J'ai mang l'innocence - elgweb.com
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" J’ai <strong>mang</strong>é l’innocence "<br />
(Erwan Le Goffic)<br />
Je n’osais plus rien dire, je n’osais plus rien faire, j’avais peur de prononcer<br />
des mots qui me trahiraient d’avantage, j’avais peur des réactions qu’il allait<br />
avoir, j’avais peur de ses questions à venir. Je me suis donc tu, et j’ai attendu…<br />
C’était plus prudent.<br />
C’est donc lui qui a fini par dire :<br />
— Mais… mais… alors quand je t’avais demandé, sur la plage, à la Baule…<br />
— Ben… je ne voulais pas te le dire… je n’osais pas.<br />
— Mais… et… ça fait longtemps que tu le trouve… enfin… heu…<br />
— Attirant ?<br />
— Oui.<br />
— Ben… depuis que je l’ai vu.<br />
— Ah… quand même…<br />
Il est clair que je ne maîtrisais plus grand-chose, mon avenir devenait<br />
<strong>com</strong>plètement dépendant de <strong>com</strong>ment Frank allait réagir, de ce qu’il allait dire,<br />
de ce dont il allait se rendre <strong>com</strong>pte, ou pas, dans les minutes à venir. Alors je<br />
me préparais, j’essayais de garder mon calme afin de réagir au mieux à sa<br />
prochaine question ou réaction… Il fallait croire que j’espérais pouvoir me tirer de<br />
tout ça juste en m’expliquant.<br />
— Mais, je croyais qu’il aimait les filles ?<br />
Bonne remarque de sa part, très bonne remarque… Alors quoi répondre à<br />
ça ? : « En effet, tu as raison Frank, et c’est pour ça que je le drogue pour<br />
pouvoir en faire ce que je veux ». Ce n’aurait pas été très judicieux de ma part de<br />
sortir ça… Non, j’ai répondu en donnant la réponse, enfin plutôt le mensonge qui<br />
m’a semblé le plus évident :<br />
— Ben je crois bien qu’il est bi.<br />
— Hmm… hmm…<br />
Frank m’a semblé très circonspect. Il s’est tu pendant un assez long<br />
moment… Et alors que j’allais sortir une phrase, n’importe laquelle pourvu que<br />
cela tue le silence qui s’installait, il s’est remis à parler… et il est revenu à la<br />
charge sur le point qui faisait mal :<br />
— Mais alors, dis-moi pourquoi il dort <strong>com</strong>me ça mon frère ?<br />
Rien à faire, je ne pouvais pas lui échapper. Je me sentais vraiment pris au<br />
piège, ça me semblait de plus en plus improbable de pouvoir m’en tirer.<br />
— Heu, eh bien il était malade ce soir.<br />
— Ah bon ?<br />
— Heu… oui.<br />
— Mais pourquoi tu n’as pas appelé un docteur alors ?<br />
Mais c’était dingue ! il n’allait jamais me lâcher ! Excédé, cédant à la pression,<br />
j’ai fini par me relâcher un peu.<br />
— Ben écoute, je n’y ai pas pensé, voilà tout !<br />
— Non mais t’as vu dans quel état il est ? il ne réagit pas !<br />
Et sur ce, sans attendre de réponse de ma part, il s’est retourné vers son<br />
frère, l’a saisi de nouveau par les épaules et l’a remué <strong>com</strong>me un prunier.<br />
— Christophe ? HÉ CHRISTOPHE !<br />
Celui-ci n’a réagi à peine plus qu‘avant. Frank, a alors posé la main sur son<br />
front, attendit un instant, puis se retourna finalement vers moi, en colère.<br />
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