Le Livre Blanc des Open Labs
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LE LIVRE BLANC DES OPEN LABS<br />
LES OPEN LABS D’ENTREPRISES<br />
s’assurer que les équipes opérationnelles s’approprient<br />
les idées, concepts, prototypes qui sont<br />
développés dans l’open lab (appropriation). Même<br />
si les open labs restent en marge de l’organisation<br />
(avec <strong>des</strong> règles de gestion et <strong>des</strong> mo<strong>des</strong> de fonctionnement<br />
spécifiques), ils doivent cependant<br />
trouver « un ancrage » au sein de l’entreprise<br />
sans y sacrifier leur liberté d’action. Cet ancrage<br />
est nécessaire pour la pérennité de l’open lab luimême<br />
mais aussi pour permettre de bénéficier <strong>des</strong><br />
ressources de l’entreprise, de ses réseaux et de sa<br />
réputation.<br />
« <strong>Le</strong> défi est compliqué. Faire en sorte que<br />
ce qui est fait dans ces structures là [open labs]<br />
ouvre sur de l’appropriation. Il ne faut pas<br />
seulement qu’il y ait alignement. L’alignement<br />
est un premier élément mais l’appropriation<br />
est compliquée. De notre côté, l’alignement est<br />
facile, en tout cas c’est une condition de survie.<br />
Il faut que l’on soit sur <strong>des</strong> sujets sur lesquels<br />
on apporte quelque chose. []<br />
Pour l’appropriation, on a le modèle de<br />
la société de service mais on peut aussi avoir<br />
d’autres modèles. C’est vraiment clé parce<br />
qu’il peut y avoir plein d’initiatives où le niveau<br />
<strong>des</strong> BU dit finalement "c’est quoi ces gars là qui<br />
lancent leurs trucs ?". Finalement,<br />
on risque de tuer un sujet qui aurait pu être<br />
un sujet à potentiel. Si je regarde vraiment<br />
d’un point de vue de l’entreprise, ce qui est<br />
important c’est juste qu’il y ait un ancrage,<br />
que ce qu’on fait dans ces structures là fasse<br />
bouger le fond de la cale du navire. []<br />
Si toutes les couches sont filtrées et que<br />
les rameurs continuent à ramer dans leur propre<br />
direction, c’est mort. »<br />
Source : Entretien avec E. Gaudin,<br />
directeur de l’innovation et du e-lab de Bouygues,<br />
réalisé en avril 2015<br />
L’alignement stratégique et l’appropriation constituent<br />
les deux dimensions qui permettent de gérer<br />
les tensions entre l’exploration et l’exploitation<br />
pour les connaissances et les idées nouvelles.<br />
L’entreprise qui arrive à gérer ces deux types<br />
d’activités (exploration et exploitation) est qualifiée<br />
d’ambidextre, propriété clé qui assure à<br />
l’entreprise de préserver sa pérennité dans la durée<br />
(Birkinshaw et Gibson, 2004)<br />
<strong>Le</strong> modèle d’open lab d’entreprise implique de<br />
préserver la séparation entre la conception innovante<br />
et la conception réglée car les modalités<br />
de fonctionnement et l’état d’esprit y sont totalement<br />
différents. En réalité, il est nécessaire de<br />
construire <strong>des</strong> ponts et <strong>des</strong> liens entre ces deux<br />
activités. <strong>Le</strong>s protagonistes de ces open labs ne<br />
sont eux-mêmes pas « miscibles » avec ceux de<br />
la conception réglée, au sens ou :<br />
• le fonctionnement du « leader » d’open Lab<br />
est incompatible avec celui du « Manager »<br />
traditionnel d’équipe de R&D ;<br />
• Un « innovateur » dans un open lab et un<br />
« développeur » au sein de la conception réglée<br />
ne font pas bon ménage. <strong>Le</strong>urs mo<strong>des</strong> de<br />
fonctionnement sont radicalement différents<br />
et il est illusoire de penser que l’un peut se<br />
substituer à l’autre.<br />
Garel & Mock (2012) évoquent <strong>des</strong> images simples<br />
pour démarquer ces deux profils. <strong>Le</strong>s « Gazeux »<br />
(les innovateurs et les créatifs) apportent l’inspiration<br />
et la vision de la conception innovante dans<br />
un processus chaotique nécessaire où la liberté<br />
