La prise en charge <strong>de</strong>s mineurs en difficulté.Eléments d’analyse dans la région <strong>de</strong> NamurLe paysage <strong>de</strong> la prise en charge <strong>de</strong>s enfants souffrant d’un handicapphysique, mental ou psychique s’est diversifié au fil du temps pour adapterprogressivement les réponses aux multiples situations <strong>de</strong> détresseexistantes. Résultat : nombreuses sont aujourd’hui les institutions qui secomplètent <strong>et</strong> s’articulent dans différents secteurs pour ai<strong>de</strong>r les enfantsen difficultés, au bénéfice <strong>de</strong>s enfants mais au détriment peut-être d’unebonne lisibilité <strong>de</strong>s ressources. De là à vouloir m<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> l’ordre… il n’y aqu’un pas … bien légitime certes ! Pour autant que l’on puisse se donnerles garanties que le secteur pourra suivre <strong>et</strong> qu’aucun enfant ne resterasur le carreau. Il faut dire qu’aujourd’hui, les situations sont <strong>de</strong> plus enplus complexes <strong>et</strong> mêlent très souvent <strong>de</strong>s paramètres individuels,sociaux, familiaux, économiques, … ce qui ne facilite en rien l’analyse.C’est dans ce cadre, après une première phase <strong>de</strong> restructuration, quela Commission Jeunes <strong>de</strong> la Commission subrégionale <strong>de</strong> l’AWIPH– Namur a interpellé l’<strong>Institut</strong> Wallon pour la Santé Mentale pour faireson bilan <strong>de</strong>s premiers changements. L’étu<strong>de</strong> tente <strong>de</strong> donner un aperçu<strong>de</strong> l’actuelle prise en charge <strong>de</strong>s mineurs en difficultés ainsi qu’une idéeprécise <strong>de</strong>s conséquences <strong>de</strong> la réforme, tout en faisant écho <strong>de</strong>s inquiétu<strong>de</strong>sformulées par les acteurs concernés dans les différents secteurs.Virginie Olivier, chargée <strong>de</strong> recherche, IWSMLa réforme en questionL’étu<strong>de</strong> a pour contexte l’arrêté duGouvernement <strong>wallon</strong> du 26 juin2002, « modifiant celui du 9 octobre1997, relatif aux conditions d’agrément<strong>et</strong> <strong>de</strong> subventionnement <strong>de</strong>s servicesrési<strong>de</strong>ntiels, d’accueil <strong>de</strong> jour <strong>et</strong> <strong>de</strong> placementfamilial pour personnes handicapées ».Il organise la ferm<strong>et</strong>ure progressive <strong>de</strong>sServices d’Accueil <strong>de</strong> Jour pour Jeunes -SAJJ dépendant <strong>de</strong> l’AWIPH. L’objectif <strong>de</strong> c<strong>et</strong>arrêté était d’une part d’augmenter à la fois lenombre <strong>de</strong> places pour personnes handicapéesadultes <strong>et</strong> celui pour enfants <strong>et</strong> adultespolyhandicapés, <strong>et</strong> d’autre part d’ouvrir <strong>de</strong>sServices d’Ai<strong>de</strong> à l’Intégration – SAI, prenanten charge davantage d’enfants selon uneautre formule (non quotidienne). Il s’agissaitaussi <strong>de</strong> réformer <strong>de</strong>s services aux pratiquesfort différentes, certains étant, aux yeux dupolitique, assimilés à <strong>de</strong>s ‘semi-internats scolaires’.Chaque SAJJ pouvait effectuer c<strong>et</strong>t<strong>et</strong>ransformation en <strong>de</strong>ux phases, l’une effectiveen 2003, l’autre <strong>de</strong>vant l’être en 2006.Notons que ceux qui ont décidé d’opter pourc<strong>et</strong>te ferm<strong>et</strong>ure en <strong>de</strong>ux temps espèrent toujourspouvoir, avec les places dont ils disposentencore, poursuivre le travail spécifiquequ’ils mènent en SAJJ, basée notamment surla fonction d’accueil.Parallèlement, <strong>de</strong>s diminutions <strong>de</strong> 10 % <strong>de</strong>slits étaient annoncées dans les ServicesRési<strong>de</strong>ntiels pour Jeunes - SRJ dont la capacitéétait supérieure à 75 lits, dans l’optique<strong>de</strong> réhabiliter ces places pour <strong>de</strong>s adultes.L’étu<strong>de</strong> en questionL’IWSM a choisi d’approcher c<strong>et</strong>te mutationtransectorielle <strong>de</strong> manière qualitative, par lebiais d’entr<strong>et</strong>iens avec différents services duNamurois concernés directement ou indirectementpar la réforme. Transectorielle car, siseuls certains services bien définis ont étédirectement touchés par c<strong>et</strong>te restructuration,c’est toute une panoplie <strong>de</strong> services, issus<strong>de</strong> divers