Perception(s) numérique(s) - Shin Kim

Partie I
4. Quand tout le corps perçoit
37. MERLEAU-PONTY Maurice, Phénoménologie
de la perception, Gallimard,
Paris, 1945.
38. Les êtres humains dont la vision des
couleurs est considérée comme normale
sont capables de percevoir 15000
nuances. (Irem de Grenoble, 2010)
http://www-irem.ujf-grenoble.fr/
39. Il s’agit de la mesure de l’acuité
visuelle, variante selon l’individu : la
capacité à discerner un petit objet
situé le plus loin possible. Une acuité
de 10/10 correspond à la moyenne de
l’acuité de la population générale.
Quand on parle de relation à l’objet dans le numérique, il
est important de s’attarder sur la façon dont le corps dans son
entier entre en relation avec l’objet. Maurice Merleau-Ponty a
établi que le corps est un élément déterminant de la perception,
qu’il est une ouverture perceptive sur le monde. 37 Dans le
domaine du numérique, la relation avec le corps peut se faire
à travers plusieurs types d’interfaces, mais la plus courante est
certainement l’écran des ordinateurs ou des portables avec ses
messages visuels et sonores. Aujourd’hui, de nouvelles formes
de relation peuvent s’établir entre le corps et les contenus
numériques, permettant une expérience plus complète de
l’objet.
a. L’adaptation à notre capacité visuelle
Nous avons vu dans la première partie que la perception
visuelle a toujours été prévalente dans l’histoire de la représentation.
Dans les divers domaines qui expérimentent
l’objet dans le numérique comme la muséographie, le jeu
vidéo ou le e-shopping, les informations essentielles de l’objet
se perçoivent toujours à travers les écrans. Il est en effet plus
facile de représenter la forme d’une pomme que son odeur. Un
être humain peut distinguer jusqu’à quinze milles nuances de
couleurs 38 et est capable de percevoir en moyenne une lettre
de sept millimètres environ à cinq mètres. 39 C’est pourquoi
la précision de représentation se développe. Avec l’amélioration
continuelle de la résolution LED, les écrans haute
performance semblent avoir quasiment rattrapé la réalité
matérielle. Par exemple, les écrans Retina d’Apple affichent
une résolution suffisamment haute pour que l’œil humain ne
soit pas en mesure de distinguer les pixels de l’image.
Ils prennent également en compte notre angle de vue, afin
d’éviter une déformation de l’image. En 1954 est mis au point
le Cinérama, un procédé de projection cinématographique
conçu à partir d’un écran courbé. Il permet d’expérimenter
l’image par l’immersion. Aujourd’hui, la technologie des
écrans flexibles procède du même principe. Depuis 2013, les
premiers téléviseurs courbés offrent un meilleur angle de vue
par rapport aux écrans traditionnels. De plus, la structure de
l’œil est aussi prise en compte pour représenter un objet en 3D.
Le cerveau humain interprète l’objet en assemblant l’information
perçue par l’œil droit et l’œil gauche : le numérique
permet de représenter l’objet en double ; le spectateur équipé de
lunettes stéréoscopiques perçoit ainsi la profondeur. Dans les
films où l’impact visuel d’un objet joue un rôle important,
cette technique de représentation de l’objet change radicalement
notre expérience.
Une autre technique est celle du Eye-Tracking qui permet
d’avoir une perception 3D sur un simple écran. Par exemple
sur le FirePhone d’Amazon sorti en 2014, les éléments affichés
varient en fonction de la position des yeux de l’utilisateur,
pour que l’objet soit toujours affiché sous le meilleur angle.
Même si le FirePhone était un échec commercial, Amazon a
ouvert un nouveau champ d’expérience de l’objet.
FirePhone de Amazon, 2014
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www.amazon.com
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