26.06.2013 Views

J'ai mang l'innocence - elgweb.com

J'ai mang l'innocence - elgweb.com

J'ai mang l'innocence - elgweb.com

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

" J’ai <strong>mang</strong>é l’innocence "<br />

(Erwan Le Goffic)<br />

J’étais donc vraiment content de revenir sur Nantes : Au moins ici j’étais<br />

tranquille, seul, sans personne pour me juger vingt-quatre heures sur vingtquatre…<br />

Finalement je trouvais pénible de vivre en famille ou à plusieurs, c’est<br />

vrai, jamais on ne peut se sentir tranquille, jamais on ne peut juste être soi sans<br />

réfléchir à ce qu’on dit ou fait. Non, il y a toujours quelqu’un autour de vous qui<br />

vous juge, toujours quelqu’un prêt à vous faire des remarques au moindre écart<br />

de <strong>com</strong>portement, d’idées, de parole… Si l’enfer c’est les autres, ça l’est d’autant<br />

plus quand il s’agit de la famille.<br />

Sinon je pensais à Christophe, souvent, terriblement : Christophe c’était<br />

<strong>com</strong>me un superbe gâteau qu’on m’avait mis sous le nez alors que j’étais en<br />

train de crever de faim, et à peine avais-je eu le temps de le voir qu’on me<br />

l’enlevait d’un coup pour me dire « on te le ramène dans deux mois ». Alors<br />

pendant deux mois je pensais au gâteau, j’y pensais tout le temps, il obnubilait<br />

mes pensées, ses formes me hantaient et je fantasmais sur le moment à venir<br />

où j’allais pouvoir le <strong>mang</strong>er. Je me voyais des fois en train de le goûter<br />

précieusement, de l’apprécier, et d’autres fois en train de réellement me bâfrer.<br />

Bref, arrêtons là la métaphore : Veuf poignet ne manquait pas d’occupation.<br />

Et vous vous demandez peut-être pourquoi je n’allais pas « me soulager »<br />

dans le milieu (milieu gay, il va de soi, vous l’aurez <strong>com</strong>pris) ? J’y pensais en<br />

effet, mais à chaque fois avant d’y aller j’hésitais, je tergiversais, je fumais clope<br />

sur clope, n’arrivant pas à déterminer si je souhaitais réellement m’y rendre…<br />

Alors je repensais à ce qui me manquait vraiment, et inévitablement me revenait<br />

ce moment magique que j’avais passé avec le vieux qui m’avait abordé au<br />

parc… Non, pas quand je l’avais cogné ! Je n’en étais quand même pas là...<br />

Mais plutôt quand lui et moi étions enlacés dans les bras l’un de l’autre, bouche<br />

contre bouche, que je sentais son corps tout contre le mien, ses bras, ses mains<br />

qui me caressaient... Ce moment, c’était lui qui me hantait, c’était ce moment<br />

que je me remémorais en boucle quand je me faisais un petit plaisir solitaire<br />

(bien sûr dans mon cinéma intérieur, je remplaçais le vieux par Christophe). Le<br />

problème, c’est que dans le milieu, je doutais fortement que je puisse retrouver<br />

cette sensualité, ce contact des corps que je recherchais tant. Et plus j’y pensais,<br />

plus je doutais, et moins j’avais envie d’aller y voir. Rajoutez là-dessus mon<br />

tabassage à l’automne passé, et vous <strong>com</strong>prendrez pourquoi je restais<br />

finalement à chaque fois chez moi.<br />

Et tout ça nous amène finalement à la pharmacie, car en dehors d’aller bosser<br />

aux cuisines du mac-do, qu’est ce que je pouvais m’emmerder ! J’avais donc du<br />

temps à revendre pour préparer ma vengeance, et disons que c’était un moyen<br />

<strong>com</strong>me un autre de passer le temps. Déjà avant de déménager, j’avais en tête<br />

de leur faire un petit cadeau de départ, alors pour m’en donner les moyens,<br />

j’étais allé à l’époque dans un « clef minute » près de la gare. J’étais reparti du<br />

magasin avec un deuxième exemplaire de la clef de ma porte d’entrée : Comme<br />

ils ne fermaient jamais la porte qui <strong>com</strong>muniquait de chez moi à leur cour<br />

intérieure, je pouvais, grâce à cette clef, entrer chez eux <strong>com</strong>me je le voulais.<br />

Et ce que je voulais, c’était Trébor : leur chien-chien, leur saleté de Yorkshire<br />

aussi puant et bruyant que ses maîtres. Je <strong>com</strong>ptais m’introduire chez eux de<br />

167

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!