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juin 2012 - BIR HAKEIM – 70 ans

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MÉMOIRESRien n’est plus embêtant à la Légion étrangère que de faire desprisonniers. Une fois que les légionnaires ont manifesté leur hostilitépar des gestes et des invectives, les rapports se détendent et il s’entrouve toujours quelques-uns pour venir parler du pays puiss’attendrir et se multiplier auprès des captifs.Ceux qui pourraient servir d’interprètes interviennent d<strong>ans</strong> ledialogue. D<strong>ans</strong> le cas particulier, je ne pus savoir si l’équipe quej’avais dispersée cherchait à ouvrir une brèche d<strong>ans</strong> la bretelle ni side gros éléments s’étaient déjà engagés plus loin vers l’est.Je laissai ce souci au 2 e bureau de la brigade.Nous rentrâmes le soir à Bir Hacheim fiers de notre capture facile.On nous y accueillit avec exubérance, tout à la joie de la raclée infligéele matin aux Italiens. Pour mieux savourer la victoire, je me rendisauprès des camarades de la face sud-est sur laquelle l’attaqued’Ariete avait porté.Je les trouvai en pleine euphorie, Pernet, Camerini, Germain,Mantel, Ferrières et Favre.Je jugeai décent de ne pas leur parler de mon Opel quand je vis,mouchetant le désert sur une profondeur de 1 500 mètres, lessilhouettes immobilisées des M13 4 .Deux d’entre eux avaient pénétré à l’intérieur de la position etavaient été arrêtés de justesse par des coups en caponnièrel’un même au moment précis où il faillit faire sauter le PC de la5 e compagnie.Je demandai à Ferrières qui commandait une section de 75 anticharss’il avait eu peur. Il n’en avait pas eu le temps, me répondit-il.Favre, qui avait des voltigeurs, m’affirma qu’il n’avait rien d’autre àfaire, de toute la matinée, qu’à compter les coups ; la batailleconcernait les antichars, et ses légionnaires, assis sur les parapets,s’étaient bornés à encourager du geste et de la parole lespointeurs au 75.L’attaque italienne était un fiasco complet.Ariete n’avait même pas cherché à garder le contact, un colonelavait été « fait aux pattes » en piteux état, on le soignait àl’ambulance Spears.Je décidai de dîner sur les lieux de la bataille et passai avec quelquescamarades d<strong>ans</strong> le trou de Mantel, une des meilleures soirées de laguerre.Comme l’habitude en avait été prise en Libye, on brancha la radiosur Sofia pour écouter Lili Marleen, qui nous parut une bien doucedérision.Nous tâchâmes aussi d’accrocher la BBC, mais Maurice Schumannse borna à dire que l’offensive de Rommel était déclenchée enLibye et qu’il nous faisait confiance.Une petite gerbe des fleurs de sa rhétorique, pour flatter comme ilse doit la vanité du guerrier, nous eut, ce soir-là, comblés.Mais il n’avait pas reçu notre communiqué et les « hoche-queues » 5de la 13 e demi-brigade allaient se coucher, modestement certainsd’avoir sinon gagné la guerre, tout au moins fait avancer la victoired’un bon pas.Le lendemain, ou deux jours plus tard, je ne me rappelle plus trèsbien, la compagnie retournait à Garet el Hemmour.Rien n’était changé, les Allemands n’étaient pas passés, mais ilspatrouillaient d<strong>ans</strong> mon V de mines ; à cinq kilomètres au nord dela Garet, ils circulaient impunément entre les deux bandes.D<strong>ans</strong> l’après-midi, nous essayâmes de rattraper un pick-up quiroulait d<strong>ans</strong> les parages de l’ennemi pour le prévenir qu’on tentaittrop le sort.Nous ne tardâmes pas à nous apercevoir qu’il s’agissait d’un véhiculecapturé sur lequel les Allemands avaient peint une croix gammée etle palmier de l’Afrikakorps.Nous lui donnâmes la chasse, parvînmes à l’acculer aux mines et àle rabattre en direction de Garet el Hemmour.Ses occupants étaient tout surpris de leur mésaventure, l’un deux,un juif nous expliqua qu’Hitler lui avait donné l’occasion de faireoublier sa race en lui ouvrant les portes des «compagniesderepentir ». Il nous affirma que les Allemands étaient très loin à l’estet s’apprêtaient à attaquer El Adem, Acroma et Tobrouk s<strong>ans</strong>s’attarder à ce qui subsistait de la ligne Gazala-Bir Hacheim.Nous ne le crûmes qu’à moitié.Le général avait envoyé une forte colonne occuper Rotonda Signalià 30 km à l’ouest de Bir Hacheim.C’était plutôt les troupes de Rommel qui nous paraissaient enmauvaise posture.Pourtant, je ne tardai pas à comprendre que la situation n’était pasaussi favorable que nous l’escomptions.J’aperçus au-delà de la branche est du V une masse impressionnantede véhicules installés en toute quiétude.J’eus l’ordre de passer la nuit sur place et pour mission de signalertoute pénétration à l’intérieur du V et, cette fois, à partir de saface est.Pendant toute la nuit, j’entendis tourner les moteurs, trépider desmarteaux compresseurs, rouler des engins : l’ennemi installait aunord-est de Bir Hacheim une espèce de base.Nous patrouillâmes prudemment autour d’elle pour en déterminerl’importance et le contour. Je renonçai à un coup de main. Il auraitfallu pour atteindre l’ennemi franchir les barbelés et les mines maisaprès, il aurait fallu les repasser en sens inverse d<strong>ans</strong> un hourvari,se découvrir et compromettre la mission qui était d’épier le pluslongtemps possible cette masse redoutable.Nous nous accommodâmes fort bien du voisinage pendant deuxou trois jours. Le V de mines était une sorte de no man’s land maisla piste Bir Hacheim-El Hemmour semblait sûre.Les Allemands paraissaient ne plus vouloir se frotter à Bir Hacheim ;on ne les rencontrait que du côté de notre Garet qui devint lerendez-vous des camarades qui avaient envie de se dégourdir lesjambes ou de faire un carton.Chavanac et Quirot s’accompagnaient d’une batterie de 75, ladéployaient sous la protection de la compagnie, puis partaient avecnous à la recherche d’objectifs.Il n’en manquait pas, mais il ne fallait pas compter aller «auxrésultats ». Messmer et Sartin avaient imaginé un procédé deharcèlement ni orthodoxe ni efficace probablement mais follementamusant.Il consistait à hisser un de nos 75 à petites roues d<strong>ans</strong> la benne d’uncamion Bedford ; profitant de la chaleur qui, à midi, brouille l’horizonet déforme les silhouettes, nous nous approchions au plus près desconcentrations allemandes pour lâcher à vue directe des bordéesterribles, attendant la riposte qui nous reconduisait, zigzaguant àtoute allure sous une grêle d’obus, jusqu’à Garet el Hemmour.4Il s’agit du char italien Fiat-Ansaldo M13/40 (NDLR).5C’est ainsi que le commandant Babonneau, chef de la 2 e BLE, appelait les aspirants.Juin <strong>2012</strong> • N° 44 l 57

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