<strong>Les</strong> <strong>mares</strong> <strong>temporaires</strong> méditerranéennesImpact de la faune domestique et cynégétique<strong>Les</strong> herbivores sauvages et domestiques ont des effets doubles etantagonistes : d’une part, ils peuvent compromettre la survie, laproduction et la reproduction des plantes et, d’autre part, ils réduisentla concurrence et créent des niches favorables à la régénérationdes espèces peu compétitives (voir plus haut, ce chapitre,§ “Envahissement par les ligneux”). Des effets négatifs du pâturageprintanier sur la floraison et la fructification de certaines espècesdes <strong>mares</strong> <strong>temporaires</strong> (Ranunculus sardous, Orchis laxiflora, Agrostispourretii, etc.) ont, par exemple, été constatés en Corse dans ladépression de Padulu 291 . De tels impacts négatifs sont classiquesdans les zones surpâturées du Maghreb. Au Maroc, le surpâturageconduit non seulement à une dégradation du couvert végétal, maisil est aussi supposé responsable de la disparition d’espèces rares 313 .Au nord de la Méditerranée, le pâturage contribue à l’inverse aumaintien de certaines espèces menacées : c’est notamment le casdu Pélobate cultripède, amphibien très localisé dans le sud de laFrance, qui est étroitement lié à l’action des troupeaux, mais aussi duPélodyte et du Crapaud calamite. La germination de la Germandréearistée est, elle aussi, étroitement liée au passage du bétail (Chapitre5d, Encadré 49).L’augmentation des populations de sangliers (Sus scrofa) s’accompagned’une pression accrue sur le milieu et, en particulier, sur leszones humides 5 . Maillard 247 s’en inquiète dans la Réserve Naturellede Roque-Haute, où les sédiments des <strong>mares</strong> sont occasionnellementretournés par les sangliers, peut-être à la recherche de bulbesd’isoètes (Rhazi, com. pers.).Toutefois, ces perturbations créent des sites favorables pour la germinationdes plantes et jouent probablement un rôle positif si leurfréquence n’est pas trop grande. <strong>Les</strong> sangliers représentent enrevanche une menace pour les amphibiens en bouleversant leursrefuges autour des <strong>mares</strong>, comme cela a été observé à Valliguières,par exemple 240 (Chapitre 3f, Encadré 26).Grillas P.Au Maroc, le surpâturage des dayas constitue une menace pour la flore (Mamora, Maroc)70
5. Méthodes de gestionet restaurationa. Du diagnosticau plan de gestionPerennou C., P. Gauthier & P. GrillasLe diagnostic, une nécessité avant toute gestionQu’est-ce que la gestion ?“Gérer un milieu naturel, c’est agir (ou ne pas agir) pour conserver,voire augmenter, sa valeur patrimoniale ; cela peut consister à maintenirdes activités traditionnelles, utiliser des techniques modernes ousimplement surveiller une évolution naturelle, afin d’entretenir oude modifier un équilibre écologique, en fonction d’objectifs précisde conservation” 331 .Pourquoi une gestion des <strong>mares</strong> <strong>temporaires</strong> méditerranéenneest-elle nécessaire ?Diverses activités humaines et processus naturels agissent directementou indirectement sur les <strong>mares</strong> et sont susceptibles de modifierleur fonctionnement et d’affecter les espèces qu’elles hébergent(Chapitre 4). Une gestion active peut être nécessaire pour compenserou corriger les processus ayant un impact négatif sur lefonctionnement ou la richesse biologique des <strong>mares</strong>. Enfin, la restaurationdes sites est nécessaire lorsque les processus de dégradationsont trop avancés.Un cadre : le plan de gestionAvant d’agir (ou ne pas agir) sur les <strong>mares</strong> <strong>temporaires</strong>, une phasepréalable de réflexion et d’organisation des actions de gestion estnécessaire. De plus en plus fréquemment, elle se matérialise par unplan de gestion, outil désormais largement reconnu. Il consiste en :• Une démarche qui vise à élaborer en commun des projets d’actionsutiles à la conservation du site, reconnus et acceptés partoutes les parties impliquées : propriétaires, usagers du site, administrations,associations.