( Dossier22puisque seules les premières sont réduitesou supprimées par les effets demasque (Starr et al., 1991). Cettemanœuvre est un peu plus complexe àmettre en œuvre parce qu’elle impliqueune calibration soigneuse du masqueuret peut toujours, lorsqu’il est préservé,déclencher un réflexe stapédien qui varéduire l’intensité effective du stimulus.Enfin, lorsqu’il y a des raisons de suspecterune synaptopathie (histoire familiale,surdité profonde, disparition précoce desoto-émissions… voir chapitres IIIa et VI), ilpeut être intéressant de réduire le rythmede présentation du clic à 10, voire 5 Hz.Des observations préliminaires suggèrentqu’à ces rythmes sollicitant moins lessynapses, on puisse encore parvenir danscertains cas, à synchroniser suffisammentles potentiels d’action dans le nerfcochléaire que pour obtenir des PEAPabsents lors des stimluations aux rythmesusuels de 20 à 30 Hz (Starr et al., 2000).2POTENTIELSCORTICAUX DELONGUE LATENCEAlors qu’ils constituèrent un temps, avantl’essor de l’EcochG puis des PEAP, le seuloutil neurophysiologique d’audiométrieobjective, les potentiels « vertex » (Davis,1976) de longue <strong>la</strong>tence (N100-P200) ontpratiquement quitté <strong>la</strong> scène des applicationsaudiométriques, particulièrement enpédiatrie où leur sensibilité marquée àl’endormissement ainsi qu’à l’état attentionneldu sujet les rend bien peu pratiques.Ils continuent cependant à inspirerune recherche active dans le domaine de <strong>la</strong>perception de <strong>la</strong> parole (p.ex. Sharma et al.,2000 et 2005). En ce qui concerne <strong>la</strong>NA/DA, l’expérience accumulée par legroupe de l’Université de Melbourne enAustralie suggère qu’ils puissent servir àcatégoriser le degré de sévérité de <strong>la</strong> désynchronisationselon qu’ils sont ou nonpréservés (Rance et al., 2002). D’unemanière générale, plus on s’adresse à despotentiels évoqués issus de structures rostrales,plus ils bénéficient des effets desommation synaptique accumulés sur plusieursre<strong>la</strong>is synaptiques, les rendant d’autantplus tolérants à une désynchronisationinitiale qu’ils sont émis au bout d’unelongue succession de neurones, ce quiexplique que si <strong>la</strong> désynchronisation périphériquen’est pas trop importante (maisdéjà bien suffisante pour abolir les PEAP),les potentiels de longue <strong>la</strong>tence peuventpersister en l’absence de PEAP. Là où lesujet prend une tournure potentiellementintéressante par rapport à <strong>la</strong> remédiationde <strong>la</strong> NA/DA, c’est lorsque Rance et al.(2002) constatent une association entre <strong>la</strong>persistance des potentiels de longue<strong>la</strong>tence, interprétée comme le témoind’une atteinte re<strong>la</strong>tivement modérée de <strong>la</strong>synchronisation dans le nerf cochléaire, etle bénéfice d’une amplification conventionnelledans une popu<strong>la</strong>tion pédiatriqueatteinte de NA/DA. La persistance - ounon - des potentiels de longue <strong>la</strong>tencepourrait ainsi prédire les résultats d’uneaide prothétique conventionnelle qui lorsqu’ellese révèle efficace en NA/DA, paraîtl’être dans <strong>la</strong> même mesure, en terme descore d’identification phonétique, que chezdes enfants appariés porteurs d’une atteintecochléaire c<strong>la</strong>ssique (Rance et al., 2002).3POTENTIELSSTATIONNAIRESConnus en ang<strong>la</strong>is sous le terme deAuditory Steady-State Responses (ASSR),ils sont exploités d’une manière croissantedepuis quelques années grâce à l’arrivéesur le marché d’équipements cliniques permettantleur recueil et à une efflorescencede publications sous l’impulsion desgroupes australiens (p. ex. Rance et al.,1995) et canadiens (p. ex. Picton et al.,2003). Les ASSR diffèrent significativementde l’ensemble des potentiels évoqués ditstransitoires discutés jusqu’à présent parcequ’ils sont évoqués par des stimuli delongue durée, et correspondent à uneréponse à l’équilibre de groupes de neuronesentraînés par un stimulus stable aucours du temps. Ce stimulus consiste enune fréquence porteuse (<strong>la</strong> fréquenceaudiométrique à tester) modulée en amplitudeet / ou en fréquence à des rythmes dequelques dizaines à une centaine de Hz.Les ASSR reflètent <strong>la</strong> décharge synchronedes neurones auditifs accordés sur <strong>la</strong> fréquenceporteuse mais synchronisant leurdécharge sur <strong>la</strong> fréquence de modu<strong>la</strong>tion(Kuwada et al., 