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e-migrinter 2010 numéro 06 - Maison des Sciences de l'Homme et ...

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n°6 <strong>2010</strong> 17Les aires <strong>de</strong> réclusionLa secon<strong>de</strong> moitié du 20e siècle voits'affronter <strong><strong>de</strong>s</strong> courants divers dans l<strong>et</strong>raitement <strong><strong>de</strong>s</strong> noma<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> Tsiganes. Si<strong>de</strong> la part <strong><strong>de</strong>s</strong> pouvoirs publics l'assimilationest souhaitée, avec la mise en place d'uneréglementation <strong>de</strong> plus en plus complexeenveloppée d'un discours humaniste <strong>et</strong>développée pour <strong><strong>de</strong>s</strong> raisonstechnocratiques, le rej<strong>et</strong> <strong>de</strong> la part <strong><strong>de</strong>s</strong>autorités locales <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> populations dont ellessont les élues reste brut, brutal, artisanal,sans nuance. Ces proies faciles pour lamaréchaussée que sont les noma<strong><strong>de</strong>s</strong> n'ontpas besoin d'être fichées <strong>et</strong> jusqu'au seuil <strong><strong>de</strong>s</strong>années quatre-vingt le contrôle par unordinateur central <strong>de</strong> ces populationsmarginales ne rassure pas assez celui qui,même <strong>de</strong> loin, voit s'installer <strong><strong>de</strong>s</strong> caravanesdans la commune 40 . Une loi comme celle <strong>de</strong>1969 ne suffit pas à changer les mentalitésqui en restent à celle <strong>de</strong> 1912 41 . L'attitu<strong>de</strong> àl'égard du Tsigane n'est pas une question <strong>de</strong>loi mais d'état d'esprit alimenté par lesimages <strong>et</strong> représentations que chacun s'enfait.Qu'importe les directivesgouvernementales. Le rej<strong>et</strong> <strong>de</strong>meure. Il estexpérience quotidienne. Dans chaque régionle Tsigane est toujours un homme en sursis,voleur <strong>et</strong> fauteur <strong>de</strong> troubles en puissance,donc appréhendé en instance, éternelrécidiviste par le fait même <strong>de</strong> n'avoir pasobtempéré aux textes qui <strong>de</strong>puis <strong><strong>de</strong>s</strong> sièclesSéminaire <strong>de</strong> droit international privé, 1974-1975,notamment pp. 54 <strong>et</strong> suiv.40 Suite à la loi <strong>de</strong> 1969 a été créé un fichier nationalgéré par la Gendarmerie nationale à Rosny-sous-Bois.Système PROSAM, mémoire FILMOREX avecmicro fichiers . Au 15 avril 1976, 60858 « sansdomicile ni rési<strong>de</strong>nce fixe » adultes sont répertoriés.Chiffre donné par M. Bertrand Cadi <strong>et</strong> le ColonelProuteau (chef du Service Technique <strong>de</strong> RecherchesJudiciaires <strong>de</strong> la Gendarmerie Nationale) dansContribution à l'étu<strong>de</strong> d'un groupe marginal dans la sociétéfrançaise, IXe Congrès International <strong>de</strong> DéfenseSociale, p. 10 (document non daté).41 Au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> ces lois , J.-P. Liégeois, « Tsiganes,noma<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>et</strong> pouvoirs publics en France au 20esiècle », Pluriel, n°19, 1979.l'ont banni ou promis aux galères ou à lapotence. Au cours <strong><strong>de</strong>s</strong> siècles passés lesautorités locales ne tenaient que rarementcompte <strong><strong>de</strong>s</strong> l<strong>et</strong>tres <strong>de</strong> protection du roi dontquelques groupes tsiganes étaient porteurs.La peur <strong>de</strong>meure au 20e siècle, <strong>et</strong> lesattitu<strong><strong>de</strong>s</strong> qui en découlent.Certains maires empilent mot à motles griefs qui légalement leur perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong>repousser les noma<strong><strong>de</strong>s</strong> ; ils pensent que leuraddition donnera du poids à l'arrêté qu'ilsprennent : le 16 septembre 1980, le maire <strong>de</strong>Longeault (Côte-d'Or), dans son arrêté,considèreque le campement <strong>et</strong> le stationnement sur lavoie publique d'individus n'ayant pas <strong>de</strong>domicile fixe présentent <strong>de</strong> sérieuxinconvénients <strong>et</strong> souvent même <strong><strong>de</strong>s</strong> dangers aupoint <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l'hygiène publique <strong>et</strong> <strong>de</strong> lasécurité <strong><strong>de</strong>s</strong> biens <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> personnes ; qu'ilsgênent d'ailleurs la circulation publique <strong>et</strong>sont une cause permanente <strong>de</strong> désordre.L'assemblage <strong><strong>de</strong>s</strong> termes, dont aucunn'a <strong>de</strong> sens précis, induit un portraithorrifiant <strong><strong>de</strong>s</strong> maux dûs à ceux n'ayant pas <strong>de</strong>domicile fixe il convient alors <strong>de</strong> s'en protégerpar une réglementation.L'image <strong><strong>de</strong>s</strong> Tsiganes telle qu'elle s'estreproduite au cours <strong>de</strong> l'histoire <strong>de</strong> leurscontacts avec ceux qui les entourent a <strong>de</strong>quoi susciter une peur justificatrice <strong>et</strong>inspiratrice du rej<strong>et</strong>. Il est question jusqu'au20e siècle <strong>de</strong> « ravages <strong>et</strong> désordres », <strong>de</strong>« pilleries <strong>et</strong> saccages ». L'amalgame avec lesvagabonds <strong>et</strong> gens sans aveu, avec lesdéserteurs armés <strong><strong>de</strong>s</strong> troupes royales <strong>et</strong> lesbandits <strong>de</strong> grands chemins fait que le terme<strong>de</strong> noma<strong>de</strong>, <strong>de</strong> Gitan ou <strong>de</strong> bohémien qui<strong>de</strong>meure au 20 e siècle est à lui seul porteur<strong><strong>de</strong>s</strong> exactions attribuées à ceux qu'ils ontcôtoyés 42 . Le stéréotype qui s'est fixé est unmélange <strong>de</strong> crainte imprécise <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong>uperstitions à base d'histoires42 Nous verrons ailleurs quelle est la réalité <strong>de</strong> lacriminalité tsigane qui n'a rien <strong>de</strong> commun avecl'image qu'on s'en fait.

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