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juin 2012 - BIR HAKEIM – 70 ans

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MÉMOIRESchez les plus endurants ; aucune colonne de secours ne parvenait àpercer ; les réserves de vivres étaient au plus bas, et nous étionsdésespérément à court de munitions.Sur le plan tactique, l’ennemi était parvenu au prix de lourds sacrificesà grignoter et occuper du terrain. Des éléments d’infanterie avaient àprésent pratiquement investi l’une des limites du camp, de sorte queles échanges à l’arme légère se multipliaient à longueur de journée.Il devenait alors inévitable que la décision soit prise, d<strong>ans</strong> l’aprèsmididu 10 <strong>juin</strong>, d’évacuer hors du camp le maximum possible despersonnels et matériels qui s’y trouvaient retranchés.Nous prîmes donc grand soin de poursuivre notre routine habituellependant tout l’après-midi et la soirée : il fallait absolument quel’évacuation soit une surprise totale. Le tout compliqué par le faitque plus de deux mille hommes se trouvaient d<strong>ans</strong> l’obligationd’évacuer leurs positions à pied. Vers 11 heures du soir, nous nousregroupâmes au GSD avec les quatre ambulances qui nous restaientet entreprîmes d’y charger le plus grand nombre de blessés possible.Bien sûr, la plupart d’entre eux durent être placés d<strong>ans</strong> les camionsprévus pour nous suivre. D<strong>ans</strong> l’ordre Jim Worden en tête, suivi deTichenor, de moi-même, puis de Mac Elwain et Kulak (d<strong>ans</strong> le mêmevéhicule), enfin Stratton en serre-file, nous nous dirigeâmes versl’angle sud-ouest du camp, où nos sapeurs venaient juste de finir dedégager un passage à travers nos propres mines.L’attente nous parut interminable, car ce n’était de toute évidencequ’une simple question de temps avant qu’une patrouille ennemiene repère notre regroupement silencieux. Pourtant cette attente seprolongeait. Au moment même où nous nous mîmes en mouvement,une fusée éclairante jaillit juste au-dessus de nous. L’enjeu setr<strong>ans</strong>forma alors en une course de vitesse contre la précision des tirsennemis.Presque immédiatement, l’ennemi déclencha un feu intense demitrailleuses et de canons Breda (un canon à tir rapide antichars). Siun massacre devait se produire, le moment était arrivé : du fait d’onne sait quel raté, les lucioles destinées à baliser notre itinérairen’avaient pas fonctionné, et nous étions obligés de nous diriger enaveugles à travers un terrain dangereusement truffé de mines. Pourtout compliquer, le passage était bordé de chaque côté par desrouleaux de barbelés dévidés : de sorte qu’il suffisait qu’un véhiculefrôle cet amalgame pour s’y retrouver irrémédiablement piégé.Comme par miracle, le feu ennemi se trouva réglé trop haut au coursdes dix ou quinze premières minutes. Les rafales et les obus de Bredasifflaient au-dessus de nous tandis que nous parvenions à progresserde quelques mètres. Nous nous arrêtions une ou deux minutes pournous abriter derrière les roues de nos véhicules, repartions, et ainsi desuite. Mais ils finirent par ajuster le tir de leurs armes automatiquesde plein fouet d<strong>ans</strong> les troupes à pieds ainsi que d<strong>ans</strong> les véhicules. Àpartir de cet instant, le site s’illumina d<strong>ans</strong> les lueurs rougeoyantesdes camions en feu.Je continuais cette progression par à coups, lorsque je sentis soudainmon ambulance se bloquer. Je m’aperçus que je m’étais emmêlé d<strong>ans</strong>un rouleau de barbelés. Mes efforts désespérés pour me dégager nefirent qu’empirer la situation. À dix mètres devant moi, en travers dupassage, je constatais que le commandant du GSD se trouvaitconfronté au même problème. Tandis que j’essayais de l’aider, ildécida qu’il n’y avait pas la moindre chance de libérer son véhicule.Il l’abandonna, embarqua d<strong>ans</strong> celui de Worden, et notre convoireprit sa progression… en me laissant sur place. Tichenor disparut,suivant Worden, tandis que Kulak et Mac Elwain démarraient etpartaient à leur tour. Nous apprîmes plus tard que le camion deStratton s’était retrouvé haché par des tirs de mitrailleuses. Bienqu’aucun occupant ne fût atteint, les balles avaient coupé le moteuret détruit la direction. Hélant un autre véhicule qui lui lança uncâble, il parvint à repartir à la remorque.Par un coup de chance, une automitrailleuse se trouvait abandonnéetout près de ma position. Avec l’aide d’un Anglais des RASC 6 ,noussortîmes les quatre blessés de mon ambulance, d<strong>ans</strong> laquelle ils setrouvaient d<strong>ans</strong> une position extrêmement dangereuse. Pendanttoute cette manœuvre, nous eûmes une sacrée frayeur : une rafaletr<strong>ans</strong>perça les roues arrière, tandis que nous nous affairions àextraire les civières. Nous les traînâmes jusqu’à l’automitrailleusecontre laquelle nous les adossâmes, leur procurant ainsi une protectionappréciable. Finalement, au bout d’une demi-heure, un camion avecsuffisamment de place pour embarquer nos blessés qui gisaient àmême le sol s’arrêta. Mais nos malheurs n’allaient pas en rester là :tandis que, dressé sur le marchepied, je discutais avec le conducteur,un obus de Breda explosa sur le capot, nous projetant tous au sol. Parchance, je m’en tirais avec une légère blessure à la jambe, ce qui,compte tenu des circonstances, était tout à fait insignifiant. Mais levéhicule était hors d’usage. Finalement, un camion françaisaccompagné d’une ambulance s’arrêta. Ils avaient de la place etembarquèrent les blessés.De son côté, Stratton se retrouvait d<strong>ans</strong> une situation désastreuse unpeu plus loin. Un obus avait frappé son ambulance de face,enflammant instantanément le véhicule et ses réserves de carburant.Il écopa d’au moins onze blessures provoquées par les éclats ayanttraversé le compartiment moteur, et se retrouva à plat ventre au solhors de portée des flammes. Bien que le câble de remorquage parvîntà être immédiatement largué, il s’avéra impossible de secourir lesblessés, qui périrent brûlés à l’arrière de l’ambulance. Stratton futrécupéré par un camion, à bord duquel il passa le terrible barragequi était maintenant parfaitement réglé, l’ennemi arrosant véritablementle passage d’une pluie de feu. Presque tous les véhicules, ycompris ceux qui parvinrent à passer,furent touchés au moins une fois.George Tichenor (AFS).6RASC : Royal Army Service Corps. Service d’intendance et de logistique en campagne.Juin <strong>2012</strong> • N° 44 l 85

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