d’action et l’autonomie sont ramenés à l’échelle<br />
de l’individu. A côté d’eux, les « Cristallins »(les<br />
développeurs) assurent la force de réalisation<br />
stable dans un processus qualité établi et parfaitement<br />
piloté (le management de projet standard).<br />
Définition 5 – <strong>Le</strong>s entreprises ambidextres, un enjeu clé pour la compétitivité<br />
Pour préserver la compétitivité à long terme, les entreprises doivent être en capacité de<br />
gérer à la fois <strong>des</strong> activités d’exploration et d’exploitation (March, 1991). La capacité à<br />
préserver ces types d’activités est dénommée ambidextrie dans la littérature scientifique<br />
(Birkinshaw et Gibson, 2004). Ils s’agit, pour les managers de l’entreprise, de concilier<br />
deux activités aux logiques et aux contraintes différentes : l’exploration qui suppose de<br />
prendre <strong>des</strong> risques et d’ouvrir les voies du possibles en s’appuyant sur de nouvelles<br />
compétences, et l’exploitation qui suppose à la fois la sélection et la rationalisation <strong>des</strong><br />
compétences ou <strong>des</strong> choix.<br />
Il existe deux grands types d’ambidextrie dans les (gran<strong>des</strong>) organisations :<br />
• l’ambidextrie structurelle qui conduit à confier l’exploration et l’exploitation à deux<br />
entités différentes de l’organisation ;<br />
• l’ambidextrie contextuelle qui conduit à laisser gérer l’exploration et l’exploitation par<br />
les mêmes équipes dans la même unité.<br />
<strong>Le</strong> développement <strong>des</strong> open labs d’entreprises conduit au développement d’une forme<br />
d’ambidextrie structurelle. Dans ce type d’organisation, l’enjeu est de créer les mécanismes<br />
qui facilitent la coordination entre les activités d’exploration et d’exploitation ainsi que<br />
de prévoir <strong>des</strong> mécanismes de transferts de connaissances entre les entités en charge<br />
de l’exploration (par exemple, l’open lab) et celles en charge de l’exploitation (le plus<br />
souvent, les Business units).<br />
Enfin, les « Liqui<strong>des</strong> » sont capables de comprendre<br />
ces deux mon<strong>des</strong> ; ils assurent les liens nécessaires<br />
entre les deux parties. Ils jouent le rôle de médiateurs<br />
et de traducteurs. <strong>Le</strong>s « Liqui<strong>des</strong> » renvoient<br />
à la fonction de « boundary spanner » (<strong>Le</strong>vina &<br />
al 2005) c’est-à-dire <strong>des</strong> individus capables de<br />
comprendre deux mon<strong>des</strong> différents et de faire<br />
« sauter les barrières » aux connaissances, aux idées,<br />
aux interprétations et aux visions du monde. Ils<br />
traduisent et rendre intelligible par tous les autres<br />
ce qui émane <strong>des</strong> « cristallins » et <strong>des</strong> « gazeux ».<br />
La pérennité de l’open lab dépend de sa capacité<br />
à trouver un ancrage au sein de l’entreprise sans<br />
compromettre sa liberté d’action.<br />
« Comment [l’open lab] arrive à être ancré<br />
dans la réalité de l’entreprise et donc finalement<br />
en lien avec les opérationnels de l’entreprise ?<br />
Comment une telle structure n’est pas quelque<br />
chose qui travaille en dehors ? Pour moi<br />
c’est la clé de la réussite : [] le fait de travailler<br />
avec les autres, de faire de l’expérimentation.<br />
Un point sur lequel c’est beaucoup moins clair<br />
et beaucoup moins appuyé, mais qui me parait<br />
fondamental pour l’intérêt de ces structures et<br />
leur pérennité dans le temps, c’est le lien avec<br />
l’opérationnel. En quoi [les open labs] aident<br />
l’entreprise dans laquelle [ils] sont ? En quoi<br />
[ils] sont connectés à la direction générale mais<br />
aussi connectés aux réalités du terrain ?<br />
Un projet réussit bien quand on arrive à avoir<br />
le principe de la tenaille, c’est-à-dire<br />
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