1986). Ils proviennent ducortex auditif et de l’étage mésencéphaliquedu tronc cérébral, cette dernièreorigine étant privilégiée dans les applicationspédiatriques parce que résistantbeaucoup mieux à l’endormissement(Herdman et al., 2002). Pour ce faire, il faututiliser des fréquences de modu<strong>la</strong>tionélevées (80-100 Hz). Reposant sur desstimuli de longue durée, ils possèdent,malgré l’é<strong>la</strong>rgissement spectral lié auxmodu<strong>la</strong>tions d’amplitude et de fréquence,une spécificité fréquentielle compétitivepar rapport aux bouffées tonales (Cone-Wesson et al., 2002) et bien évidemmentincomparablement meilleure que le clic.Les ASSR sont dégagés de toute contrainteliée à l’intégration temporelle ce quileur confère une dynamique de 120 dB,bien plus étendue que celles du clic ou desbouffées tonales (Rance et al., 1998). Bienque l’absence totale d’ASSR pour desstimuli supraliminaires ait été décrite dans<strong>la</strong> NA/DA (Picton et al., 1998; Rance et al.,1999), notre expérience indique plutôt <strong>la</strong>persistance fréquente des ASSR chez lessujets NA/DA aux PEATC abolis, mais avecun écart souvent important entre les seuilsprédits sur base électrophysiologique etles seuils comportementaux. Voici quiajoute une discordance supplémentaireentre les résultats des divers examensdans <strong>la</strong> NA/DA, décidément une caractéristiquemajeure de cette entité.Les Cahiers de l’Audition - Vol. 20 - n°6 - Novembre/Décembre 2007
Dossier )Les figures 4 et 5 illustrent les discordancesobservées entre les seuils prédits à partirdes ASSR et les seuils comportementauxdans deux cas récents de NA/DA, l’un avecpréservation des OEAP, l’autre sans. Dansun cas comme dans l’autre, les seuilsélectrophysiologiques surestiment les seuilscomportementaux dans les basses fréquen-ces, et pour l’enfant plus âgé, sous-estiment<strong>la</strong> perte <strong>auditive</strong> à 2 et 4 kHz !La comparaison entre les figures 4 et 5illustre aussi <strong>la</strong> variabilité de morphologiedu PM : d’amplitude et durée augmentéesdans le cas illustré par <strong>la</strong> figure 4, il estnormal dans le cas de <strong>la</strong> figure 5.(FIGURES 4 et 5)4CONCLUSIONSAu prix d’adaptations méthodologiquesmineures en termes de ressources matérielles,mais qui exigent une applicationrigoureuse et systématique de quelquesprincipes, le diagnostic de NA/DA peutêtre réalisé sans difficulté, sur base de <strong>la</strong>mise en évidence de <strong>la</strong> persistance d’unPMC paradoxal, lors de tout examen PEAPde routine.Les potentiels stationnaires ne peuventêtre utilisés pour évaluer les seuils comportementauxmais ils contribuentsouvent à enrichir le tableau électrophysiologiqued’une discordance supplémentaire.Les potentiels corticaux delongue <strong>la</strong>tence pourraient, lorsqu’ils sontpréservés, indiquer un moindre degré dedésynchronisation et être associés à unpronostic favorable quant au succès d’uneamplification conventionnelle chez lesenfants.23Figure 4 : données issues de l’oreille droite d’un enfant de 2,5 ans. (a) Les PEATC sontréduits à un robuste PM inversant sa po<strong>la</strong>rité avec celle du clic (tracés R et C superposésà chaque niveau d’intensité). (b) Les OEAP au clic sont préservées. (c) Comparaison entreles seuils comportementaux et électrophysiologiques : O = seuils comportementaux,ASSR = seuils électrophysiologiques ; Est = seuils comportementaux prédits à partir desseuils électrophysiologiques.RÉFÉRENCESBerlin CI, Bordelon J, St John P,Wilensky D, Hurley A, Kluka A, HoodLJ - Reversing click po<strong>la</strong>rity may uncoverauditory neuropathy in infants. Ear Hear1998;19:37-47.Berlin CI, Morlet T, Hood LJ - Auditoryneuropathy/dyssynchrony: its many formsand outcomes - Semin Hear 2002;23:209-214Figure 5 : données issues de l’oreille gauche d’un enfant de 7,5 ans avec PM préservémais sans OEAP enregistrables. (a) PEATC limités à un PM inversant sa po<strong>la</strong>rité entre Ret C. (b) Comparaison entre les seuils comportementaux et électrophysiologiques : X =seuils comportementaux, ASSR = seuils électrophysiologiques ; Est = seuils comportementauxprédits à partir des seuils électrophysiologiques.Coats AC, Martin JL - Human auditorynerve action potentials and brain stemevoked responses - Arch Oto<strong>la</strong>ryngol1977;103:605-622.Cone-Wesson B, Dowell RC, TomlinD, Rance G, Ming WJ - The auditoryLes Cahiers de l’Audition - Vol. 20 - n°6 - Novembre/Décembre 2007