secteurs (AWIPH, Santé mentale,Enseignement, Ai<strong>de</strong> à la jeunesse, <strong>et</strong>c.), quis’est sentie concernée par le même souci <strong>de</strong>continuer à trouver une ai<strong>de</strong> appropriée pour<strong>de</strong>s jeunes qui en montrent le besoin.Il a aussi choisi <strong>de</strong> centrer son approche surles enfants <strong>et</strong> leurs trajectoires <strong>de</strong> vie. Car unenfant pris en charge dans un service vient<strong>de</strong> quelque part (parfois d’un autre service) <strong>et</strong>poursuit son chemin par la suite. L’étu<strong>de</strong> sevoulait particulièrement vigilante par rapportau <strong>de</strong>venir <strong>de</strong>s enfants qui avaient dû quitterune structure SAJJ ou SRJ suite à la restructuration: <strong>de</strong>s jeunes avaient-ils perdu leurplace en se r<strong>et</strong>rouvant sans solution ?Les conséquences au niveau<strong>de</strong>s enfants...La réponse à c<strong>et</strong>te question s’est avéréeheureusement négative pour la majorité<strong>de</strong>s cas. En SRJ, les places perduescorrespon<strong>de</strong>nt à <strong>de</strong>s fins <strong>de</strong> prise en charge <strong>et</strong>,en SAJJ, mis à part pour un seul <strong>de</strong>s servicesqui a transformé toutes ses places enplaces pour adultes, les bénéficiaires étaientsoit en fin <strong>de</strong> prise en charge, soit orientés-généralement les plus âgés- vers le SAI créésuite à la restructuration. Des contacts avecles partenaires scolaires laissent toutefoisentendre les risques <strong>de</strong> décrochage pourles enfants issus du seul SAJJ qui a ferméses portes.8Confluences n°11 septembre 2005
... <strong>et</strong> <strong>de</strong>s institutionsL’étu<strong>de</strong> s’est aussi intéressée aux fonctionsredéfinies <strong>de</strong>s SAI, SAJJ <strong>et</strong> <strong>de</strong>s SRJ. Il s’estavéré que chacun <strong>de</strong> ces services offrait bienune prise en charge spécifique adaptée à<strong>de</strong>s besoins particuliers d’enfants, en fonctiontantôt <strong>de</strong> l’âge (par exemple les enfants plusjeunes se r<strong>et</strong>rouvent plus souvent en SAJJ),tantôt <strong>de</strong> la problématique (les problématiquesdoivent être plus limitées pour êtresuivies en SAI) ou <strong>de</strong>s ressources familiales(on pourra plus facilement éviter une prise encharge rési<strong>de</strong>ntielle en SRJ si on peut comptersur la collaboration <strong>de</strong> la famille), <strong>et</strong>c.On ne peut donc remplacer un service par unautre mais la diversité <strong>de</strong>s réponses perm<strong>et</strong><strong>de</strong> mieux rencontrer la diversité <strong>de</strong>s besoins.L’orientation <strong>de</strong>s situations…Le profil <strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s concernant <strong>de</strong>senfants en difficulté est en mutation <strong>de</strong>puisquelques années. On peut notamment pointer<strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> situations <strong>de</strong> polyhandicaps,l’amplification <strong>de</strong>s problèmes<strong>psychiatriques</strong>, l’abandon plus fréquent <strong>de</strong>sfamilles, une augmentation <strong>de</strong>s enfants quine suivent plus l’enseignement ordinaire,un accroissement <strong>de</strong> situations complexesissues du secteur <strong>de</strong> l’Ai<strong>de</strong> à la Jeunesse,<strong>et</strong>c. L’investigation s’est portée sur l’origine<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s, puis sur leur parcours,souvent semé d’embûches.… ses difficultésParmi les principaux obstacles, on recensele manque <strong>de</strong> places disponibles, les listesd’attente subséquentes <strong>et</strong> les lacunesau niveau <strong>de</strong> la répartition géographique.Certains profils posent particulièrement problème: en cas <strong>de</strong> cumul <strong>de</strong>s problématiquespar exemple, ou <strong>de</strong> troubles pédo<strong>psychiatriques</strong>avérés. Parallèlement, certaines exigencesinstitutionnelles sont parfois difficilesà rencontrer : que se passe-t-il, par exemple,quand une famille n’a pas la disponibilité oules moyens d’assurer le relais le week-end<strong>et</strong> les vacances, quand un jeune ou sonentourage n’adhère pas au proj<strong>et</strong>, quandles déplacements sont conséquents ? Enfin,d’autres difficultés sont encore évoquées,comme la sélection <strong>de</strong>s situations par les institutions(effectuée notamment pour maintenirl’équilibre du groupe), les parents qu’il fautconvaincre <strong>de</strong> l’intérêt <strong>de</strong> l’orientation établie,la prise en compte <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong> logopédie<strong>et</strong> <strong>de</strong> psychomotricité, les intervenants qu’ilfaut trouver (dans certaines régions) <strong>et</strong> lessituations urgentes, entre autres.