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Haïti: les chemins de la transition - Small Arms Survey

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Une partie du marché c<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stin <strong>de</strong>s armes aurait opéré directement <strong>de</strong>puis<br />

<strong>les</strong> États-Unis, <strong>les</strong> livraisons entrant en Haïti par <strong>la</strong> République dominicaine.<br />

Avant le retour au pouvoir du prési<strong>de</strong>nt Aristi<strong>de</strong>, en 1994, <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s quantités<br />

d’armes auraient été transférées <strong>de</strong>s États-Unis aux FRAPH. Entre cinq et dix<br />

mille artic<strong>les</strong> d’armement <strong>de</strong>stinés à <strong>la</strong> PNH auraient été reçus entre 1993 et<br />

1994 malgré <strong>les</strong> embargos en p<strong>la</strong>ce à l’époque (Nairn 1996). En novembre 1993,<br />

une information <strong>de</strong> <strong>la</strong> DIA observait que <strong>les</strong> paramilitaires <strong>de</strong>s FRAPH avaient<br />

nettement accru leurs capacités, leurs hommes “ayant l’impression <strong>de</strong> pouvoir<br />

que confère <strong>la</strong> faculté d’arpenter <strong>les</strong> rues d’une ville en arborant une arme automatique<br />

en toute impunité” (Nairn 1996: 14). Entre 2000 et 2004, <strong>de</strong>s groupes<br />

d’opposition auraient également reçu <strong>de</strong>s armes <strong>de</strong>s États-Unis par le biais<br />

d’exportations licites à <strong>de</strong>s tiers 53 .<br />

Des éléments aux États-Unis auraient aussi fourni à divers partis anti-Lava<strong>la</strong>s,<br />

<strong>de</strong>puis <strong>la</strong> réélection du prési<strong>de</strong>nt Aristi<strong>de</strong> en 2001 54 , <strong>de</strong>s soutiens combinant<br />

assistance financière et militaire c<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stine. Selon <strong>de</strong> fréquentes rumeurs,<br />

plusieurs centaines <strong>de</strong> Bérets verts ont participé à <strong>la</strong> formation d’un certain<br />

nombre d’anciens membres <strong>de</strong>s FADH dirigés par Guy Philippe en République<br />

dominicaine 55 . Du matériel et <strong>de</strong>s fournitures militaires auraient été transférés<br />

par <strong>la</strong> police et <strong>les</strong> autorités militaires américaines à <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’ancienne<br />

armée haïtienne stationnée en République dominicaine 56 . Qui plus est, au milieu<br />

<strong>de</strong> l’année 2003, un certain nombre <strong>de</strong> citoyens <strong>de</strong>s États-Unis ont également<br />

été accusés par <strong>les</strong> autorités haïtiennes d’expéditions illicites d’uniformes militaires,<br />

d’armes d’assaut, <strong>de</strong> munitions et <strong>de</strong> <strong>la</strong>nce-grena<strong>de</strong>s—sous le couvert<br />

d’organisations non gouvernementa<strong>les</strong> protestantes—mais leurs liens avec le<br />

gouvernement <strong>de</strong>s États-Unis n’ont pas été prouvés 57 .<br />

En partie du fait <strong>de</strong> diverses sanctions frappant <strong>les</strong> ventes d’armes et <strong>de</strong> secousses<br />

dans <strong>les</strong> approvisionnements licites en armes légères et <strong>de</strong> petit calibre,<br />

<strong>les</strong> gouvernements haïtiens successifs ont exploré le marché noir. Comme on<br />

pouvait s’y attendre, <strong>les</strong> embargos <strong>les</strong> ont poussés à <strong>de</strong>s acquisitions c<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stines<br />

et illicites. S’appuyant sur un certain nombre d’intermédiaires connus,<br />

le gouvernement a acquis <strong>de</strong>s armes <strong>de</strong> divers pays—dont l’Afrique du Sud 58<br />

(tableau 2). Dans l’incapacité <strong>de</strong> se procurer <strong>de</strong>s armes <strong>de</strong> façon licite, le prési<strong>de</strong>nt<br />

et l’ancien ministre <strong>de</strong> <strong>la</strong> Justice du gouvernement <strong>de</strong> <strong>transition</strong> ont<br />

également prévenu à plusieurs reprises que l’Administration s’efforcerait <strong>de</strong><br />

trouver <strong>de</strong>s armes sur le marché noir si elle ne pouvait en obtenir par <strong>les</strong> réseaux<br />

licites 59 . Des médias ont indiqué qu’une transaction <strong>de</strong> ce type avait déjà été<br />

tentée début 2005 60 . De plus amp<strong>les</strong> enquêtes ont révélé qu’en mai 2004, un<br />

certain nombre <strong>de</strong> notab<strong>les</strong> haïtiens et <strong>de</strong> citoyens américains avaient négocié<br />

