( DossierCHAPITRE IIIA :APPROCHE CLINIQUE DES NEUROPATHIESAUDITIVES CHEZ L’ENFANT26N. LOUNDONService d’O.R.L. etde chirurgie de <strong>la</strong> faceet du couHôpital d’EnfantsArmand Trousseau,26 avenue du DocteurArnold Netter,75571, Paris, France.Tel: + 33 1 44 73 54 17Fax: + 33 1 44 73 61 08.Mail :secretariat.loundon@trs.aphp.frRÉSUMÉ/ENGLISHSUMMARYLe diagnostic de Neuropathie Auditive/Désynchronisation Auditive repose sur unfaisceau d’arguments, et plus particulièrement<strong>la</strong> discordance entre les différentstests. Chez l’enfant les facteurs de risquesreconnus sont les antécédents néonataux,les atteintes neurologiques centrales et les<strong>neuropathie</strong>s héréditaires. Dans un quartdes cas les Neuropathies Auditives /Désynchronisations Auditives sont observéesen dehors de tout contexte particulier.Cliniquement <strong>la</strong> surdité est de sévéritévariable, <strong>la</strong> courbe audiométrique est engénéral p<strong>la</strong>te ou ascendante sur les aigus.On peut observer des fluctuations <strong>auditive</strong>savec des améliorations de seuils dans lespremières années de vie. Les scoresobtenus aux tests perceptifs sont inférieursà ceux attendus par rapport aux courbestonales. Les oto-émissions acoustiques sontconservées, les seuils retrouvés aux potentielsévoqués auditifs sont discordants parrapport à <strong>la</strong> tonale et l’aspect du traind’onde apparaît modifié. Le bi<strong>la</strong>n complémentairecomprend entre autre une imageriede l’encéphale et de l’oreille interne, unexamen neurologique et un bi<strong>la</strong>n génétique.L’appareil<strong>la</strong>ge peut être difficile à mettre enp<strong>la</strong>ce. L’intelligibilité avec prothèse est c<strong>la</strong>ssiquementeffondrée, fluctuante et discordanteavec le seuil obtenu en tonal et restefréquemment moins bonne que dans le casde surdités endocochléaires à seuilséquivalents. En cas de surdité sévère ouprofonde bi<strong>la</strong>térale une imp<strong>la</strong>ntationcochléaire peut être indiquée.The diagnosis of Auditory Neuropathy/Auditory Dys-synchrony relies on a bundleof clinical and electrophysiological observations,and more specifically on the discordancebetween different tests. In childrenthe risks factors are : perinatal pathology,neurological seque<strong>la</strong>e and hereditary <strong>neuropathie</strong>s.In a quarter of the cases no medicalhistory is noted.The severity of deafness isvariable and can be fluctuating.The perceptivescores are not re<strong>la</strong>ted to the toneaverage.The otoacoustic emissions are preserved,the Auditory Brainstem Responsecurves are discordant with the toneaverage, and the dys-synchrony can be observed.For the etiologic research, MRI of thecentral nervous system and the internal ear,neurological examination and genetic adviceare needed.The fitting of the hearing aid canbe difficult and the results remain fluctuating.In case of severe and profound deafnesscochlear imp<strong>la</strong>nt can be discussed.1INTRODUCTIONLe terme de Neuropathie Auditive /Désynchronisation Auditive (NA/DA) estutilisé en cas de troubles de l’auditionrépondant à <strong>la</strong> définition opérationnellerappelée au chapitre I, que l’anomalie fonctionnelleporte sur les Cellules CiliéesInternes (CCI), le nerf cochléaire ou <strong>la</strong>synapse entre ces deux structures. Lecaractère mixte de cette dénominationcontribue à rappeler que le tableau définipar le résultat des tests physiologiquesn’est pas systématiquement dû à uneauthentique <strong>neuropathie</strong> puisqu’il peutrésulter d’un trouble de <strong>la</strong> synchronisationLes Cahiers de l’Audition - Vol. 20 - n°6 - Novembre/Décembre 2007
Dossier )secondaire à une atteinte des CCI ou de <strong>la</strong>synapse. En outre, comme rappelé dans lechapitre de X. Perrot à paraître dans lenuméro suivant, l’altération de <strong>la</strong> représentationtemporelle des stimuli peut s’expliquerautant par une réduction du nombred’afférences (CCI ou fibres du nerfcochléaire) que par une désynchronisation.On peut donc s’attendre à une évolutionde <strong>la</strong> terminologie, qui gagnera en précisionlorsque nous serons capables de distinguerles cas qui résultent d’une atteintesélective des CCI ou d’une synaptopathiede ceux qui relèvent d’une atteinte du nerf,soit par désynchronisation, soit par réductiondu nombre d’afférents. Enfin, il nousparaît judicieux d’insister sur le fait que lesobservations actuellement accumulées surles cas de synaptopathie à l’otoferline suggèrentque bien que répondant à <strong>la</strong> définitionopérationelle actuelle de <strong>la</strong> NA/DA, cesenfants ne se comportent pas différement,tant sur le p<strong>la</strong>n symptomatologique que desrésultats de <strong>la</strong> prise en charge, des cas desurdité endocochléaire profonde c<strong>la</strong>ssique.Donc, selon <strong>la</strong> localisation et <strong>la</strong> cause del’atteinte, les profils