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DAP_RA_1955.pdf (10,0 MB) - Criminocorpus

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ANNEXE II<br />

LA RÉÉDUCATION<br />

DES DÉLINQUANTS RÉCIDIVISTES<br />

ANNEXE .11<br />

LA RÉÉDUCATION<br />

DES DÉLINQUANTS RÉCIDIVISTES<br />

tation à l'emploi, résistance aux tentations<br />

du milieu libre, équilibre budgétaire,<br />

recherche d'un logement, généralement<br />

recherche d'une compagne,<br />

parfois supplémentairement<br />

paiement sans délais des amendes et<br />

frais de justice. Il est presque impossible<br />

dans de telles conditions de reprendre<br />

pied, si le sujet n'est pas<br />

étroitement épaulé, soit par sa famille,<br />

soit par une œuvre d'assistance.<br />

Or, le multi-réeidiviste n'a plus de<br />

famille valable. Il a découragé ceux<br />

qui lui portaient affection (sauf la<br />

mère, quelquefois) et semé en route,<br />

femmes, concubines et enfants (1).<br />

Il est alors utile d'échelonner devant<br />

lui les obstacles. En le fixant<br />

professionnellement avant l'élargissement,<br />

on le décharge du fardeau le<br />

plus accablant au jour où les autres<br />

difficultés se présenteront.<br />

Le choix du métier n'est pas sans<br />

intérêt et l'avis du psychotechnieien<br />

est demandé dans tous les cas dans<br />

les centres de triage. Mais, d'une part<br />

les difficultés économiques ou les conditions<br />

locales ne permettent généralement<br />

pas de placer l'homme dans la<br />

profession qui lui conviendrait le<br />

mieux, d'autre part, les employeurs<br />

n'acceptent guère de les embaucher<br />

qu'au dernier échelon, désireux de<br />

connaître leurs aptitudes et leur comportement<br />

au travail avant de leur<br />

confier des postes plus importants.<br />

(1) Sur 516 relégués examinés au Centre de<br />

Loos, 308 ne correspondaient plus avec qui que<br />

ce soit de leur famille, soit près de 60 %. Les<br />

autres, correspondaient avec les personnes<br />

suivantes :<br />

22 avec leurs deux parents, 63 avec leur mère,<br />

Quatorze sur vingt des cas examinés<br />

ont progressé professionnellement.<br />

L'état de stagnation n'a pas<br />

empêché les six autres de réussir un<br />

reclassement valable.<br />

On voit des sujets accepter passivement<br />

l'emploi que les événements<br />

leur ont donné, considérant le travail<br />

comme une nécessité pénible mais inévitable,<br />

tandis que d'autres cherchent<br />

à s'orienter vers un métier qui leur<br />

plaît. Un chauffeur de poids lourds,<br />

bien qu'on lui ait déconseillé de reprendre<br />

cette profession qui contrarie<br />

la fixation et conduit à boire, est retourné<br />

à ses camions et tient quand<br />

même. Un horticulteur fait de même.<br />

Les brasseurs d'affaires ne se sont<br />

plu que dans des postes où il leur reste<br />

de leur passé une certaine part<br />

d'initiative.<br />

Aller d'emblée à des placements<br />

très bien adaptés à la personnalité du<br />

relégué, n'est d'ailleurs peut-être pas<br />

la meilleure méthode. Il n'est sans<br />

doute pas mauvais pour certains d'avoir<br />

d'abord connu la rudesse du métier<br />

de manœuvre ; cela permet de mesurer<br />

le chemin parcouru et d'apprécier<br />

le nouvel emploi. Tout dépend<br />

des cas. Beaucoup ' de ceux qui sont<br />

maintenant des spécialistes l'étaient<br />

déjà avant la relégation. Mais d'autres,<br />

le sont devenus depuis leur élargissement.<br />

Et parfois à cinquante<br />

ans !<br />

1 avec son beau-iils, 90 avec des frères ou<br />