<strong>les</strong> détails <strong>de</strong> livraisons d’armes à Haïti 61 . Un courtier reconnu aurait reçu un<br />

chèque <strong>de</strong> 1 million <strong>de</strong> dol<strong>la</strong>rs pour acquérir <strong>de</strong>s armes à feu en décembre<br />

2004. Ces efforts menés par le gouvernement <strong>de</strong> <strong>transition</strong> pour se procurer<br />

illégalement <strong>de</strong>s armes semblent s’être poursuivis aussi récemment qu’en mai<br />

2005 62 .<br />

Le marché noir persiste, et il existe entre Haïti et ses voisins <strong>de</strong>s Caraïbes un<br />

“commerce <strong>de</strong> fourmis” <strong>de</strong>s armes—particulièrement <strong>de</strong>s pistolets et <strong>de</strong>s revolvers.<br />

Les armes illicites proviennent <strong>de</strong>puis le début <strong>de</strong>s années 90 <strong>de</strong> Jamaïque,<br />

<strong>de</strong> Colombie, du Brésil et <strong>de</strong> <strong>la</strong> République dominicaine, mais aussi d’Amérique<br />

centrale (Richardson 1996; Nairn 1996; Mustafa 2004; <strong>Small</strong> <strong>Arms</strong> <strong>Survey</strong> 2005) 63 .<br />

La principale source <strong>de</strong> pistolets, <strong>de</strong> revolvers et d’armes automatiques illicites<br />

<strong>de</strong>meure toutefois <strong>les</strong> États-Unis, et surtout <strong>la</strong> Flori<strong>de</strong>. Selon l’ATF, un quart<br />

<strong>de</strong>s armes au moins passées en contreban<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis Miami, Pompano Beach<br />

et Fort Lau<strong>de</strong>rdale au cours <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières années étaient <strong>de</strong>stinées à<br />

Haïti. Beaucoup <strong>de</strong> ces armes sont entrées par <strong>la</strong> péninsule <strong>de</strong> <strong>la</strong> Guajira, Cap<br />

Haïtien, Miragoane, Jacmel et le port <strong>de</strong>s Gonaïves 64 . Les membres <strong>de</strong>s élites du<br />

pays introduisent régulièrement en contreban<strong>de</strong> <strong>de</strong>s pistolets et <strong>de</strong>s revolvers<br />

<strong>de</strong>s États-Unis 65 . Les armes—<strong>de</strong>s pistolets .45 et <strong>de</strong>s MAK-90 66 —ont pu être<br />

ingénieusement cachées dans <strong>de</strong>s boîtes <strong>de</strong> tomates (1996), <strong>de</strong>s bacs à <strong>la</strong>ngoustes<br />

(1998), <strong>de</strong>s din<strong>de</strong>s surgelées (2001) ou <strong>de</strong>s conteneurs <strong>de</strong> produits en vrac (texti<strong>les</strong><br />

ou vêtements usagés, par exemple).<br />

Les transferts illicites d’armes se poursuivront tant que l’instabilité durera en<br />

Haïti. Le goût prononcé <strong>de</strong> cette société pour l’autodéfense et <strong>les</strong> comportements<br />

prédateurs nourrit indéniablement <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. De plus, le fait que le pays<br />

accueille aussi le transbor<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> 8 % à 10 % <strong>de</strong> <strong>la</strong> cocaïne colombienne à<br />

<strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s États-Unis fournit <strong>les</strong> ressources nécessaires à l’acquisition <strong>de</strong><br />

nouvel<strong>les</strong> armes 67 . Les transferts illicites et le trafic sont facilités par <strong>de</strong>s frontières<br />

poreuses et mal gardées ainsi que <strong>de</strong>s services douaniers corrompus 68 .<br />

Quelque 500 officiers <strong>de</strong> <strong>la</strong> police et <strong>de</strong> l’armée haïtiennes revenant <strong>de</strong> République<br />

dominicaine et <strong>de</strong> <strong>la</strong> Jamaïque après le départ du prési<strong>de</strong>nt Aristi<strong>de</strong>, au<br />

14 <strong>Small</strong> <strong>Arms</strong> <strong>Survey</strong> Occasional Paper 14 Robert Muggah Haïti: <strong>les</strong> <strong>chemins</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>transition</strong> 15

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