cliniques diffèrent. Lenombre exact d’enfants concernés est difficileà chiffrer. La fréquence de <strong>la</strong> NA/DA estsans doute sous-estimée en raison de <strong>la</strong>méconnaissance des signes cliniques ou pardéfaut de systématisation des tests objectifs.Une meilleure connaissance des élémentscliniques et électrophysiologiques quicaractérisent cette pathologie permettra àl’avenir de mieux quantifier le profil évolutifdes NA/DA en particulier chez l’enfant.2SURDITÉ DEL’ENFANT:PREMIÈREAPPROCHE ETEXAMEN AUDITIFAvant tout examen audiométrique l’anamnèsesoigneuse de l’histoire de l’enfant doitêtre obtenue, recherchant des facteurs derisques de surdité et des pathologies dudéveloppement. L’examen auditif débutepar un test subjectif même chez le toutpetit, complété le plus souvent par destests objectifs. Il n’est pas raisonnable defaire reposer un diagnostic de surdité surle résultat d’un examen objectif isolé. Lediagnostic de surdité nécessite l’obtentiond’un faisceau d’arguments cohérents avecles constatations cliniques et quotidiennes.Chez l’enfant présentant une surdité deperception, l’atteinte endocochléaire c<strong>la</strong>ssique,comprenant toujours une atteintedes Cellules Ciliées Externes (CCE) et uneproportion variable, non obligatoire, d’atteintedes CCI, est de loin <strong>la</strong> plus fréquenteet dans ce cas on obtient une concordanceentre les différentes observations.C’est donc lorsqu’ il existe des discordancesentre seuils subjectifs et objectifs etentre différents tests objectifs qu’il fautsavoir s’interroger sur l’éventualité d’uneNA/DA.1- L’audiométrie subjectiveL’audiométrie tonaleDiverses méthodes sont utilisées selon l’âgede l’enfant en sachant bien qu’il s’agit de tranchesd’âge approximativement délimitées etcorrespondant plus au développement réelde l’enfant qu’à son âge chronologique.Le grand enfant de 5 ans et plusLa technique audiométrique est <strong>la</strong> mêmeque pour l’adulte le plus souvent, avecnécessité parfois de soutenir l’attention del’enfant par de petits moyens (par exemple :points à gagner, bouton factice à presser...).L’enfant de 30 à 60 moisLes principes de l’audiométrie tonale c<strong>la</strong>ssiquerestent va<strong>la</strong>bles mais les réponses del’enfant doivent s’intégrer à un jeu et sontobtenues après un temps de conditionnement.Celui-ci est parfois difficile à obtenirmais, une fois acquis, il est le plus souventrobuste et durable permettant ainsi detracer une courbe audiométrique tout àfait fiable. Le plus souvent un examencomplet est possible en ConductionOsseuse (CO) et en Conduction Aérienne(CA) au casque.Le jeune enfant de 6 à 30 moisLe conditionnement est possible en sebasant sur le réflexe d’orientation-investigationqui apparaît vers l’âge de 6 mois. Lemouvement d’orientation vers <strong>la</strong> sourcesonore est <strong>la</strong> preuve de <strong>la</strong> bonne perceptiondu son. Parfois seuls des signes plusténus sont observables, tels <strong>la</strong> suspensionde l’activité en cours, l’arrêt de <strong>la</strong> succion,le clignement ou l’ouverture des yeux...L’intensité au-dessous de <strong>la</strong>quelle l’enfantne réagit pas permet de déterminer lesseuils et de tracer une courbe en CO et enCA au casque ou en champ libre.Le nourrisson au-dessous de 6 moisL’observation des modifications comportementaleset muscu<strong>la</strong>ires (sursaut, mouvementsdes mains et des pieds, suspensiond’activité, arrêt ou reprise de <strong>la</strong>succion, clignement palpébral, etc...),permet de tracer des éléments de courbe<strong>auditive</strong> en champ libre, au casque et/ou auvibrateur.Ces méthodes ont leurs limites :- L’absence de coopération ou l’agitationd’un enfant peut compromettre l’examen.- Le casque est parfois mal accepté.- Toute réponse positive synchrone etrépétée pour le même stimulus affirme <strong>la</strong>perception, par contre l’absence deréponse ne peut être interprétée commeune absence de perception que si l’on estcertain que le conditionnement restefermement établi.- Il existe une marge entre les seuils réelset les seuils observés selon l’âge : 10 -15dB vers 3 ans, 20-25 dB vers 2 ans, et 30-35 dB avant 1 an [De<strong>la</strong>roche et al. 2006].C’est l’expérience de l’opérateur quipermet d’apprécier <strong>la</strong> fiabilité de <strong>la</strong> courbeobtenue, indispensable à tout diagnostic.L’audiométrie vocaleL’audiométrie vocale n’est possible que sil’enfant a acquis un minimum de <strong>la</strong>ngage,c’est-à-dire après 18 mois - 2 ans aumieux. Elle se base sur <strong>la</strong> désignation d’imagesou pour les plus âgés sur <strong>la</strong> répétitionde mots. L’épreuve peut se réaliserdans le silence et dans le bruit. Les résultatssont à interpréter non seulement entenant compte du seuil auditif tonal maisaussi du niveau linguistique et des difficultésde prononciation (Daubech et al.2005).27Les Cahiers de l’Audition - Vol. 20 - n°6 - Novembre/Décembre 2007