Pour - Revue des sciences sociales
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voque. Si le roman échappe à toute interprétation,<br />
autre que plurielle, <strong>des</strong> passages peuvent<br />
et ont été «décontextualisés » à souhait.<br />
S'arracher par nécessité, par accident ou<br />
par plaisir à un espace auquel on s'est habitué,<br />
à la chaleur familière pour un autre, est<br />
un fait qui soumet toute personne à diverses<br />
pulsions, a de multiples brûlures d'interrogations<br />
et à la manifestation de plusieurs<br />
états d'âmes : le désir de retour, d'évasion,<br />
d'oubli, de souvenirs rythme la vie quotidienne<br />
de tout migrant.<br />
C'est en quelque sorte à cette situation<br />
que sont confrontés les deux personnages<br />
Saladin Chamcha et Gibreel Farishta, chacun<br />
traverse à sa manière l'épreuve du déracinement.<br />
Le premier finira par se réconcilier<br />
avec lui-même, par contre le deuxième<br />
deviendra la proie d'une extrême déchirure<br />
telle qu'il l'entreinera au suicide. De surcroît,<br />
leur déracinement est d'un genre particulier.<br />
Il est non seulement lié à un espace<br />
mais à une lucidité comme l'a bien relevé<br />
Claude Lefort : «... il n'y a déracinement<br />
que pour celui qui dans sa chair garde<br />
mémoire de lui-même, dont le désir de<br />
demeurer dans la proximité première de<br />
tout ce qui l'entoure est toujours contredit<br />
par un mouvement qu'il ne subit pas seulement<br />
mais naît aussi de lui»