… <strong>et</strong> ses impassesEnfin, nous avons répertorié les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>squi sont orientées vers <strong>de</strong>s services<strong>de</strong> l’AWIPH sans qu’une réponse n’ait puêtre apportée dans ce cadre. La question<strong>de</strong>s autres relais possibles s’est alors posée.Il en ressort que, malgré les efforts <strong>de</strong>chacun, c’est la disponibilité <strong>de</strong> places quisemble primer sur la réelle adéquation <strong>de</strong>la prise en charge <strong>et</strong> nombre d’enfants ser<strong>et</strong>rouvent bien souvent avec une prise encharge inappropriée à leur situation voire sanssolution du tout. L’orientation <strong>de</strong>s mineurs endifficulté dépasse donc largement le cadre<strong>de</strong> l’AWIPH puisque <strong>de</strong>s relais sont trouvés,pour autant qu’ils le soient, dans TOUS lessecteurs liés à l’enfance.Si la restructurationse poursuivait…C<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> pointe également les risques liésà la poursuite du mouvement <strong>de</strong> restructurationdans le secteur AWIPH qui risque, sil’on y prend gar<strong>de</strong>, d’accentuer encore cesdifficultés. Ainsi, trois menaces planent suiteà la transformation <strong>de</strong>s SAJJ : la disparitiondu travail thérapeutique particulier qui y estmené <strong>et</strong> qui ne pas sera remplacé ; le risque<strong>de</strong> déscolarisation lié à l’impossibilité dorénavant<strong>de</strong> soutenir le jeune dans sa scolarité <strong>et</strong>une exclusion <strong>de</strong> certains enfants nécessitant<strong>de</strong>s soins. Pour les SRJ, les témoignagesfont ressortir le risque <strong>de</strong> sélection <strong>de</strong>s problématiques; la crainte <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir accepter<strong>de</strong>s cas trop lourds ; l’obligation <strong>de</strong> placementsloin du domicile ; la peur d’absence <strong>de</strong>post-cure après passage en pédopsychiatrie.A cela s’ajoutent encore d’autres pierresd’achoppement qui ren<strong>de</strong>nt le travail <strong>de</strong> plusen plus compliqué dans le secteur comme, ladiminution <strong>de</strong> l’équipe médicale en SRJ.En conclusionLa recherche se clôture par l’avis <strong>de</strong>s professionnelssur les restructurations dans lesecteur <strong>de</strong> l’AWIPH, avec ses apports positifs<strong>et</strong> négatifs <strong>et</strong> propose <strong>de</strong>s pistes concrètesà creuser. Parmi elles, citons : laisserla possibilité <strong>de</strong> combiner plusieurs typesd’ai<strong>de</strong>s tous secteurs confondus ; valoriserle travail <strong>de</strong> prévention ; repenser le travailavec la famille ; passer le relais en douceur; prendre ses responsabilités ; travailler avec<strong>de</strong>s listes d’attente ; tenir compte <strong>de</strong>s enfantsmomentanément déscolarisés ; miser sur lapolyvalence <strong>et</strong> la flexibilité <strong>de</strong>s services.In fine, la conclusion générale n’est pas nouvellemais les faits montrent qu’elle n’est pasencore vraiment assimilée. C<strong>et</strong>te analyse <strong>de</strong>la situation <strong>de</strong>s mineurs en difficulté confirmeque toute restructuration -voire, plus loin,toute offre <strong>de</strong> service - ne peut s’articulerqu’autour <strong>de</strong> la question <strong>de</strong>s besoins, entenant compte avant tout <strong>de</strong> l’intérêt dubénéficiaire <strong>et</strong> <strong>de</strong>s ressources <strong>de</strong>s autresservices existants, quel que soit leur pouvoir<strong>de</strong> tutelle. SAJJ : Service d’Accueil <strong>de</strong> Jour pourJeunesSRJ : Service Rési<strong>de</strong>ntiel pour Jeunes(anciennement IMP – <strong>Institut</strong> médicopédagogique)SAI : Service d’Ai<strong>de</strong> à l’IntégrationPour en savoir plus : rapport <strong>et</strong> synthèsedisponibles sur www.iwsm.beConfluences n°11 septembre 2005 9
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