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1848: LA LÉGION HELVÉTIQUE ROMANDE 1848: LA LÉGION HELVÉTIQUE ROMANDE<br />
Sion adressent à Borgeaud pour lui demander de publier un article favorable aux<br />
légionnaires. Je reproduis leur lettre en respectant scrupuleusement leur texte et en<br />
renonçant à la tentation d’améliorer leur ponctuation. C’est le sentiment des<br />
volontaires anonymes qu’expriment leurs plumes:<br />
«Sion 17 mai 1848<br />
Monsieur Borgeaud major du génie à Lausanne<br />
Dans l’intérêt de notre petite troupe et pour notre honneur, étant persuadé de votre<br />
bon vouloir à notre égard nous nous permettons de vous prier de rédiger sur le<br />
Nouvelliste vaudois et la Gazette quelque chose qui aye rapport avec le sentiment ci<br />
dessous. Que le commandant Schaumberg par son activité et son art militaire a pu<br />
à son désir accomplir une seule tâche, celle de s’attirer l’amitié et l’estime de ses<br />
jeunes soldats qui partent pour la Lombardie enflammés du plus grand courage que<br />
l’on aye vu plusieurs d’entre eux se distinguent par leur goût militaire et leurs<br />
connaissances claires du patriotisme démocrate qui fait seul le vrai soldat dans le<br />
champ d’honneur au premier abord ils se sont formés en république où la<br />
souveraineté existe dans les mots, de là nous les avons vu chasser de leur corps les<br />
hommes qu’ils n’étaient pas dignes de porter les coeurs et les armes dans l’étranger,<br />
comme aussi d’autres lâches dont nous dirons les noms plus tard se sont permis de<br />
voler des convois et déserter plus tard mais notre harmonie n’en est que plus grande<br />
et nos sentiments plus heureux. Enfin honneur au courage et aux jeunes Helvétiens<br />
qui se distinguent par leur dévouement et qui soutiendront le nom suisse jusqu’à la<br />
mort. C’est dans ces termes, Monsieur, plus ou moins... chaleureux autant qu’il vous<br />
sera possible quand vous ferez dans notre départ pour le respect de ceux qui nous<br />
sont chers au pays. Pour la responsabilité de cette lettre sans que nos noms<br />
paraissent nous signons, ci dessous les sous officiers Samuel Bauschert, sergent<br />
major, Fd Schaumberg, sergent, Paul Boutay, sergent».<br />
Les événements se précipitent en Italie. La République lombarde se pose la question<br />
de son existence. Le gouvernement organise à ce sujet une consultation dont Aubin<br />
analyse les modalités dans une lettre rapport qu’il adresse à un conseiller anonyme<br />
qui pourrait être Delarageaz. Deux opinion s’opposent. Un parti préconise la fusion<br />
de la Lombardie avec les États sardes avec toutefois une réserve de taille «Toutefois<br />
sous condition du suffrage universel et qu’une assemblée constituante dans le pays<br />
susdits et dans tous les autres états qui adhéreraient à cette fusion soit convoquée,<br />
laquelle assemblée Constituante discutera les bases et la forme d’une nouvelle<br />
monarchie constitutionnelle avec la dynastie de Savoie.» Les opposants pensent<br />
simplement qu’il sera temps, après la victoire, de se poser la question. On sait ce<br />
qu’il en adviendra, le 29 mai la Lombardie indépendante cessera pour un temps<br />
d’exister et deviendra une province du royaume de Piémont Sardaigne.<br />
Pendant que se joue le sort de la Lombardie, les volontaires, moins nombreux sans<br />
doute que ne le souhaite le comité de Lausanne, se regroupent à Sion. Ils y vont en<br />
96 Le Brécaillon<br />
convoi organisé ou par leur propres moyens, comme le prouve ce billet adressé à<br />
Lecomte: «Monsieur, Le soir que vous m’avez inscrit pour les volontaires d’Italie,<br />
j’ai parlé aux personnes des conditions et garanties que vous offrez. Quelques uns<br />
iront dans peu se faire enregistrer chez vous, d’autres ont voulu faire le voyage<br />
immédiatement et attendre en Valais le premier convoi que vous enverrez, je suis du<br />
nombre de ces derniers avec François Louis Mouron de Chardonne, je devais faire<br />
un voyage en Valais pour mon commerce, il faudra même que j’aille à Brigue où<br />
nous attendrons le premier convoi, nous sommes armés. SVP une réponse par le<br />
retour du courrier pour savoir ce que nous avons à faire pour la jonction des<br />
troupes. Nous aimerions partir de suite. Agréez Monsieur mes biens cordiales<br />
salutations Votre dévoué O. Maillard, adressez poste restante à Brigue.»<br />
Voilà qui en dit long sur le désordre en Suisse en ce mois de mai 1848. L’Europe est<br />
en guerre, la Diète débat de l’avenir du pays et de sa future constitution mais le<br />
Directoire Fédéral peine à imposer les décisions de la Diète. Un groupe de citoyens<br />
brave publiquement l’autorité fédérale en recrutant à grand bruit des volontaires<br />
qu’on lui a interdit de lever et pour couronner le tout, des individus se baladent armés<br />
à travers le Valais pour vaquer à leurs affaires en attendant de se joindre au passage<br />
à l’expédition lombarde! Il y a de quoi inquiéter le gouvernement le plus paisible et<br />
agacer le chef le plus patient, or Hans Ulrich Ochsenbein n’est pas particulièrement<br />
patient. Il ne décolère pas et attaque violemment Eytel contre la politique<br />
interventionniste duquel les libéraux et les conservateurs vaudois font signer des<br />
pétitions à Morges et à Vevey. C’est dans cette ambiance agitée que l’on attend des<br />
nouvelles du premier détachement déjà à pied d’oeuvre en Italie. C’est la Gazette de<br />
Lausanne, l’organe des adversaires d’Eytel et de Druey qui publie les premières dans<br />
son numéro du 26 mai. Un de ses informateurs lui a signalé que les volontaires<br />
suisses, désoeuvrés, mendient leur pain dans les rues de Milan. L’information tombe<br />
au meilleur moment, Borgeaud s’apprête à partir pour Sion. Jules Eytel réagit au<br />
quart de tour. Il donne le 27 mai ses instructions à Lecomte: «Monsieur! Il faut<br />
démentir l’article de la Gazette de Lausanne de hier sur les volontaires. Je vous<br />
enverrai demain quelque chose sur cette question et quelques autres articles dont je<br />
vous recommande l’impression pour mardi. Saluez M. Borgeaud. Dites lui qu’il hâte<br />
son départ autant que possible. Il sera bon qu’il signe l’article que je vous<br />
transmettrai. Je vous salue cordialement. Samedi 27 mai 1848 Jules Eytel. PS Si<br />
vous apprenez quelque chose de la fameuse pétition de Morges contre moi, veillez<br />
m’en faire part. (74) »<br />
La contre-attaque s’organise d’autant plus facilement que Lecomte reçoit des<br />
munitions, Auguste Schaumberg, l’officier responsable «du camp de Sion» rentre<br />
opportunément à Lausanne. Il envoie tout aussitôt à la Gazette la mise au point<br />
suivante, que le Nouvelliste se fait une joie de reproduire: «A M. le Rédacteur de la<br />
Gazette de Lausanne. Je viens de lire dans le no 42 de votre honorable journal un<br />
article concernant les volontaires pour la Lombardie que je crois de mon devoir de<br />
rectifier.» Ceci posé, il ne nie pas qu’il y ait eu quelques problèmes, en rapport avec<br />
Le Brécaillon<br />
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