• Un document qui finalise le résultat de cette démarche. Le plande gestion ne se résume pas à ce seul document, même approuvéformellement par toutes les parties concernées : il resterait alorsle plus souvent inappliqué par des acteurs locaux ne se sentant pasconcernés, alors que sa raison d’être est de servir quotidiennementà la gestion du site.Encadré 39. <strong>Les</strong> plans de gestion de sites à <strong>mares</strong> <strong>temporaires</strong>en FranceLa Réserve Naturelle Volontaire de la Tour du Valat, suivie de laRéserve Naturelle de Roque-Haute, ont été les deux premierssites de France, riches en <strong>mares</strong> <strong>temporaires</strong>, à se doter d’unplan de gestion, respectivement dans les années 1980 et 1990.Dans le cadre du projet LIFE “Mares Temporaires”, trois des sitesconcernés ont également développé leur plan de gestion :Notre-Dame de l’Agenouillade, Valliguières et Padulu. <strong>Les</strong> TrePadule de Suartone ayant été déclarés Réserve Naturelle en2000, un plan de gestion devrait y être élaboré prochainement.Enfin, nombre de sites 391 figurant sur la liste proposée par laFrance pour intégrer le réseau Natura 2000 ont initié leur Documentd’objectif. Ce document est en cours d’élaboration pour19 sites.Perennou C.Un plan de gestion peut se décliner en de multiples variantes etappellations selon les contextes. En France, les Réserves Naturelles,les terrains du Conservatoire du Littoral ou de conservatoiresrégionaux de sites se dotent de plans de gestion stricto sensu 331 .<strong>Les</strong> Documents d’objectifs pour les sites Natura 2000 de Francesont des plans de gestion où les propriétaires et usagers jouent unrôle important 397 , de même que les Schémas d’Aménagement et deGestion des Eaux (ou SAGE) sont équivalents à des plans de gestionpour de petits bassins versants. La diversité des appellationsne doit toutefois pas occulter la remarquable constance desgrandes étapes logiques de ces plans de gestion, qui correspond àun enchaînement de questionnements (voir plus bas, ce chapitre).Plus largement, en Europe et dans le Bassin méditerranéen, lamême approche méthodologique est également suivie ou préconisée135 . Par la suite la notion de plan de gestion sera utilisée dansun sens très général recouvrant, sauf mention particulière, les différentesformes qu’il peut prendre.Diagnostic et plan de gestionLe diagnostic du site est toujours une phase clé pour établir lespremières hypothèses sur les changements écologiques éventuellementen cours, afin de proposer les mesures de gestion et desuivi à engager pour sauvegarder, réhabiliter ou recréer un milieu.La démarche générale des plans de gestion est présentée ici, appliquéeaux <strong>mares</strong> <strong>temporaires</strong>, en y incluant la phase de diagnostic.Etapes du plan de gestionLa structure des plans de gestion (Tab. 14) correspond à un enchaînementde questions/réponses. Le diagnostic du site correspondaux étapes 1, 2, 3 et 5. <strong>Les</strong> différentes étapes sont présentées cidessous,en insistant sur les aspects spécifiques aux <strong>mares</strong> <strong>temporaires</strong>,les aspects plus génériques pouvant être consultés dansRNF 331 .1. Le contexteLa zone concernée doit être délimitée au préalable, en distinguantune zone centrale (la mare ou le ruisseau) et une zone d’influencecorrespondant à l’espace de fonctionnalité 356 . Il s’agit de “l’espaceproche de la zone humide, ayant une dépendance directe et desliens fonctionnels évidents avec la zone humide, à l’intérieur duquelcertaines activités peuvent avoir une incidence directe, forte etrapide sur le milieu et conditionner sérieusement sa pérennité”.La zone d’influence est délimitée selon des critères techniques :alimentation en eaux souterraines ou superficielles, apports d’élémentspolluants, zone de recharge en sédiments, domaines vitauxdes espèces mobiles, etc. 356 Sa dimension est donc variable enfonction de la taille, du type et de la situation géographique de lamare, des facteurs impliqués et du domaine vital des espèces quel’on souhaite conserver. Elle peut être très vaste, pour certainsparamètres. Par exemple, la qualité et la quantité de l’eau dans les<strong>mares</strong> en zones karstiques (mare de Valliguières) dépendent d’unenappe souterraine régionale ; elles pourront être affectées par dessources de pollution ou de perturbation hydrologique très éloignées.71