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L’ARTILLERIE DE GENÈVE EN 1602 L’ARTILLERIE DE GENÈVE EN 1602<br />
Trois jours plus tard, à la batterie de la Cluse (104) , il ne reste plus aux <strong>Genevois</strong> que<br />
les double-mousquets pour riposter, toutes les pièces, dont la Coquille, étant<br />
éventées. Le 11, des renforts quittent Genève. On veut même amener le Soleil devant<br />
la Cluse, mais cela ne suffira pas. LURBIGNY, qui estime avoir à faire face à un<br />
ennemi toujours plus nombreux, décide d’abandonner ses positions et de quitter la<br />
Cluse et le château de Pierre, après avoir fait sauter les munitions. Ramenant tout de<br />
même l’artillerie que d’aucuns voulaient jeter dans le Rhône, l’armée genevoise<br />
arrive en ville dans la soirée du 11 mai 1590, laissant derrière elle le bailliage de<br />
Gex, lequel est, dès lors, mis à feu et à sang.<br />
Malgré cette honteuse défaite, - LURBIGNY n’avait pas vérifié l’état exact des<br />
forces ennemies et avait ordonné la retraite sans vérifier la véracité de ses<br />
informations -, les progrès faits par l’artillerie genevoise à cette période incitent alors<br />
Henry IV, en mai, à demander au Conseil de lui prêter, le temps d’une campagne<br />
difficile devant la ville française de Troyes, les deux chefs de l’artillerie de la ville.<br />
Le besoin de garder ces hommes s’avérant trop pressant pour la Seigneurie, celle-ci<br />
ne donne pourtant pas suite à la flatteuse demande du Roi.<br />
Enfin, le 25 juin 1590, Simon GOULART donne un aperçu de la ville, après plus<br />
d’une année de guerre. Celle-ci est «épuisée d’argent, vuidée d’hommes de guerre,<br />
desnuée de munitions de bouche et de guerre; n’ayant conseil ny force; pleine de<br />
gens qui ne sçavent ny obéir, ny commander; remplie de pauvres, de malades, de<br />
blessez, de familles désolées, de mendicité, de desfiance, de mescontentement, de<br />
murmures, de plaintes, de scandales et de péchez qui font craindre quelque grande<br />
mutation. Les voisins sont deschainez d’avarice, d’insolence, d’orgueil, de<br />
paillardise, de gourmandise et yvrognerie, de couardise, d’injustice et infinis<br />
malheurs. Tout cela nous menace de terribles tempestes».<br />
Pourtant, la lutte perdure et, avec toute l’énergie du désespoir, les <strong>Genevois</strong> se<br />
préparent à affronter les troupes d’Amédée, bâtard de SAVOIE, qui passent en grand<br />
nombre par la Cluse, au commencement de juillet. Le 7 juin, venues de Châtelaine<br />
et du Bouchet jusque sous les murs de Genève, celles-ci s’en prennent violemment<br />
à la ville. Repoussé parl’artillerie après un combat acharné, l’adversaire se retire non<br />
sans avoir occis plus de cent cinquante <strong>Genevois</strong>. Le lendemain, le bruit court que<br />
l’ennemi va revenir assiéger la ville avec force artillerie. Des bouches à feu sont<br />
alors mises en batterie sur les boulevards, et toute la matinée suivante est ainsi<br />
employée à traîner les pièces en position et à remplir tonneaux et gabions. On tire<br />
deux coups de canons, du côté de Rive, contre des cavaliers rivaux et trois coups en<br />
direction du fort d’Arve, près duquel une importante concentration de troupes<br />
adverses apparaît. Si l’ennemi se retire bien vite, diton, il demeure néanmoins aux<br />
alentours de Genève et met la campagne en coupe réglée.<br />
Les différents comptes-rendus nous signalent encore que le 14 juillet, entre seize et<br />
dix-huit coups sont tirés en direction de Varembé où un fort parti adverse s’approche,<br />
et que le 23, trois coups saluent encore la cavalerie ennemie, apparue entre Saconnex<br />
et Pregny (105) .Finalement, les exploits de l’artillerie s’espacent quelque peu, pour<br />
reprendre dès le 12 novembre 1590, quand Guillaume de CLUNY d’AUTUN, baron<br />
de CONFORGIEN, commandant des troupes genevoises depuis le 23 août précédent<br />
