Pour - Revue des sciences sociales

éduites à une cause particulière. Parmi les
facteurs généralement retenus dans l'interprétation
de cette évolution - certains disent
ici mutation pour mieux en souligner la portée;
l'urbanisation, la sécularisation, l'individualisation,
l'émancipation de la femme,
la modernisation' 101 . Ces multiples processus,
s'imbriquant les uns les autres de
manière complexe, ont, chacun à des degrés
divers, participé à l'émergence de nouvelles
(dans le sens de légitimes, banalisées et
socialement acceptées) configurations familiales
ainsi qu'à l'évolution des relations
homme/femme. Avant de nous intéresser à
l'un de ces processus en particulier, celui de
l'individualisation, nous esquisserons les
grandes lignes de la famille moderne et
postmoderne' 111 .
Depuis maintenant un peu plus d'une
vingtaine d'années la famille dite moderne,
dont l'évolution a très précisément été retracée
par E. Shorter' 121 , emprunte des chemins
nouveaux. Ainsi qualifiée depuis la fin du
XVIII e , la famille est aujourd'hui, pour
reprendre le terme de cet auteur, postmodeme,
épithète controversée mais courante
pour désigner la famille contemporaine. Ce
changement de qualificatif va de pair avec
celui survenu dans la cellule familiale
depuis les années 60/70, période de changement
dans les mentalités et dans les pratiques
familiales (distanciation par rapport
aux valeurs familiales et aux contraintes traditionnelles,
privatisation de la famille, distribution
plus équilibrée des rôles, fragilisation
de la relation, etc ...). Comprendre en
quoi les années 60/70 ont été celles d'un
changement profond dans les comportements
et les pratiques familiales (réorganisation
de la vie privée) suppose que nous
évoquions la période d'avant la rupture,
c'est-à-dire les années 50/60 qui constituent
un chapitre important dans l'histoire contemporaine
de la famille ; la famille nucléaire,
forme familiale hégémonique, occupait
alors le devant de la scène. L'émergence de
nouvelles valeurs (aspiration à une ascension
sociale individuelle, consommation,
repli domestique), conséquences de la production
de masse, de l'augmentation du
niveau de vie, de l'expérience de la guerre,
avait été favorable à instituer le modèle de
la famille nucléaire comme forme de vie
dominante. Pendant cette période qualifiée
de triomphalisme familia} 1^ ou encore de
golden age of marrage' 141 , le mariage était
stable, les enfants légitimes, la répartition
des rôles et des tâches traditionnelle - c'està-dire
distribuée selon le sexe' 15 '. Au cours
de cette décennie, « sorte de parenthèse dans
le mouvement des indices »