Faux-fuyants et vraies fuites Gilles Josse 1/358

Faux-fuyants et vraies fuites Gilles Josse
Je t’aime fort !
Lucie »
Je déjeunai distraitement et sans grand appétit, reprenant
un deuxième bol de café pour me remettre les idées en place.
Ainsi, Lucie avait deviné mon embarras ! Décidément, tout
était comme d’habitude ; on ne pouvait rien cacher à une
femme, et c’est bien ce qui m’énervait chez elles. C’est peut-
être bien pour cette raison que mes amours passées s’étaient
révélées si fugaces, car je ne supportais pas que l’on devine
mes pensées et mes sentiments à demi-mots. Je trouvais cela
intrusif, et puis aussi un rien injuste, puisque je ne possédais
pas moi-même cette capacité d'intuition ou d’empathie,
appelez-ça comme vous voulez, qui confinait parfois à la
télépathie pure et simple. C’était Nordine l’ordinosaure qui
suppléait à ce handicap, en me renseignant sur le passé et les
habitudes des gens que je côtoyais. Je lui trouvais ce grand
mérite d’être absolument incorruptible et impartial.
Je tournais et retournais cette dernière phrase de Lucie ;
nous en reparlerons ce soir. Quelle horreur ! Comment allais-
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