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دار المقري 216 Dar El Mokri<br />
L’Enfermement, <strong>le</strong> Partage Lieux et mémoire<br />
217<br />
Dar El Mokri<br />
Dégénérescence d’un palais<br />
des mil<strong>le</strong> et une nuits<br />
Comment un palais prestigieux et pittoresque s’estil<br />
transformé en un lieu de détention secrète ?<br />
Une aberration, un manque de culture, une métamorphose<br />
machiavélique?<br />
Dar El Mokri est à l’origine la demeure personnel<strong>le</strong> de<br />
Si Thami El Mokri, fils du Grand Vizir Si Mokri aux temps<br />
du protectorat, et lui-même responsab<strong>le</strong> des finances au<br />
sein du gouvernement chérifien. Comme tout homme<br />
du Makhzen qui se respecte, il la voulait gigantesque,<br />
pittoresque, imposante… Le résultat est sans appel : une<br />
bel<strong>le</strong> demeure mariant des sty<strong>le</strong>s différents : marocain<br />
(travaux du bois et du plâtre), andalous (<strong>le</strong> zellige), turc<br />
(<strong>le</strong>s koubbas), italien (motifs sur <strong>le</strong>s murs)... Nul doute,<br />
y régnait une atmosphère de quiétude imperturbab<strong>le</strong>.<br />
L’aire globa<strong>le</strong> du lot mesure 8722 mètres carrés, dont<br />
1800 constituent la surface bâtie. Un grand salon, situé<br />
au centre de la maison, attire l’attention par sa beauté.<br />
Un espace est réservé aux invités. Au fond, un jardin<br />
sty<strong>le</strong> andalou. Juste en face, une grande ai<strong>le</strong> réservée au<br />
harem. Plusieurs chambres. Au milieu, un patio orné de<br />
motifs incrustés dans <strong>le</strong> marbre… Quelques matériaux<br />
furent même importés d’Italie et d’ail<strong>le</strong>urs.<br />
Une inscription à l’entrée de la demeure atteste de la<br />
durée de construction : de 1947 à 1951. C’est dire que<br />
<strong>le</strong> chantier était actif au grand mépris des bou<strong>le</strong>versements<br />
de la fin du protectorat français au Maroc.<br />
L’état marocain, sitôt souverain, l’intégra à son patrimoine.<br />
Le général Oufkir ne tarda pas à se rendre<br />
compte de tous <strong>le</strong>s avantages que la bâtisse offrait. Sa<br />
situation à l’écart du centre vil<strong>le</strong> et des bâtiments officiels,<br />
et surtout sa position au milieu d’un grand jardin<br />
faisant office de zone de protection contre <strong>le</strong>s intrus, en<br />
faisaient une citadel<strong>le</strong> où tout était permis. Pour mieux<br />
faire, <strong>le</strong> général fit venir des nervis de son fief, à qui il<br />
donna carte blanche, formu<strong>le</strong> en vogue dans <strong>le</strong>s milieux<br />
tortionnaires de l’époque. Très vite, la maison se remplit<br />
d’activités, pour devenir, suite aux événements de<br />
1963, et surtout à ceux de 1965, une véritab<strong>le</strong> machine à<br />
broyer <strong>le</strong>s opposants, qu’ils soient cadres de partis, syndicalistes,<br />
journalistes… ou simp<strong>le</strong>s récalcitrants.<br />
Accès à "Dar El Mokri"