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Perception(s) numérique(s) - Shin Kim

Master Degree Thesis from ENSCI Publication : March 2016 Author : Shin hyung KIM

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Publication : March 2016
Author : Shin hyung KIM

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137. Des enfants nés avec le<br />

<strong>numérique</strong> qui seront totalement<br />

habitués à la multiplicité des formes de<br />

réalité, analogique et <strong>numérique</strong>.<br />

138. BARON Georges-Louis & BRUIL-<br />

LARD Éric, Technologies de l’information<br />

et de la communication et indigènes<br />

<strong>numérique</strong>s : quelle situation ?, Rubrique<br />

de la revue STICEF, Volume 15,<br />

2008, ISSN : 1764-7223, page consultée<br />

le 29.07.2015, http://sticef.org<br />

Il faut pourtant se garder d’une foi sans limite dans la<br />

capacité des générations futures à explorer pleinement les<br />

capacités du <strong>numérique</strong>. Par exemple, la génération que l’on<br />

a nommée « digital native » 138 n’est pas aussi douée que l’on<br />

peut le penser à première vue. Sa maîtrise des nouvelles<br />

technologies n’est qu’une forme de familiarité avec certaines<br />

fonctions des logiciels, elle n’est que le résultat d’usages<br />

mécaniquement répétés sans compréhension des processus<br />

en cours. Depuis que Marc Prensky, écrivain américain et<br />

chercheur en pédagogie, a utilisé le terme « digital native »<br />

pour la première fois, les individus qu’il désigne font l’objet de<br />

débats dans différents domaines des sciences sociales. George<br />

Baron, spécialiste en pédagogie et professeur à l’université<br />

Paris-Descartes, affirme que « les digital natives sont pour<br />

une bonne part aussi des novices, des digital naïves, des proies<br />

faciles pour les diverses incitations du marché. Leurs utilisations<br />

des technologies sont fréquentes, mais dans un spectre<br />

très limité et avec un degré d’autonomie relatif. » 139 S’il n’est<br />

pas forcément opportun de questionner ici le fossé générationnel<br />

qui sépare la société face aux techniques <strong>numérique</strong>s,<br />

il est primordial de réfléchir à la manière de préparer, former<br />

les futures générations aux défis qui seront les leurs. Si on<br />

ne leur donne pas les outils pour comprendre les processus<br />

de traitement de l’information à l’œuvre derrière les objets<br />

<strong>numérique</strong>s, elles risquent de s’enfermer dans un monde passif<br />

où la performance <strong>numérique</strong> ne sera qu’une coquille vide.<br />

Pour conclure, ce mémoire m’a permis de réaliser à quel<br />

point les pratiques <strong>numérique</strong>s quotidiennes sont une source<br />

d’inspiration et de motivation dans mon travail de designer.<br />

Dans mes réflexions où se croisent la perception humaine et<br />

la technologie <strong>numérique</strong>, j’ai pu m’apercevoir que les sciences<br />

humaines et les sciences exactes partagent les mêmes objectifs<br />

de recherche. La technologie évolue si vite qu’au moment où<br />

j’écris ce dernier paragraphe de conclusion la projection des<br />

scénarios que je croyais « extrêmes », au début de la rédaction,<br />

n’en sont plus. Cette rapidité d’évolution fait preuve de<br />

l’imprévisibilité générale quant au <strong>numérique</strong> et à ce qu’il<br />

peut nous apporter d’ici 2020. La performance technique et<br />

les usages qui en découlent semblent dépasser notre capacité<br />

d’imagination. L’écart entre un espace réel et virtuel se<br />

réduit. Le <strong>numérique</strong> n’est finalement qu’un outil, de plus en<br />

plus accessible, pour réaliser ce qu’on a envie de percevoir.<br />

À travers mes trois hypothèses de la réalité <strong>numérique</strong>, je<br />

spécule sur différents moments d’interaction avec l’objet qui<br />

pourront créer de nouveaux modes de vie. D’une œuvre d’art<br />

<strong>numérique</strong> « authentique » à la transition de « possession »<br />

d’objet vers « l’accès » à celui-ci, jusqu’aux nouvelles règles de<br />

perception dans un environnement entièrement numérisé<br />

: tous ces scénarios potentiels manifestent un avenir où la<br />

réalité <strong>numérique</strong> oublie radicalement l’histoire des objets de<br />

l’ère pré-<strong>numérique</strong>. Je retiens surtout que ces changements<br />

tendent vers une seule direction. En même temps que la<br />

réalité <strong>numérique</strong> prend du terrain, l’expérience de ces objets<br />

se fait de moins en moins palpable et matérielle. Des notions<br />

comme la mémoire, le passé, le hasard ont tendance à être<br />

négligées. Par exemple, un stylet numétique pourra un jour<br />

simuler parfaitement le dessin au pinceau de calligraphie, le<br />

casque de la réalité virtuelle pourra reproduire les déformations<br />

du papier japonais, voir même l’expérience du toucher<br />

liée à la matérialité du support au dessin. Les pinceaux en poil<br />

d’animaux continueront à exister grâce à ceux qui cherchent<br />

à conserver l’histoire de l’objet, mais ils seront rangés dans<br />

les catégories du patrimoine et du luxe. La vraie hybridation<br />

<strong>numérique</strong>-analogique ne serait pas seulement être cette<br />

cohabitation des objets matériels et immatériels mais la<br />

fusion des deux. La réalité analogique qui met en avant la<br />

connaissance des matières, la richesse du travail artisanal, est<br />

de plus en plus isolée de celle du <strong>numérique</strong>. La performance<br />

<strong>numérique</strong> croissante ne permet pas de valoriser le vécu de<br />

chaque objet. Nous n’accordons pas la même valeur aux objets<br />

<strong>numérique</strong>s car nous nous sommes habitués à ce qu’ils soient<br />

temporaires. Nous sommes doués à numériser une tâche ou un<br />

objet analogique, mais nous le sommes moins pour réfléchir<br />

à la transformation des métiers du passé dans cette nouvelle<br />

forme de réalité. La révolution industrielle avait menacé les<br />

traditions d’une façon similaire. En absence du <strong>numérique</strong>,<br />

nos ancêtres ont toujours développé leurs savoir-faire à travers<br />

des échecs, nous ont transmis leurs acquis liés à la conception<br />

des objets. Quel héritage d’un passé « analogique » pourra<br />

porter encore les objets de demain?<br />

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