J'ai mang l'innocence - elgweb.com

" J’ai mangé l’innocence "
(Erwan Le Goffic)
puissent tenir dedans. J’ai fouillé encore et dénichai le pot de rillettes ainsi que
les tranches de jambon dans leur emballage plastique. J’ai posé le tout sur la
table… Je faisais tout ça machinalement, sans même y réfléchir…
Il faut dire que j’en tremblai :
Les images de Christophe en caleçon tournaient en boucle dans ma tête, un
cinéma excitant, mais angoissant : ça ne voulait pas s’arrêter. J’ai dû faire une
petite pause pour essayer de me ressaisir un peu, de penser à autre chose. Mais
même si j’ai fini par calmer quelque peu le tourbillon des images qui m’obsédait,
ça n’a laissé que plus de place pour toute une batterie de questions sans
réponses qui surgirent alors dans ma tête : Pouvait-il avoir fait exprès de se
retrouver en caleçon devant moi ? Y avait-il un message caché dans tout cela ?
Avait-il remarqué que je le matais comme un dingue (même si j’avais essayé de
garder discret mes coups d’œil) ? Et puis s’il voulait me dire quelque chose,
peut-être hésitait-il à me dire que… que quoi ? que je lui plaisais ?… Peut-être
pas, ou peut-être bien…
Je trouvai dans leur frigo une plaquette de beurre, je dégottai un couteau dans
un tiroir. J’avais tout et je pouvais commencer.
Pendant les cinq minutes que j’ai passées à faire les sandwichs, j’étais
complètement ailleurs, à remuer, à chercher sous chaque souvenir des indices
qui pouvaient m’indiquer si oui ou non j’avais mes chances… J’alternais sans
discontinuer de la joie au doute profond. Le dernier sandwich terminé, je conclus
finalement en me disant, une nouvelle fois, qu’avant de devenir dingue à force
d’y penser, il était urgent que j’en aie le cœur net.
Ça tombait bien, j’allais avoir toute la journée pour lui tirer les vers du nez.
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