plaine. Jusqu’à présent,l’artillerie n’a pas ouvert le feu, certainement à cause du brouillard.La journée d’hier fut pour nous terrible. Nous sommes restésquinze heures d<strong>ans</strong> ce trou s<strong>ans</strong> pouvoir mettre le nez dehors.L’artillerie a tiré presque toute la journée et, avec ça, leurs automitrailleusesnous faisaient siffler les balles au-dessus de la tête.Nous avons essuyé trois bombardements par avion ; à un desbombardements, il y avait au moins 60 à <strong>70</strong> appareils. Hier versles 9 heures du soir, en sortant, nous avons été figés en apprenantla mort de notre chef, Broche, tué d<strong>ans</strong> son PC par un obus ; lecapitaine de Bricourt, son second, grièvement blessé 20 . Triste nuitque nous avons passée avec ces nouvelles ! De plus, l’état d’alertea été donné, et il a fallu que je sorte mon camion de ce trou, carcelui de Lemaître se trouvant à une cinquantaine du mien étaiten flammes et je craignais que le mien soit repéré. Après renseignementssur l’alerte et [voyant] que le camion de Lemaître nebrûlait plus, je suis revenu mettre mon camion d<strong>ans</strong> son trou àl’aide d’une remorque, car, pour compléter le tableau, moncamion ne marchait pas. Tout ceci d<strong>ans</strong> la nuit noire troublée parles balles perçantes que l’ennemi nous envoyait. Je vais arrêter. Jene peux continuer à écrire, je suis mal assis, j’ai mal partout.Je reprends la plume toujours d<strong>ans</strong> mon trou. Je ne suis pasencore sorti depuis ce matin. Il est environ 5 heures, il resteencore quatre heures à patienter, j’ai les fesses en compote, lesgenoux qui me font mal à force de rester recroquevillés. Avec ça,les mouches qui viennent d<strong>ans</strong> les oreilles le nez et la bouche…Je prends des crises de rage, c’est une vie de forçat. Pour lapremière fois aujourd’hui, nous avons fait un peu de porridged<strong>ans</strong> le trou. Nous avons eu soin de mettre tout ce qu’il fallaitpour le faire près du trou. Jusqu’à présent, on prenait un peu dethé le matin à 5 heures pour tenir le soir jusqu’à 9 heures. Dehors,le canon gronde ; j’entends au loin de l’artillerie, je prie sainteThérèse pour que les Anglais viennent nous délivrer.Vers midi, nous avons eu un sérieux bombardement par avion,peut-être 100 avions sont venus nous laisser tomber des bombes.Éléments de la 1 re BFL d<strong>ans</strong> le désert libyen (coll. particulière).Vers les 9 heures, comme les jours précédents nous sommes sortisdu trou, pour faire un peu de thé puis manger une boîte. Unedemi-heure après, nous recevions l’ordre de nous préparer à laisserla position ; pour cela, le gros coup était de percer la ligne ennemie.Ceux n’ayant plus de camions à la suite des bombardementsdevaient suivre à pied. Aussitôt, j’ai pris ma petite valise, ramassémon journal, les albums photos, puis quelques souvenirs, s<strong>ans</strong>oublier de déterrer mon écusson du Pacifique. Toutes ces bricolesramassées puis mises d<strong>ans</strong> mon sac, j’ai ramassé toutes lescouvertures, puis mis mon moteur en marche. J’arrête pour lireune lettre d’Yvette. Je reprends la plume après un bon quart dethé. La lettre que je viens de recevoir est de Rosette ; je croyais, àl’écriture, qu’elle était d’Yvette.Je continue ma série de mercredi. J’aurais brûlé mon camion decolère : c’est toujours d<strong>ans</strong> ces moments-là que tout s’emmêle.Vers les 10 heures du soir, les camions du LAD se sont dirigés versle PC pour attendre le départ ; de temps en temps, nos petits75 tiraient pour tromper l’ennemi. Pendant ce temps, tous lescamions arrivaient sur la ligne de départ ; ceux qui ne pouvaientmarcher étaient achevés à coups de baïonnette d<strong>ans</strong> les pneus oud<strong>ans</strong> les radiateurs. Vers les 11 heures, les camions ont commencéà démarrer, d<strong>ans</strong> mon camion j’avais Magnier, sur les ailesBlanchet et Gazengel. Triste spectacle de voir partir ce convoi20Le capitaine Gaston Duché de Bricourt, adjoint du lieutenant-colonel Broche, a été tué par le même éclat d’obus que son supérieur.Juin <strong>2012</strong> • N° 44 l 41

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