CONTROVERSE 43
44 Quand la vie se fait dure et la nature hostile. Quand l’équilibre est rompu et qu’il faut subir les aléas d’un climat moins clément et d’un milieu violenté par la main humaine. C’est le temps de pâtir des mauvais penchants de son environnement. Perdre l’équilibre et ne plus trouver de prise. Perdre ses biens, égarer ses repères, ses valeurs. Quand la plaine n’a plus rien à donner, tous ceux qui peuvent se mouvoir s’en vont. La vie végétale devient morne et sèche. Des temps de rigueur, où ceux qui restent souffrent physiquement d’un présent devenu trop rude, où ceux qui partent souffrent moralement de cette constante nostalgie d’avoir quitté leur plaine si généreuse en d’autres temps. L’avènement des phénomènes naturels est un sujet qui a encore quelques siècles de mystères ; en revanche, le massacre de l’environnement du fait de l’homme a, sur le fond, bien peu d’inconnues. Un désir de changer la nature, comme un sixième sens chez l’homme. Tant que les moyens dont il dispose sont limités, il agit à petite échelle et ménage un compromis entre lui-même et son environnement. Mais quand son outillage lui permet de mettre en pratique ses idées de puissance, il est capable d’oublier le respect de base qu’il doit à la nature et à son prochain. Ainsi, depuis quelques décennies, la plaine inondable a été sérieusement défiée, et par les cieux et par les hommes. Abandonnée au chaos du temps et aux lubies humaines, elle n’a pu se relever assez tôt pour en sortir indemne. Des sécheresses, on en a toujours connu dans la région. Il n’est pas une vie d’homme sans un souvenir de terre craquelée et de troupeaux faméliques. Des années de petites pluies et de faibles crues. Mais des sécheresses comme celles des années 1970 et 1980, ça non, jamais. Elles ont touché tout le Sahel, ont jauni et ridé la moitié de l’Afrique. Et puis, surtout, il y eut ce barrage. Le barrage de Maga, construit en 1979 pour faire de la culture du riz une activité intensive, encadrée, nationalisée, industrialisée, une culture de rente à inscrire sur les cartes et sur les fiches signalétiques des pays pauvres en voie d’accès au crédit des fonds et des banques qui abreuvent la planète. Pour cela, il fallait maîtriser précisément l’eau. Dompter la crue du Logone, et gérer au carré des périmètres de rizières, où l’effort du paysan serait relayé, décuplé par la force des engins et par les nouveaux génies, rural et civil. Un ouvrage fait à la va-vite, dans des conditions techniques et financières difficiles, sans concertation. Même au sommet régnait la confusion. Un manque d’analyse évident, pour un résultat tout à fait navrant : un déversoir qui ne fonctionne pas, une digue qui barre sans raison un bras du Logone, une retenue d’eau démesurée au vu de la faible exploitation de l’ouvrage, des surfaces de cultures et des rendements très audessous des prévisions négligemment annoncées aux gens concernés pour justifier à la volée expropriation et démantèlement social. Pour quelques tonnes de riz et quelques nouveaux riches, le barrage coûta à l’ensemble de la plaine inondable la perte quasi irrémédiable de son bien le plus précieux : l’eau. Le Logone ne pouvait plus déverser ses eaux là où elles étaient toujours allées : dans les canaux et dans les yaérés. Sans eau, plus de pâturage, plus de poisson, plus de culture. Une sécheresse d’un nouveau genre, dont personne ne peut expliquer la cause – si ce n’est par la négligence humaine – trente ans après la décision d’aménager les lieux. Cette initiative a marqué avec fracas le premier engagement de l’État dans la région. Car en fait, de cette contrée on ne se
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