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Marie France Novembre

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aurait un résultat : il est là ! Et puis il<br />

y a un bon esprit entre coopérateurs,<br />

c’est agréable d’y venir ». L’envie de<br />

bien manger et de retrouver une alimentation<br />

saine n’explique pas tout.<br />

Faire ses courses autrement<br />

« On construit un autre rapport à<br />

la consommation, on veut faire autrement,<br />

ensemble et dans la bonne<br />

humeur », résume Béatrice, une retraitée<br />

de 66 ans, membre de La<br />

Louve. En cumulant les casquettes<br />

de clients, de consommateurs, de copropriétaires<br />

et d’actionnaires, les<br />

membres de ces coopératives expérimentent<br />

d’autres réflexes de consommation,<br />

occasionnant des scènes assez surréalistes.<br />

Quand la file d’attente à la caisse s’étire, personne<br />

ne songe à râler. Au contraire : les membres en profitent<br />

pour discuter entre eux en se partageant des<br />

recettes ! Et quand il faut prêter main-forte pour<br />

peindre les murs des locaux ou monter des étagères,<br />

les mains des volontaires se lèvent par dizaine.<br />

« Faire ses courses n’est plus une corvée, c’est devenu<br />

un plaisir ! On ne consomme plus pour enrichir<br />

de grosses centrales d’achats, on n’est plus accueilli<br />

par des employés payés au ras des pâquerettes.<br />

Tous les bénéfices sont réinjectés dans la coopérative.<br />

Adhérer ici, c’est engager une autre relation<br />

au commerce et aux choses. Rencontrer les producteurs<br />

quand ils viennent nous livrer, cela donne<br />

UNE ENVIE PARTAGÉE DE BIEN MANGER<br />

Les Français sont de plus en<br />

plus critiques sur le contenu de<br />

leur assiette. Mais contrairement<br />

à l’Allemagne où le réflexe de<br />

la consommation bio répond à<br />

une≈inquiétude environnementale,<br />

en <strong>France</strong>, elle est d’abord le<br />

reflet d’une inquiétude sanitaire.<br />

Selon une analyse du Conseil<br />

économique et social et<br />

environnemental (Cese)*, « la grande<br />

distribution en hyper ou supermarché<br />

occupe plus des deux tiers du<br />

volume de la consommation des<br />

ménages, mais la tendance est<br />

à l’augmentation du nombre de<br />

circuits fréquentés ». Aujourd’hui,<br />

24 % des consommateurs déclarent<br />

en fréquenter six ou plus. De<br />

quoi expliquer, en partie, le boom<br />

des supermarchés coopératifs<br />

et collaboratifs.<br />

* Les circuits de distribution des produits<br />

alimentaires, d’Albert Ritzenthaler (mai 2016).<br />

de la valeur à nos produits, on ne les regarde plus<br />

de la même manière. Et, en plus, on rencontre plein<br />

de gens du quartier ! », explique-t-on à La Cagette,<br />

à Montpellier, qui a profité de l’été pour terminer<br />

les travaux de son futur supermarché de 400 m 2 ,<br />

proche du centre-ville. « Et nous avons presque tout<br />

fait nous-même ! De l’électricien à l’architecte, nous<br />

avons la chance de posséder presque tous les corps<br />

de métiers au sein de notre collectif ! ».<br />

Collectivité, convivialité, transparence<br />

Mais surtout, toutes ces expériences alternatives<br />

ont ceci de commun qu’elles débordent largement<br />

le cadre du supermarché : de Facebook aux commissions<br />

de convivialité qui organisent régulièrement<br />

pique-nique, cours de cuisine et soirée à<br />

thème, l’expérience peut se prolonger bien au-delà<br />

des trois heures de bénévolat mensuel. « Ce genre<br />

d’initiative permet l’existence de nouvelles formes de<br />

communautés, là où les politiques, les syndicats et<br />

l’église n’arrivent plus à rassembler. En consacrant<br />

trois heures de leur temps à la vie du supermarché,<br />

les membres de ces coopératives partagent des valeurs<br />

communes et adhèrent aux mêmes principes »,<br />

reconnaît Pascale Hébel. Certains critiquent le côté<br />

élitiste de la chose. « L’angoisse alimentaire est une<br />

peur concentrée essentiellement chez les cadres. Les<br />

plus modestes et les plus jeunes ne considèrent pas<br />

ces soucis-là comme prioritaires », confirme Pascale<br />

Hébel. Des étudiants en fin de cursus dans le domaine<br />

de l’économie sociale et solidaire à Montpellier au<br />

réalisateur américain installé à Paris, les porteurs de<br />

tous ces projets affichent ainsi des profils d’urbains<br />

à fort capital culturel, en bref, des bobos. L’erreur<br />

serait de rester dans un entre-soi. Pour reproduire<br />

le modèle de la Park Slope Food de New York et<br />

MÜGLUCK/LASUITE<br />

OCTOBRE 2017 60 mariefrance.fr

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