Untitled

212 COINS DE PARIS
et bien d'autres ! Les corps de ces malheureux, dpouills
de leurs vtements, taient chargs chaque soir sur des
tombereaux couverts, les ttes coupes entre les jambes,
et l'horrible voiture, qui laissait derrire elle un sanglant
sillage, tait dverse dans quelque foss creus au fond
des jardins du couvent de Picpus, o existe encore le
cimetire des supplicis de la Rvolution.
En revenant sur nos pas, nous rencontrons, au n 9
de la rue de Reuilly, les restes de ce qui fut la brasserie
de l'Hortensia, tenue en 1789 par le fameux Santerre,
commandant de la Garde nationale. La maison n'a pas
beaucoup chang; toutefois, l'heure actuelle, c'est un
pensionnat de jeunes filles qui occupe les grandes pices
o le tonitruant Gnral organisa ces terribles descentes
sur Paris et dchana ces effrayants bataillons du fau-
bourg qui terrorisaient jusqu' la Convention elle-mme.
De l'autre ct de la place de la Bastille, rue Saint-
Antoine, prs de l'glise Saint-Paul, s'ouvre le passage
les vieux sou-
Gharlemagne, pittoresque au possible par
venirs qu'il renferme et l'trange population qu'il abrite :
rempailleurs de chaises, cardeurs de matelas, marchandes
de lait, fleuristes en plein vent, se groupent
autour des restes de l'htel charmant qui fut, sous
Charles V, la somptueuse demeure du prvt Hugues
Aubryot.
La faade, encore remarquable et de belle allure,
tonne et dtonne dans ce fouillis de maisonnettes pauvres
et basses qui l'enserrent. Des poules picorent au