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que personne ne pourra soupçonner ta présen<strong>ce</strong>. Tu seras <strong>au</strong>ssi invisible que l’<strong>au</strong>bier<br />

recouvert de son écor<strong>ce</strong>.<br />

« Lorsqu’ils seront tous revenus à eux, les gens d’Esclados le Roux, accourront ici, sachant<br />

très bien que tu y es prisonnier, et ils te <strong>livre</strong>ront <strong>au</strong> suppli<strong>ce</strong> pour avoir tué leur seigneur et<br />

maître. Ils seront fort irrités quand ils s’aper<strong>ce</strong>vront que tu n’es plus là, mais ils penseront<br />

que tu as pu t’échapper grâ<strong>ce</strong> à quelque sor<strong>ce</strong>llerie. Ils ouvriront les portes et tu en profiteras<br />

pour te glisser à l’intérieur de la cour. Moi, je serai sur le montoir de pierre, là-bas, à<br />

t’attendre. Tu me verras, mais moi, je ne pourrai te voir puisque tu seras invisible. Accours<br />

en hâte vers moi et mets ta main sur mon ép<strong>au</strong>le. Ainsi s<strong>au</strong>rai-je que tu es là. Alors, tu me<br />

suivras où j’irai. » Sur <strong>ce</strong>, la jeune fille s’éclipsa et rentra dans la maison qu’elle avait quittée.<br />

Yvain se tint tranquille dans un recoin, entendant le grand tapage que faisaient les gens<br />

de l’<strong>au</strong>tre côté de la porte. Puis <strong>ce</strong>lle-ci s’ouvrit et des hommes en armes se précipitèrent<br />

dans le but évident de s’emparer de lui. Mais ils eurent be<strong>au</strong> chercher, ils ne trouvèrent que<br />

la moitié du cheval, une partie de la selle et les éperons. Fort étonnés, ils ouvrirent alors la<br />

porte qui donnait sur l’extérieur, mais ils n’eurent pas plus de succès, <strong>ce</strong> qui les rendit<br />

furieux. Comme ils s’agitaient en tous sens, Yvain se glissa prudemment entre eux, sortit<br />

dans la cour, s’approcha du montoir et mit la main sur l’ép<strong>au</strong>le de la jeune fille. Aussitôt, elle<br />

se mit en marche et Yvain la suivit. Arrivés à la porte d’une grande et belle chambre, elle<br />

l’ouvrit et ils entrèrent après avoir refermé soigneusement derrière eux. Yvain regarda <strong>au</strong>tour<br />

de lui. Il n’y avait pas un clou qui ne fût peint de riches couleurs, pas un panne<strong>au</strong> qui ne fût<br />

décoré de diverses figures dorées. La jeune fille qui avait dit se nommer Luned alluma un<br />

feu, prit un bassin d’argent rempli d’e<strong>au</strong> et, une serviette de fine toile blanche sur l’ép<strong>au</strong>le,<br />

elle offrit l’e<strong>au</strong> à Yvain pour qu’il se lavât. Celui-ci fut bien aise de pouvoir se rafraîchir, tant il<br />

avait souffert pendant le combat qu’il avait mené contre Esclados le Roux.<br />

Ensuite, elle plaça devant lui une table d’argent doré, couverte d’une nappe de fine toile<br />

j<strong>au</strong>ne, et lui apporta à souper. Il n’y avait pas de mets connus d’Yvain dont il ne vît là<br />

abondan<strong>ce</strong>, avec <strong>ce</strong>tte différen<strong>ce</strong> que <strong>ce</strong>ux qu’on lui présentait étaient be<strong>au</strong>coup mieux<br />

préparés qu’ailleurs et ex<strong>ce</strong>llents. Il n’y avait pas un vase de servi<strong>ce</strong> qui ne fût d’or ou<br />

d’argent. Yvain mangea et but jusqu’à une heure avancée : il avait besoin de se réconforter<br />

après tant de fatigues. Ils entendirent alors de grands cris venir du châte<strong>au</strong>, et Yvain<br />

demanda à la jeune fille <strong>ce</strong> qui se passait. « On donne l’extrême-onction <strong>au</strong> maître »,<br />

répondit-elle calmement. Sur <strong>ce</strong>, Yvain alla se coucher. Le lit que lui avait préparé Luned<br />

<strong>au</strong>rait été digne du roi Arthur, car il était moelleux et doux, et recouvert de tissu d’écarlate,<br />

de toile fine et de taffetas de soie richement brodé.<br />

Au milieu de la nuit, il fut réveillé par des cris perçants. « Que se passe-t-il encore ? »<br />

demanda Yvain. La jeune fille, qui se trouvait toujours là et qui veillait à la fenêtre, répondit :<br />

« Le seigneur, maître de <strong>ce</strong> châte<strong>au</strong>, vient de mourir. » Yvain se rendormit alors jusqu’<strong>au</strong><br />

lever du jour. Puis, retentirent des cris et des lamentations d’une violen<strong>ce</strong> inexprimable.<br />

Yvain demanda à Luned <strong>ce</strong> qu’ils signifiaient. « On porte en terre répondit-elle, le corps du<br />

seigneur, maître du châte<strong>au</strong>. » Yvain se leva, s’habilla et, pour se rendre à nouve<strong>au</strong> invisible,<br />

tourna le chaton de la bague vers l’intérieur. Il ouvrit alors la fenêtre et regarda dans la cour.<br />

Il ne vit ni commen<strong>ce</strong>ment ni fin <strong>au</strong>x troupes qui remplissaient les rues, toutes en armes. Il y<br />

avait <strong>au</strong>ssi be<strong>au</strong>coup de femmes à pied et à cheval, et tous les gens d’Église de la cité<br />

étaient là, chantant des ps<strong>au</strong>mes. Il semblait à Yvain que le ciel résonnait sous la violen<strong>ce</strong>

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