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du repos, dans l’intention de recommen<strong>ce</strong>r la lutte le lendemain matin.<br />
« Mais, lorsque je me retrouvai dans une clairière, <strong>au</strong> milieu de la forêt, je ne vis plus<br />
qu’un seul homme à mon côté : c’était Yvain. Nous ne savions pas où était G<strong>au</strong>vain. Nous<br />
l’appelâmes pendant longtemps puis nous nous rendîmes à l’éviden<strong>ce</strong> : ton neveu avait été<br />
blessé ou capturé par nos ennemis. Et Yvain m’expliqua que Karadog le Roux avait coutume<br />
de combattre tous les chevaliers qui passaient près de son domaine pour les faire prisonniers<br />
et exiger une rançon, et <strong>ce</strong>la quels que fussent leur rang ou leur fortune. Bien sûr, ton neveu<br />
et le fils du roi Uryen n’avaient nulle intention de se laisser faire, et j’étais, je pense, arrivé<br />
<strong>au</strong> bon moment pour les aider.<br />
« Nous revînmes sur nos pas, mais nous ne découvrîmes <strong>au</strong>cune tra<strong>ce</strong> de G<strong>au</strong>vain. Et<br />
comme il était impossible de continuer nos recherches pendant la nuit, nous décidâmes,<br />
Yvain et moi, de dormir <strong>au</strong> pied d’un arbre, et d’attendre le lever du jour. Nous nous<br />
réveillâmes <strong>au</strong> milieu du brouillard et, sans grand espoir, nous allâmes un peu <strong>au</strong> hasard<br />
dans la direction de <strong>ce</strong>tte m<strong>au</strong>dite forteresse. Des paysans que nous rencontrâmes nous<br />
dirent que <strong>ce</strong>tte forteresse avait pour nom la Tour douloureuse, et que le seigneur du lieu<br />
avait la réputation d’un homme fourbe et cruel. Ils ajoutèrent que chaque fois qu’il faisait un<br />
prisonnier, il l’enfermait dans un cachot voûté entouré de fosses dans lesquelles se trouvaient<br />
des serpents venimeux. Nous remerciâmes les paysans et nous n’eûmes plus qu’une idée en<br />
tête : aller vers la Tour douloureuse et dé<strong>livre</strong>r G<strong>au</strong>vain de son abominable prison.<br />
« Vers le milieu du jour, le brouillard commença à se dissiper, et nous vîmes que nous<br />
étions dans la bonne direction : la Tour douloureuse se dressait devant nous à peu de<br />
distan<strong>ce</strong>. Mais comment faire pour y pénétrer ? Après avoir examiné les lieux, nous<br />
décidâmes de nous séparer, Yvain et moi, et de tenter notre chan<strong>ce</strong> chacun de notre côté.<br />
Yvain s’éloigna vers la rivière, et moi, après un détour, je revins près de la forteresse en me<br />
dissimulant le plus possible sous le couvert d’un bois qui recouvrait la pente d’une colline. Je<br />
me demandais bien <strong>ce</strong> que j’allais faire. Certes, il me fallait laisser mon cheval et m’en aller à<br />
pied, avec mon épée pour seule arme. Ainsi pourrais-je franchir les fossés en nageant, après<br />
avoir abandonné mon h<strong>au</strong>bert et mon he<strong>au</strong>me. J’en étais là dans mes réflexions quand<br />
j’entendis le bruit d’un galop. Un cavalier se précipitait vers moi et, sans plus me défier, me<br />
transperça l’ép<strong>au</strong>le de sa lan<strong>ce</strong> d’un coup si fort qu’elle se cassa et que je tombai sur le sol,<br />
perdant conscien<strong>ce</strong>.<br />
« Quelle ne fut pas ma surprise, quand je rouvris les yeux, de me retrouver dans un bon<br />
lit douillet, un visage de femme penché sur moi ! Voulant me redresser, je sentis une grande<br />
douleur dans l’ép<strong>au</strong>le et je vis qu’on m’avait pansé avec soin. La femme qui se trouvait là me<br />
dit : « Ne bouge pas, Galessin, car ta blessure est loin d’être guérie. Je suis ta cousine<br />
germaine, la Dame du Blanc-Chastel. C’est en revenant de la cour d’Arthur, avec mes<br />
suivantes et mes écuyers, que je t’ai trouvé gisant sur l’herbe. Tu avais perdu be<strong>au</strong>coup de<br />
sang. Nous t’avons emmené sur une civière, très dou<strong>ce</strong>ment, et nous t’avons fait soigner par<br />
les meilleurs médecins. Tu es maintenant hors de danger et en toute sécurité dans ma<br />
forteresse. Mais, je t’en prie, ne t’agite pas. Tu n’as rien d’<strong>au</strong>tre à faire que te reposer. » Je<br />
dois avouer que je n’avais pas besoin de <strong>ce</strong> conseil : j’étais épuisé, et je crois que j’ai dormi<br />
pendant plusieurs jours et plusieurs nuits.<br />
« Chaque jour, mon hôtesse venait prendre de mes nouvelles et parler avec moi. Je lui<br />
demandai si elle savait quelque chose <strong>au</strong> sujet de G<strong>au</strong>vain, d’Yvain et de Lan<strong>ce</strong>lot. Elle me