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juin 2012 - BIR HAKEIM – 70 ans

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MÉMOIRESLe témoignage de Jacques Bourdissur Bir HakeimCe récit de Jacques Bourdis (1920-2007), sous-lieutenant au 2 e bataillon de la 13 e demi-brigade de Légion étrangère(13 e DBLE) à Bir Hakeim et compagnon de la Libération, était conservé sous la forme de 18 pages manuscrites photocopiéesd<strong>ans</strong> les archives de Jacques Roumeguère.J’étais parti faire campagne d<strong>ans</strong> le Western Desert 1 à la tête d’unesection de « Brenn-Gun-Carriers » 2 .Pour les anglais qui l’avaient conçu et construit, cet engin était unmoyen de tr<strong>ans</strong>port légèrement blindé, propre à déplacer sous lefeu une équipe de fusiliers, ou de voltigeurs.J’étais très fier de mon matériel, de la place qu’il tenait d<strong>ans</strong> lescolonnes, du sentiment d’envie qu’inspiraient à leurs camarades àpied mes légionnaires motorisés et blindés.Le lieutenant Jacques Bourdis tr<strong>ans</strong>met un message à la radio. Ce dernier émet à bordd’un Bren Carrier équipé d’un poste Army Wireless II (Imperial War Museum).Mais j’appréhendais le rôle de valet d’armes qui m’incomberait unpeu et voyais mes Brenns voués à tr<strong>ans</strong>porter non seulement deshommes et des munitions mais encore, une cargaison moinsnoble, des vivres et de l’eau.L’originalité et l’esprit inventif des Français devaient vite dissipermes craintes.La brigade avait tout juste assez d’automitrailleuses pour lesreconnaissances lointaines et nos engins semblaient aptes àpatrouiller autour des positions ; il suffisait de les armer enconséquence.En plein désert, au gré de l’inspiration des plus inventifs et avec desmoyens de fortune, nos chenillettes furent aménagées et sehérissèrent bientôt des armes les plus diverses, de canons de 25 mmen particulier.Fier comme Artaban, je me vis bientôt à la tête d’un gros peloton dereconnaissance sillonnant le désert, à la recherche de renseignements,de puits et des précisions topographiques dont nos cartes étaientavares.Rayonnant à partir des positions de Mechili puis de Bir en Naghia,enfin de Bir Hacheim, je me prenais pour un méhariste de la guerremécanique.Lorsqu’il s’avéra que Rommel allait attaquer la position de BirHacheim, ma mission fut de surveiller les champs de mines qui lareliaient à sa voisine britannique du nord.Ma compagnie avait établi une sorte de point d’appui temporaireautour d’une de ces tables que le vent avait sculptées en pleindésert, Garet el Hemmour.De là partirent mes patrouilles, de là nous vîmes d<strong>ans</strong> nos jumellesarriver l’armada italo-allemande, le matin du 28 mai.Elle s’approcha du champ de mines, le tâta prudemment puis sescinda pour le longer, partie en direction du nord, partie en directiondu sud, c’est-à-dire de Bir Hacheim.Nous nous trouvâmes bien légers devant un tel déploiement deforces à 1 000 mètres de nous. Nos mines nous parurent tout à coupbien mal enterrées et stupidement révélées par les fils de fer qui lesentouraient.Notre canon de 75 semblait bien seul, la compagnie bien dérisoire.Notre premier réflexe fut de nous faire le plus petit possible pourpasser inaperçus en attendant les évènements et les ordres.De toute la journée nous ne fûmes pas directement pris à partie.Rommel attaquait au nord et avait confié à une brigade blindéeitalienne le soin de faire tomber Bir Hacheim dont il ne pouvaittolérer la garnison sur ses arrières ?À la fumée des explosions, nous suivîmes donc vaguement et deloin l’attaque de la position, que nous avions mis trois mois à édifier.L’affaire ne nous parut pas très sérieuse ; rien ne se passait sur laplace du nord qui nous était la plus proche, l’aviation allemandedéployait assez peu d’activité et la seule artillerie dont nousdistinguions le bruit était celle, rageuse, de nos 75.Je patrouillai donc à partir de Garet el Hemmour presqu’aussitranquillement qu’auparavant.Il s’avérait pourtant que l’ennemi avait franchi les mines au nord.Je surpris quelques véhicules et quelques fantassins en train delonger vers l’est une bretelle très large.L’occasion était bonne. J’embossai mes Brenns derrière un monticule,escomptant ne pas avoir été vu, quittai ma voiture, sautai d<strong>ans</strong> unde mes deux Brenns porte-canons de 25 et privai égoïstement sontireur du premier carton de la campagne, une de ces Opel quisemblaient avoir six roues.Le coup l’immobilisa, ses occupants disparurent vers le nord. Deuxpauvres diables d’Italiens qui étaient déjà entrés d<strong>ans</strong> le champ demines qu’ils perforaient à la baïonnette, se précipitèrent en avant ettombèrent sur la section, mi-tremblants, mi-joyeux, criant à peuprès : « è finita la guerra ! » 3 .1En français, « désert occidental ». Cette expression désigne le désert à l’ouest du Nil (NDLR).2L’orthographe exacte de ce véhicule britannique est « Bren Gun Carrier » (NDLR).3« La guerre est finie » (NDLR).56 l Juin <strong>2012</strong> • N° 44

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