Journal asmac No 6 - décembre 2023

Politique
Qu’y a-t-il de plus personnel
que la menace qui pèse sur
notre existence?
La particularité de la crise climatique est qu’elle nous
concerne tous. Chacune et chacun de nous ressent
déjà les conséquences de ces changements environnementaux
drastiques. Cette crise menace notre existence
ou du moins notre manière de vivre.
Et si nous poursuivons la réflexion, nous constaterons qu’en
Suisse, chaque jour en septembre et octobre de cette
année a été trop sec et trop chaud, et qu’il régnait
une chaleur inhabituelle au début de l’été. Différentes
questions se posent donc: n’avonsnous
pas déjà connu cette situation ces
dernières années? Quand avons-nous
pour la dernière fois vécu un «vrai»
hiver? Vaut-il encore la peine d’apprendre
à nos enfants à skier? Pouvons-nous
raisonnablement entreprendre
des vols de vacances? La liste
pourrait être élargie à volonté.
Sincèrement, c’est très pénible
de se pencher sur ce thème. Admettre
que plus ou moins tous les éléments de
notre quotidien sont remis en question.
Prendre conscience du fait que l’Europe,
une bulle de prospérité, sera aussi touchée
par des changements importants, que le monde
de nos enfants sera totalement différent du nôtre et
cela déjà à cause des changements climatiques actuels qui
sont irréversibles. C’est difficile à supporter.
Nous cherchons donc des solutions. Nous négocions
(«Je prends la voiture aujourd’hui, en échange, je ne mangerai
pas de viande demain»), minimisons («Chez nous, ce ne sera
pas si grave»), cherchons un prétexte («La crise climatique est
tellement complexe, qu’est-ce que tu veux que j’y fasse?!»),
suscitons l’émotion («Ces activistes veulent nous prescrire ce qui
est juste»), faisons des projections («Dommage pour ces animaux
qui ne peuvent pas s’adapter assez vite aux changements climatiques!»),
fuyons nos responsabilités («Tant que les États-Unis et
la Chine émettent autant de CO2, ma contribution est sans effet»)
et ainsi de suite. Des livres et dissertations paraissent déjà sur
les mécanismes psychologiques de défense par rapport à la
catastrophe climatique qui nous menace.
La plupart des discussions sont vouées à se noyer dans
l’émotionnel ou en sont du moins fortement empreintes.
Les activistes climatiques du collectif «Dernière génération»
L’essentiel
en bref
suscitent la panique, alors que Donald Trump incarne le déni.
Comment pouvons-nous garder la tête froide et préserver notre
capacité d’agir?
Entre-temps, pas un jour ne passe sans que je sois d’une
manière ou d’une autre confrontée à la crise climatique: que ce
soit le temps estival en octobre, le nouveau jouet en plastique
des enfants ou le parking plein devant la maison.
Ce n’est pas drôle. Pourtant, c’est cette prise de
conscience qui me motive au changement.
Et si je suis honnête: j’ai besoin d’un peu
de panique pour continuer.
En référence à Hannah Arendt:
personne n’a le droit de détourner
le regard.
Car il n’y a rien de plus personnel
que la menace qui pèse sur
notre existence.
Nora Höger,
coresponsable du groupe de travail
de l’asmac Santé planétaire
Photo: màd
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6/23 vsao /asmac Journal