<strong>Les</strong> <strong>mares</strong> <strong>temporaires</strong> méditerranéennesLorsque l’on est amené à manipuler les espèces, plusieurs problèmesvont se poser 408 :• légaux : la manipulation des espèces protégées est soumise à lalégislation,• techniques : la reproduction en captivité (ou in vivo) ou la réimplantationin natura sont mal maîtrisées pour la plupart desespèces,• génétiques : les populations sources pour une réimplantationdevront généralement provenir de sites proches, pour limiter lespollutions génétiques et favoriser la valeur adaptative locale. <strong>Les</strong>risques de goulot d’étranglement* (faible diversité génétique liéeaux effectifs réduits) seront, néanmoins, toujours présents.Principales opérations de gestion du milieu dans leszones humides <strong>temporaires</strong>Le choix des opérations de gestion est d’abord déterminé en fonctionde la pertinence vis-à-vis du problème existant et des processusengagés (Tab. 17). Pour chacune de ces opérations, l’évaluation dela faisabilité technique et des coûts associés sont des élémentstrès importants à prendre en compte avant le lancement de l’opération.Des opérations de gestion menées sur les sites du projet LIFE“Mares Temporaires” et sur d’autres sites à <strong>mares</strong> <strong>temporaires</strong> sontprésentées ici, à titre d’exemple. Elle ne sauraient être transféréessans que la démarche complète, depuis l’analyse de l’état initial etdes problèmes de gestion, n’ait été menée à bien. <strong>Les</strong> connaissancessouvent incomplètes ou en partie empiriques ne permettentpas de proposer des modèles généraux de gestion ou derestauration. La mise en place d’une opération de gestion est,avant tout, un choix local en fonction de l’information existante(bibliographie, suivi, comparaison, etc.), de la configuration du siteet des moyens disponibles.La gestion de la sédimentationLe comblement fait partie de la dynamique naturelle des <strong>mares</strong>mais peut être accentué par des perturbations diverses (Chapitre 4,Encadré 44). Il résulte d’une accumulation de minéraux, provenantdu bassin versant et de matières organiques produites sur place ouimportées. <strong>Les</strong> conséquences de la sédimentation sont l’augmentationde l’épaisseur du sédiment et de sa réserve en eau (d’oùdiminution du stress hydrique estival et compétitivité accrue desvivaces), la diminution de la hauteur et de la durée d’inondation(d’où atterrissement*), l’enfouissement des stocks semenciers etl’impossibilité de germination pour les espèces à petites graines,Encadré 44. Gestion post incendie d’une mare temporaire :l’exemple de la mare de Catchéou (Var)Au cours de l’été 2003, le massif et la plaine des Maures ont étéprofondément touchés par des incendies avec 1 960 ha brûlés. <strong>Les</strong>secteurs à <strong>mares</strong> cupulaires dans le massif et à dépressions et ruisseaux<strong>temporaires</strong> dans la plaine se situent dans la zone ravagée.Dans la plaine de Palayson, outre plusieurs ruisseaux <strong>temporaires</strong>,la célèbre mare de Catchéou a été incendiée. Suite à la disparitiondu couvert végétal, une sédimentation accélérée ainsi qu’une forteeutrophisation sont à craindre, en raison de l’érosion du bassinversant (substrat riche en sables). Le feu constitue donc une doublemenace : directe sur les populations (amphibiens, reptiles, etc.) quine peuvent lui échapper et indirecte par l’atterrissement qui peutmodifier le régime hydrologique de la mare, donc perturber indirectementses communautés végétales et animales (réduction dela durée d’inondation). L’enfouissement des semis induit aussi unrisque d’échec à la germination pour certaines plantes.Compte tenu de la très haute valeur patrimoniale de ce site,l’Office National des Forêts a choisi d’intervenir préventivement.Des opérations de génie écologique ont donc été réalisées par l’ONF,en partenariat avec le CEEP. Ces actions, inspirées des techniquesde type Restauration des Terrains en Montagne (RTM), ont étéadaptées à la problématique et à la taille de la mare visant à limiterl’érosion et le dépôt de sédiments dans celle-ci.