sœurs, 2 avec leurs parents divorcés, 1 avec<br />

sa grand-mère, 22 avec leur lemme, 4 avec<br />

un oncle ou une tante, 3 avec leur pèrè,<br />

19 avec leurs enfants, 8 avec leur concubine,<br />

3 avec des neveux.<br />

L'importance du facteur « salaire<br />

» dans le reclassement de ceux qui<br />

ont réussi est assez discutable. Ces<br />

hommes gagnent de 22.000 à 45.000 fr<br />

par mois; mais souvent au salaire<br />

personnel s'ajoute celui de la compagne,<br />

ce qui modifie sensiblement<br />

la situation pécuniaire du couple. On<br />

peut relever néanmoins qu'aucun des<br />

vingt relégués dont il s'agit n'a gagné<br />

moins de 22.000 fr, mais c'est là généralement<br />

le salaire minimum de l'ouvrier<br />

non spécialisé. On ne peut donc<br />

en tirer aucune conclusion particulière<br />

aux récidivistes, sinon qu'il<br />

n'est pas indispensable de leur assurer<br />

un gain élevé pour les détourner<br />

de la récidive. Nous pouvons observer<br />

que plusieurs qui menaient une<br />

vie large grâce au délit (les escrocs,<br />

par exemple), parviennent à se contenter<br />

d'une situation très modeste.<br />

Nous en arrivons au facteur que<br />

nous considérons comme primordial<br />

dans le reclassement du relégué, c'està-dire,<br />

à l'influence d'une femme.<br />

Dix-neuf sur vingt des cas exposés<br />

sont significatifs à cet égard.<br />

Ce sera pour noter, tout d'abord,<br />

qu'il est beau, presque incroyable,<br />

que des êtres au passé lourdement<br />

chargé, sans avenir et sans espoir, si<br />

désabusés, amers, desséchés, puissent<br />

devoir à une fixation affective —<br />

dont l'intensité varie selon les cas,<br />

mais qui est rarement nulle — le retour<br />

à la santé morale. On y trouvera<br />

une grande leçon d'espérance et la<br />

(l)Les relégués ont un goût bien connu pour<br />

les petites annonces matrimoniales. ,<br />

preuve peut-être qu'il n'y a pas<br />

d'hommes définitivement perdus.<br />

Nous y lirons également que le multi-réeidiviste<br />

n'est pas tellement différent<br />

de la grande foule des hommes<br />

honnêtes, dont presque toute la<br />

stabilité est fonction de l'heureuse influence<br />

de leur compagne. La femme<br />

demeure le grand balancier de cet<br />

équilibriste inquiétant qu'est l'homme.<br />

Pendant les années de détention,<br />

le relégué a souffert d'un isolement<br />

total qui lui a fait mieux apprécier<br />

la valeur du couple. L'homme est<br />

toujours un peu tel au retour des<br />

grandes aventures (1919, 1945). Il a<br />

souffert, vieilli; il est saturé d'extraordinaire.<br />

Quand le multi-récidiviste<br />

soupire en prison après une liberté<br />

qui ne lui a jamais paru aussi belle,<br />

il aspire à une satisfaction de ses besoins<br />

qui ne se limite pas forcément<br />

aux plus animaux d'entre eux. Les<br />

innombrables échanges amoureux<br />

qu'il essaie d'entretenir malgré l'administration<br />

avec des correspondantes<br />

dont souvent il n'a même pas vu la<br />

photographie (1), tendent à peupler<br />

un vide réel. Il serait, pensons-nous,<br />

insuffisant d'y voir un simple substitut<br />

d'ordre physiologique, ou plutôt<br />

le physiologique et le psychologique<br />

sont si intimement mêlés chez l'être<br />

humain que celui-ci déborde de l'un<br />

sur l'autre sans même s'en rendre<br />

compte.<br />

Au delà par conséquent de ces désirs<br />

purement sexuels, le relégué libéré<br />

a une propension naturelle vers<br />

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