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Lire le livre - Bibliothèque

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La voix était dure, menaçante. Bosmans espéra de tout son cœur que cet individu fûtBoyaval. Il aimait voir <strong>le</strong> danger en face. Il relâcha la pression de ses doigts.- Vous êtes monsieur Boyaval ?- Pas du tout.L’homme se <strong>le</strong>va et se planta devant Bosmans dans une attitude défensive.- Vous en êtes sûr ? lui demanda Bosmans d’une voix calme. Vous n’êtes pasBoyaval ?Il dominait l’homme d’une tête et pesait plus lourd que lui. L’autre paraissait s’enrendre compte. Il restait muet.- Alors, tant pis.Il rejoignit Margaret au seuil de l’escalier. El<strong>le</strong> était très pâ<strong>le</strong>.- Alors ?- Ce n’est pas lui.Ils étaient tous deux assis sur l’un des bancs, en attendant la rame du métro. Ilremarqua que <strong>le</strong>s mains de Margaret tremblaient légèrement.- Mais pourquoi tu as si peur de lui ?El<strong>le</strong> ne répondait pas. Il regrettait que cet homme ne fût pas Boyaval. Il avait espéréen finir une fois pour toutes. C’était idiot, cette menace dans l’air, ce type présent maisinvisib<strong>le</strong> qui la terrorisait sans qu’el<strong>le</strong> lui dise exactement pourquoi. Lui n’avait peur derien. Du moins <strong>le</strong> répétait-il à Margaret pour la rassurer. Quand on avait eu affairedepuis son enfance à la femme aux cheveux rouges et au prêtre défroqué, on ne selaissait impressionner par personne. Il <strong>le</strong> répétait encore à Margaret, là, sur <strong>le</strong> banc dumétro. Il voulait la distraire en lui décrivant ce coup<strong>le</strong> qu’il devait encore affronter detemps en temps, au hasard d’une rue : l’homme avec sa brosse courte, ses jouescreuses, son regard d’inquisiteur; la femme au menton tragique, toujours aussiméprisante dans sa veste afghane… El<strong>le</strong> l’écoutait et finissait par sourire. Il lui disaitque tout cela n’avait pas beaucoup d’importance, ni ces deux individus qui <strong>le</strong>poursuivaient de <strong>le</strong>ur hostilité sans qu’il comprenne pourquoi et lui réclamaient chaquefois de l’argent, ni Boyaval, ni rien. D’un jour à l’autre, ils pouvaient quitter Paris pourde nouveaux horizons. Ils étaient libres. El<strong>le</strong> hochait la tête comme s’il l’avaitconvaincue. Ils restaient assis sur <strong>le</strong> banc et laissaient passer <strong>le</strong>s rames du métro.Quelqu’un lui avait chuchoté une phrase dans son sommeil : Lointain Auteuil, quartiercharmant de mes grandes tristesses, et il la nota dans son carnet, sachant bien quecertains mots que l’on entend en rêve, et qui vous frappent et que vous vouspromettez de retenir, vous échappent au réveil ou bien n’ont plus aucun sens.Il avait rêvé cette nuit-là de Margaret Le Coz, ce qui lui arrivait rarement. Ils étaienttous <strong>le</strong>s deux assis à une tab<strong>le</strong> du bar de Jacques l’Algérien, la tab<strong>le</strong> la plus proche dela porte d’entrée, et cel<strong>le</strong>-ci était grande ouverte sur la rue. C’était une fin d’après-midid’été et Bosmans avait <strong>le</strong> so<strong>le</strong>il dans <strong>le</strong>s yeux. Il se demanda si son visage était celuid’aujourd’hui ou bien celui de ses vingt et un ans. Certainement <strong>le</strong> visage de ses vingt

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