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Lire le livre - Bibliothèque

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- Alors, tu n’as rien à craindre, lui avait dit Bosmans. Il doit être là-bas en train demonter la garde jusqu’à la fin des temps.El<strong>le</strong> avait éclaté de rire, ce qui avait rassuré Bosmans. Les deux autres aussil’attendaient peut-être à son ancienne adresse, pour lui demander encore de l’argent.Il <strong>le</strong>s imaginait sur <strong>le</strong> trottoir, la femme aux cheveux rouges, la tête haute, en figure deproue, et l’homme toujours aussi raide dans sa cambrure de torero.- Et comment il s’appel<strong>le</strong>, ce type ? avait demandé Bosmans. Tu peux au moins medire son nom.El<strong>le</strong> avait hésité, un instant. Une expression d’inquiétude avait traversé son regard.- Boyaval.- Il n’a pas de prénom ?El<strong>le</strong> ne répondait rien. De nouveau, el<strong>le</strong> paraissait préoccupée. Bosmans n’avait pasinsisté. La neige tombait, cette nuit-là. Il suffisait, avait-il dit à Margaret, de sepersuader que l’on se trouvait très loin de Paris, à la montagne, quelque part enEngadine. Ces trois syllabes étaient douces à prononcer, el<strong>le</strong>s vous apaisaient etvous faisaient oublier toutes <strong>le</strong>s mauvaises rencontres.Boyaval. Il était content d’avoir mis un nom sur cet individu qui semblait tantpréoccuper Margaret. Une fois que l’on savait <strong>le</strong> nom, on pouvait affronter <strong>le</strong> danger. Ilse proposait, à l’insu de Margaret, de neutraliser ce Boyaval comme il avait neutraliséla femme aux cheveux rouges, sa mère, paraît-il, et l’homme vêtu de noir dont ilhésitait à dire s’il avait l’allure d’un prêtre défroqué ou d’un faux torero.Avec <strong>le</strong> temps… L’autre jour, il suivait la rue de Seine. Le quartier avait changé depuisl’époque lointaine de la femme aux cheveux rouges et du prêtre défroqué. Et pourtantil voyait s’avancer vers lui, sur <strong>le</strong> trottoir où il marchait, une femme de haute tail<strong>le</strong> avecune canne. De loin il la reconnut, bien qu’il ne l’eût pas rencontrée depuis trente ans :cel<strong>le</strong> qui, selon l’état civil, était sa mère. El<strong>le</strong> n’avait plus <strong>le</strong>s cheveux rouges, maisblancs. El<strong>le</strong> portait un imperméab<strong>le</strong> vert bouteil<strong>le</strong>, de coupe militaire, des chaussuresde montagne, et sur <strong>le</strong> devant une sorte de besace, retenue par une courroie àl’épau<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> marchait d’un pas ferme. Apparemment, la canne ne lui servait à rien,une canne qui semblait plutôt un alpenstock.El<strong>le</strong> aussi <strong>le</strong> reconnut. Il s’était arrêté à la hauteur de l’ancien café Fraysse et laregardait dans <strong>le</strong>s yeux, pétrifié, comme s’il faisait face à une Gorgone. El<strong>le</strong> <strong>le</strong>dévisageait, <strong>le</strong> menton tendu, d’un air de défi. El<strong>le</strong> lui lança un flot d’injures dans unelangue guttura<strong>le</strong> qu’il ne comprenait pas. El<strong>le</strong> <strong>le</strong>va sa canne et tenta de <strong>le</strong> frapper à latête. Mais il était trop grand et la canne vint heurter son épau<strong>le</strong>, lui causant unedou<strong>le</strong>ur assez vive.Il se recula. Le bout ferré lui eff<strong>le</strong>ura <strong>le</strong> cou. El<strong>le</strong> s’appuyait maintenant sur la canne,très raide, <strong>le</strong> menton toujours arrogant, et <strong>le</strong> fixait de ses yeux qui semblaient àBosmans beaucoup plus petits et plus durs qu’autrefois.Il s’écarta poliment pour lui laisser <strong>le</strong> passage.- Madame…

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