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VULGARISATION SCIENTIFIQUE - Colloque Sciences médias et ...

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définition purement littéraire qui aurait impliqué la découverte d'une sorte de<br />

grammaire de genre dont la fonction aurait été de lui assurer une certaine<br />

vraisemblance. Ce que nous avons découvert par contre, c'est l'existence d'un style dont<br />

les traits essentiels consistaient d'une part, dans la présence répétitive de la<br />

terminologie scientifique <strong>et</strong> des chiffres qui atteste la référence globale du discours à la<br />

science, dans son aspect aphoristique <strong>et</strong> emphatique attesté par la fréquence des figures<br />

que Fontanier appelle paradoxisme <strong>et</strong> hyperbole. Ces deux composants stylistiques<br />

démontrent suffisamment que le discours de la vulgarisation est entièrement tramé par<br />

une problématique de la vérité. Vérité scientifique seulement, pourra-t-on dire. Mais, y<br />

en a-t-il une autre ?<br />

Ce chapitre-ci a tenté de montrer comment l'opération vulgarisante s'effectuait dans<br />

l'articulation de deux langages : celui de la science <strong>et</strong> celui du sens commun, <strong>et</strong><br />

maintenait leur hétérogénéité en affirmant la distance qui les sépare <strong>et</strong> fondant ainsi la<br />

pertinence des oppositions scientifique/non-scientifique, savoir/non-savoir, suj<strong>et</strong> de<br />

vérité/obj<strong>et</strong> (d'amour 185 ).<br />

Notre recours à la psychanalyse n'est donc pas suscité par une sorte de référence<br />

implicite au proj<strong>et</strong> de Bachelard dans La formation de l'esprit scientifique, mais parce que<br />

la vulgarisation est le lieu où s'articule un dialogue social (cf. les Entr<strong>et</strong>iens de Fontenelle<br />

avec Madame de Tencin ou de Voltaire avec la marquise du Châtel<strong>et</strong>) qui a la vérité<br />

pour cause <strong>et</strong> l'amour pour prétexte. Ce dialogue stabilise les statuts de ceux qu'il<br />

implique : le savant <strong>et</strong> le profane, l'homme de science <strong>et</strong> l’ignorant ; statuts qui restent<br />

cependant profondément ambigus car d'une part, le savant ne peut effectivement pas<br />

prendre le pouvoir au nom d'un discours qui n'a de vérité que parce qu'il s'en exclut en<br />

tant que suj<strong>et</strong>, d'autre part, le profane qui, même s'il subit déjà les eff<strong>et</strong>s de ce dialogue,<br />

ne semble pas encore disposé à en entériner consciemment l'existence <strong>et</strong> oppose aux<br />

velléités humanistes des vulgarisateurs, une saine inertie. 186<br />

En outre, il semble que les problèmes que nous avons abordés dans ce chapitre se<br />

posent également à l'intérieur même de la psychanalyse. C'est du moins l'impression<br />

185 Nous reproduisons en annexe X deux tableaux statistiques produit par Davis (58 : 180-181) au cours de<br />

son enquête aux Etats-Unis (supra : 80 <strong>et</strong> 104), qui montrent l'ampleur de l'évaluation positive de la science<br />

malgré l'existence de "la bombe". Au suj<strong>et</strong> supposé savoir absolu de la science vulgarisée à tous les niveaux<br />

de la hiérarchie sociale — <strong>et</strong> qui devient la Société, l'Humanité, Dieu — s'oppose, à l'intérieur d'un dialogue<br />

bien connu de la religion, la somme des individus-obj<strong>et</strong>s d'amour que ce suj<strong>et</strong> doit combler de satisfaction<br />

technico-culturelle, un jour. Comme le disait Krafft (03 : 8) : "Avec cela, Dame Science n'est pas du tout<br />

morose, je vous prie de croire ; elle n'engendre pas la mélancolie, elle donne la paix <strong>et</strong> le bonheur."<br />

186 Cf. Fourastié (66 : 36) qui, en bon apologue positiviste de la science, s'émeut de c<strong>et</strong> état de fait : "La<br />

difficulté, l'impossibilité d'accès à la science engendre un sentiment de frustration, d'exclusion, qui dégénère<br />

aisément en méfiance, même en hostilité, à l'égard des spécialistes, techniciens, technologues <strong>et</strong><br />

technocrates..." L'auteur adm<strong>et</strong> cependant qu'il soit "normal que les hommes éprouvent de la réticence à<br />

voir d'autres hommes régler les choses qu'ils ont à coeur, en fonction de données <strong>et</strong> de principes qu'ils ne<br />

connaissent pas <strong>et</strong> ne peuvent pas connaître."<br />

(À noter l'ambiguïté du ne peuvent pas !)<br />

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