13.09.2017 Views

Elle à Table

  • No tags were found...

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

DOSSIER VINS G. MarGeon tire le vin au clair<br />

Samuel de Montgeron,<br />

aventurier de la vigne<br />

et directeur général de<br />

la maison de négoce<br />

Les Grandes Serres <strong>à</strong><br />

Châteauneuf-du-Pape,<br />

assume un partenariat<br />

avec les coopérateurs<br />

de Cairanne.<br />

Quand le raisin devient un trait<br />

d’union entre son terroir<br />

d’extraction et le dégustateur,<br />

son jus perd en bouquet<br />

ce qu’il gagne en architecture,<br />

en charpente<br />

criptible qui lui confère son potentiel de garde. Le<br />

confort est alors absolu, mais on ne sait plus où on<br />

est. Difficile de distinguer <strong>à</strong> l’aveugle une syrah des<br />

Côtes du Rhône, un cabernet de Bordeaux ou un<br />

nebbiolo de Barolo, s’ils sont menés conformément<br />

<strong>à</strong> l’agriculture biologique.<br />

« Sommes-nous prêts ? »<br />

Gérard Margeon croit que les grands vins <strong>à</strong> venir ne<br />

se signaleront plus par leur goût. Cette délicieuse<br />

exubérance qui distingue ceux d’aujourd’hui est très<br />

éloignée de la sensation extrêmement sereine, apaisante<br />

que le sommelier constate par ailleurs depuis<br />

quelque temps. C’est comme s’il existait fondamentalement<br />

des vins « électriques » et des vins « reposants<br />

». Les premiers, tenaces, collants, s’agglutinent<br />

dans la gorge, tandis que les autres glissent tout seul<br />

et dégoulinent <strong>à</strong> travers tout le corps, jusqu’aux orteils.<br />

Ils communiquent une vibration dénuée de saveurs<br />

lisibles, ou de ce nez un peu scolaire dans lequel on<br />

aime tellement retrouver la corbeille de rose et le<br />

panier de cerises. « Mais je le dis encore une fois,<br />

sommes-nous prêts ? Comment envisager un accord<br />

de table avec des vins qui s’expriment en résonances,<br />

ou par secousses ? Je suis pour les trajectoires parallèles.<br />

Pour que chaque expérience, verre et assiette,<br />

vive sa vie (en veillant toutefois <strong>à</strong> ne pas tomber dans<br />

de grossières mésalliances), et que les émotions s’additionnent.<br />

Hélas, j’ai l’impression que la sommellerie<br />

actuelle est encore arrimée <strong>à</strong> un modèle de dégustation<br />

dans lequel les vins qui ressortent sont ceux<br />

qui mettent le pied dans la porte, et s’imposent par<br />

leur violence gustative. On vend des fleurs, du fruit,<br />

un bel habillage verbeux qui se payent de mots certes<br />

poétiques, mais indéniablement subjectifs, et inutilement<br />

intimidants. Il faut oublier cette manie de remuer<br />

trente-cinq fois son vin dans le verre, pour faire sortir<br />

un nez flatteur en bousculant l’équilibre de la<br />

bouche. C’est pourtant cette dernière qui compte et<br />

qu’il est nécessaire de se réapproprier avec sensibilité. »<br />

Dans leur façon de travailler, les vignerons interviennent<br />

de moins en moins, accompagnent de plus

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!