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J'ai mang l'innocence - elgweb.com

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" J’ai <strong>mang</strong>é l’innocence "<br />

(Erwan Le Goffic)<br />

— LEUR JOURNÉE VA ETRE LONGUE !<br />

— OUAAAAAAIIIIISSSSS !<br />

— LES BIZUTS VONT MORFLER !<br />

— OUAIS !!! OUAIS !!! OUAIS !!! OUAIS !!!<br />

— ALORS ? VOUS AVEZ PEUR LES BIZUTS ?<br />

D’un coup le silence, mêlé à quelques gloussements de bizuteurs. Le meneur<br />

de groupe laissa un peu de temps passer… maîtrisant son effet… avant de<br />

continuer :<br />

— BON ! On va être sympa, on ne veut pas vous forcer, les bizuts. Alors je<br />

vais vous le proposer UNE fois et UNE SEULE, et après on en parlera plus !<br />

Donc voilà : S’il y en a qui veulent s’en aller, qu’ils le fassent maintenant !<br />

Mes pensées se sont alors emmêlées : J’avais envie de partir, de fuir…<br />

mais… si… si c’était un piège ? Je trépignais à l’idée de m’enfuir, certes, mais je<br />

me suis retenu, j’ai plutôt regardé autour de moi, cherchant d’abord à voir si<br />

quelqu’un allait décider ou non de s’en aller. Beaucoup avaient dû avoir la même<br />

pensée car nous étions tous à nous observer les uns les autres, certains se<br />

retournant pour mieux apercevoir la réaction de ceux assis plus haut.<br />

Un murmure d’indécision ronronna dans l’amphi.<br />

Puis, un bruit de chaise, et tous les regards ont convergé : À mi-hauteur, du<br />

côté opposé de celui où je me trouvais, un des nôtres s’était levé, l’air très<br />

intimidé, n’osant à peine décoller le regard du sol. Il est resté ainsi quelques<br />

secondes, sans bouger. Puis lentement, il a quitté sa place, la démarche bien<br />

mal assurée. Pas après pas, doucement (honteusement ?), il a gravi les<br />

escaliers de l’amphi vers les portes du haut. Tous les regards étaient braqués<br />

sur lui, les têtes tournaient toutes en même temps, <strong>com</strong>me dans un match de<br />

tennis. Puis certains (Guillaume inclus d’ailleurs), sûrement rassurés de voir<br />

qu’ils le laissaient partir, se sont levés à leur tour. C’est là qu’on a entendu<br />

derrière nous le chef des bizuteurs reprendre la parole :<br />

— Hé ? mon gars ? tu pourrais au moins nous dire au revoir avant de partir ?<br />

Le « gars » en question n’était plus qu’à quelques pas de la sortie.<br />

Il s’est arrêté net.<br />

Il faut dire que des secondes années qui n’avaient pas trouvé de place dans<br />

l’amphi s’étaient installés contre le mur du fond. Ils ont bougé pour lui barrer le<br />

passage vers les portes de sortie. L’élève, maintenant bloqué, a fini par se<br />

retourner… J’ai pu alors observer son visage : la bouche mi-ouverte, les sourcils<br />

relevés, un mélange de supplication et de peur. Il regardait vaguement devant<br />

lui, les bras ballants, résigné.<br />

— Allez, viens me rejoindre devant nos amis pour leur dire au revoir avant de<br />

partir !<br />

L’élève, tétanisé, ne bougeait plus. Notre bourreau à tous, droit <strong>com</strong>me un<br />

« i » sur son estrade, le fusillait du regard.<br />

Finalement, pour se moquer, il a repris sur un ton tout mièvre :<br />

— Oh… ben… on a peur ? mais non ! il ne faut pas ! C’est si tu ne viens pas<br />

là devant avec moi que tu devras avoir peur…<br />

Puis il a ménagé un petit temps de silence avant de beugler, l’air réjoui.<br />

— CAR DANS CE CAS ON VA TOUS TE BOTTER LE CUL !<br />

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