Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
« »<br />
«<br />
U<br />
NIWADJI VIT<br />
ne concession comme une autre,<br />
clôture de seko, quelques cases en banco,<br />
d’autres en paille tressée. La différence<br />
est à l’entrée. Le drapeau national<br />
– en version délavée – nage au ralenti<br />
dans l’air du matin. La concession du chef,<br />
SANS SOUCI<br />
le tisserand à l’ouvrage qui provoquent<br />
immanquablement l’instinct photographique,<br />
la corvée d’eau ou encore les quelques étals du<br />
petit marché. Il a pu constater que, bizarrement,<br />
les étrangers se détournaient de ce qui, à<br />
ses yeux, fait la gloire du village : la moto neuve<br />
celle du lawan de Niwadji. Un vieil homme qui du fils d’un notable, la maison en dur avec<br />
sait cultiver le sens de l’accueil en déclinant ses tôles brillantes. L’histoire du village semble<br />
en dix langues les salamalecs de rigueur.<br />
intéresser les hôtes, mais là, il préfère donner<br />
À l’intérieur de la cour, adossé au majestueux la parole à son père. D’ailleurs, rien de terrible<br />
tamarinier, un jeune homme au visage angélique à raconter : pas de guerres, pas de héros, pas<br />
astique les chromes de sa monture : un vélo trop d’histoires, hormis celles que justement l’on<br />
que l’on croirait neuf, sa fortune, sa fierté, son ne peut pas divulguer. Maintenant, Goni n’hésite<br />
premier patrimoine.<br />
plus à débiter spontanément les récits de lions,<br />
d’hyènes et de serpents, succès assuré sans<br />
Goni l’a gagné grâce à sa mission de guide souci de nationalité. Pour l’instant, les touristes<br />
touristique villageois. De temps en temps,<br />
ont l’air contents de l’accueil et se montrent<br />
un groupe de touristes avertis fait escale à<br />
plutôt généreux en arrondissant largement les<br />
Niwadji : une halte d’une ou deux nuits que frais de séjour. Car il s’agit bien pour le village<br />
l’on goûte en temps réel au rythme d’un village. d’une opération génératrice de revenu selon<br />
Du tourisme artisanal et timide mis sur pied la terminologie en vigueur, d’une initiative<br />
par le hasard des rencontres. Au village, l’idée d’écotourisme », écologique pour les uns,<br />
n’a pas déplu, alors on s’est lancé. Le chef a<br />
concédé une parcelle jouxtant sa concession,<br />
économique pour les autres.<br />
on a élevé quelques cases et aménagé, avec La mère de Goni, deuxième femme du chef,<br />
le concours d’un étranger ingénieux, ce qui sort de sa case, déroule une natte aux reflets<br />
répond au critère de confort du touriste le moins encore verts, se plie en accordéon et s’attaque<br />
exigeant : une douche à l’abri des regards. aux finitions de ce qui tient lieu ici d’artisanat<br />
Pour l’instant, la fonction de Goni consiste<br />
principal : la natte en feuille de rônier tressé.<br />
à guider, accompagner et traduire. Il préfère Fandé est arrivée au village il y a une vingtaine<br />
répondre aux questions, aussi naïves soient- d’années. Ce n’est pas une fille de chef, mais<br />
elles, de ces tombés du ciel. Peu à peu, il repère elle était assez bien dotée : 50 000 F, deux<br />
les points les plus attractifs de son banal<br />
moutons, du savon, de l’huile, du chewing-gum,<br />
quotidien : les bébés nus et crasseux ceinturés de la kola, des assiettes et des draps. Fandé<br />
de perles qui hurlent de peur dans les bras ne sort pas souvent de Niwadji. Son rare temps<br />
cramoisis des étrangères, le forgeron ou<br />
libre, elle le consacre à sa maison, celle qui n’est<br />
83