16 Le Brécaillon<br />
(106) , faisant le tour de Bonne afin de voir et considérer la place, se fait tirer dessus à<br />
coups de passe-volants. Cinq jours plus tard, les <strong>Genevois</strong> se présentent devant le<br />
château de Coudrée et s’en reviennent les mains vides. Les défenseurs refusent, en<br />
effet, de se rendre, ne se sentant pas mis en danger par les boulets des pièces<br />
d’artillerie légères de Genève, lesquelles tirent contre le château depuis les barques<br />
venue de la ville.<br />
Le 27 décembre 1590, moins d’une semaine après le retour dans les murs de la ville<br />
de HARLAY de SANCY, qui arrive, le 22, à la tête de nouvelles troupes, sur ordre<br />
d’Henry IV, le Conseil de guerre, en vue d’une sortie prévue le 31 pour aller battre<br />
Boringes, fait accommoder quelques pièces d’artillerie, apprêter des boulets,<br />
poudres, échelles, cordages, pieux, hottes et gabions, lever quelques pionniers et<br />
tirer hors de l’Arsenal le Soleil et deux des pièces gagnées à Versoix. Le dernier jour<br />
de l’année, toutes les troupes, soit environ 2’000 hommes, sortent de la ville.<br />
L’an 1591 débute alors bien mal pour les défenseurs de Boringes, qui, après avoir<br />
essuyé quelques bonnes salves d’artillerie, commencent à perdre courage,<br />
demandent à capituler, puis, s’éclipsant par un guichet non gardé, s’enfuient vers<br />
Bonne. Poursuivis par les <strong>Genevois</strong>, quelques-uns sont alors taillés en pièces.Le 1er<br />
février suivant, HARLAY de SANCY fait braquer cinq pièces d’artillerie contre les<br />
murs de Versoix, dont Charles- Emmanuel s’est emparé depuis peu. Le bourg,<br />
défendu par deux cent cinquante soldats, est pris au premier assaut. Cent septante<br />
défenseurs sont massacrés sur place et le fort, qui résiste malgré les cent coups de<br />
canons tirés, est miné et tombe le 6. Son gouverneur, COMPOIS, se rend à<br />
composition. Il quitte la place à la tête de ses hommes, pour lui et ses trois capitaines,<br />
l’épée et la dague au côté, pour les cinquante soldats survivants, - trente ont sauté en<br />
même temps que les mines -, sans armes et sans bagages.<br />
Dans les jours qui suivent, les troupes de la Seigneurie vont s’en prendre à Évian qui,<br />
après quelques salves d’artillerie, un assaut et des portes détruites au moyen de<br />
pétards, se rend sans compromission, allant même jusqu’à payer une rançon de<br />
2’000 écus d’or, afin que la soldatesque genevoise s’abstienne de bouter le feu à la<br />
ville. A la fin du mois de février, enfin, on traîne deux canons devant le château de<br />
Poulinge, sis non loin du pont de Boringes, lequel se rend aussitôt. Cependant, dès<br />
les premiers temps de 1591, le manque crucial d’argent empêche la Seigneurie<br />
d’enrôler des soldats. Ainsi, au début du mois de mars, il ne reste à la ville que<br />
quelques dizaines d’hommes d’infanterie et autant de chevaux. Fort heureusement<br />
pour elle, la dernière bataille importante de cette guerre, celle de Monthoux, qui se<br />
déroule le 12 mars 1591, sera soutenue par QUITRY, revenu à Genève au début de<br />
l’année, et HARLAY de SANCY, qui commande trois compagnies de cavaliers et un<br />
régiment de Suisses (107) .<br />
Par la suite, la République ne connaîtra que quelques alertes sporadiques. L’artillerie<br />
de Genève, quant à elle, n’est plus appelée à jouer contre les troupes du Chat et<br />
regagne ses abris, pour un repos aussi mérité que temporaire. Il semble, enfin, que la<br />
dernière utilisation d’artillerie, au cours de cette guerre, soit le fait du marquis de<br />
TREFFORT qui tente d’attaquer le fort d’Arve une ultime fois, le 15 juillet 1593 (108) .<br />
Ses deux petites pièces de campagne ayant à peine tiré plus d’une vingtaine de<br />
Le Brécaillon<br />
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