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تازمامارت<br />

302 Tazmamart<br />

L’Enfermement, <strong>le</strong> Partage Lieux et mémoire<br />

303<br />

Tazmamart<br />

Un bout de géhenne au milieu<br />

de nul<strong>le</strong> part<br />

Tazmamart est une icône. à lui seul, <strong>le</strong> site symbolise<br />

l’ensemb<strong>le</strong> des horreurs commises pendant <strong>le</strong>s années<br />

de plomb. Il est pour <strong>le</strong>s Marocains, ce qu’était<br />

La Bastil<strong>le</strong> pour <strong>le</strong>s Français au <strong>le</strong>ndemain de la Révolution<br />

française, <strong>le</strong> Goulag pour <strong>le</strong>s Russes pendant la période de<br />

déstalinisation… une tache noire dans la mémoire col<strong>le</strong>ctive,<br />

au même titre qu’un symbo<strong>le</strong> de résistance contre un<br />

régime vaniteux.<br />

Et pourtant, <strong>le</strong> village et a fortiori la caserne militaire qui <strong>le</strong><br />

domine, furent longtemps bannis du <strong>le</strong>xique géographique<br />

et administratif. Nul<strong>le</strong> carte, topographique ou autre, n’en<br />

mentionnait l’existence. Officiel<strong>le</strong>ment, Tazmamart n’existait<br />

pas (bizarrement, jusqu’au jour d’aujourd’hui, il n’y a<br />

aucune indication sur la route entre Gourama et Rich qui<br />

indique <strong>le</strong> site Tazmamart). On peut alors faci<strong>le</strong>ment imaginer<br />

la rigueur de la marginalisation imposée aux habitants<br />

du village. Aucun projet de développement local. Une<br />

toute petite éco<strong>le</strong>. Un seul maître de classe (<strong>le</strong> directeur<br />

du groupe scolaire ainsi que <strong>le</strong>s inspecteurs d’éducation<br />

nationa<strong>le</strong> étaient interdits d’accès au village). Aucun dispensaire.<br />

Pas de route goudronnée. Pas de marché local.<br />

Interdiction de se procurer des postes de radio performants<br />

(encore fallait-il pouvoir en acheter). Pis. Tracasseries<br />

à chaque sortie du village, et au retour. Interdiction de<br />

recevoir des invités. Interdiction de <strong>monte</strong>r sur <strong>le</strong>s hauteurs<br />

même pour al<strong>le</strong>r chercher son propre troupeau, ou du bois<br />

pour se réchauffer. Interdiction de circu<strong>le</strong>r et de travail<strong>le</strong>r<br />

<strong>le</strong>s champs la nuit… C’est dire que <strong>le</strong>s habitants du village<br />

étaient forcément pauvres et démunis face à une machine<br />

répressive inferna<strong>le</strong>. Petite consolation pour ces pauvres<br />

gens, simp<strong>le</strong> mais ô combien salutaire, au moins du point<br />

de vue psychologique : eux au moins étaient libres, juste à<br />

côté d’eux, à quelques mètres gisait un bout d’enfer : une<br />

prison en forme de sarcophage grandeur nature.<br />

Tazmamart ou ce qui reste du lieu de détention secrète

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