<strong>Les</strong> travaux de gestion ont constitué en :• la pose de fascines en demi-cercle et sur deux rangées, toutautour de la mare. Ces fascines sont constituées de branches debruyères arborescentes Erica arborea (non brûlées), renforcées surle dessus par des cannes de Provence Arundo donax pour plus derigidité. Des piquets de 10 cm de diamètre permettent de maintenirsolidement ces fascines dont la base est légèrement enterréedans le sol. <strong>Les</strong> fascines ont pour objectif de limiter le comblementde la mare par les colluvions issues du bassin versant, en particulierlors des pluies d’automne, généralement fortes. Elles doivent égalementlimiter l’apport de cendres dans la dépression. Elles agissentcomme des filtres et laissent passer l’eau,• dans les talwegs du bassin versant, une coupe des arbustes brûlésavec exportation de la nécromasse,• l’abattage et l’évacuation des arbres morts carbonisés dans unrayon de 50 m autour de la mare.Un suivi du site est prévu comprenant :• le fonctionnement hydrologique (dates de mise en eau et d’assèchement,hauteurs d’eau),• la mesure de la vitesse de sédimentation au moyen de règlesgraduées situées au fond de la mare,• un suivi de la faune (invertébrés et amphibiens),• un suivi de la flore,• un suivi photographique.Catard A. & L. MarsolAprès incendie, la protection de la mare de Catchéou par des fascinesatténue la dynamique de comblement (avant incendie, voir photo page 10)Marsol L.82
5. Méthodes de gestion et restaurationTableau 17. Choix des opérations de gestion en fonction de la pertinence vis-à-vis du problème existant et des processus engagésProblèmes Processus Objectif Mode de Gestion Remarques (faisabilité…) CoûtComblementAccumulation sédimentaire• réduction de l'hydropériode• enfouissement dessemencesRestaurer un régimehydrologique favorableRemettre les semences ensurface en conditionspropices à la germinationCreusement manuel si petitessurfaces (pelle), mécanique sisurfaces plus élevées(pelleteuse)Détermination préalable duniveau de creusement enfonction du fonctionnementantérieur, des banques desemence, etc.Dépend de ladistanced'exportation dessédimentsRestauration du couvertvégétal du bassin versant,limitation de la fréquentationAccumulation de litièred'origine interne oupériphérique d'où• enfouissement dessemences• eutrophisationSupprimer la litièreRéduire les sources internesou périphériquesLimiter l'accumulationDécapage superficiel (manuel)Contrôle des ligneux et desgrandes hélophytesOpération délicate : risqueélevé d'exportation des stocksemenciers avec la litière et dedommages sur la végétationexistanteFaible si surfacefaibleModification directe durégime hydrologiqueDrainageRestaurer un régimehydrologique favorableObturation des drains, remblaiMise en eau permanente paralimentation directe (tuyau, etc.)Restaurer un régimehydrologique favorableSuppression de l'alimentationModification indirecte durégime hydrologique(interventionssur bassin versant)Détournement des eaux deruissellement, plantations surbassin versant,ponction sur la nappeRestaurer un régimehydrologique favorableRestauration du bassin versant,réglementation des ponctionssur la nappeTrès variableTrès variableMise en eau permanente parmodification du bassin versant(barrage, etc.) ou alimentation dela nappeCompétition/Lumière,EutrophisationProgression des ligneuxOuvrir le milieu, limiter lesapports de matière organiqueDébroussaillement ou coupeavec exportation desbranchages coupés, pâturageProgression des grandeshélophytesLimiter la compétitionLimiter les apports dematière organiqueCoupe ou/et étrépage avecexportation de la matièrecoupée et déracinéePâturageLa cause de la progression doitêtre identifiée (modification durégime hydrologique ?Absence de pâturage ?)L'étrépage présente un risqueélevé d'exportation des stockssemenciers avec le matracinaire et de dommages surla végétation existanteAugmentation de la densité depetites herbacées terrestresou amphibiesLimiter la compétitionFauchage avec exportation duproduit de fauche, pâturageEspèce végétale envahissanteLimiter la compétitionLimiter l'accumulation dematière organiqueArrachage manuel, pâturageInformation, communicationLa durabilité des actionsengagées pour limiterl'envahissement doit êtreévaluéePrédationIntroduction animale (poisson,écrevisses, etc.)Eliminer le prédateurPollution Déversement direct Sensibiliser, réduire lesrisquesDéversement indirectsur bassin versantLimiter les sources depollutionElimination de la faunepiscicole/retour à unehydrologie instableInformation, communicationInformation, communicationauprès du public et descollectivités locales, servicesd'état en charge du respectdes lois anti-pollutionInformation, communication,contrats, etc.L'élimination des écrevissescomme de certains amphibiensenvahissants est très peuprobable car ils ont desrefuges à l'extérieur des <strong>mares</strong>Déblais, décharge Nettoyage Information, communication,etc.Surpâturage,surpiétinementInformation, communication,contrats, etc.Modification de la structure dusubstrat, accélération desprocessus érosifsDétérioration du couvertvégétalLimitation de la reproductionRéduire la charge depâturage, modifier lessaisons de pâturage, etc.Embroussaillement dubassin versantPerturbation de la progressiondes amphibiens en phaseterrestreOuvrir le milieuDébroussaillement ou coupeavec exportation desbranchages coupésPâturageLe débroussaillement doit êtrelimité pour ne pas accroitrel'érosion et maintenir deszones refuges, abris potentielspour les amphibiens83