J'ai mang l'innocence - elgweb.com

" J’ai mangé l’innocence "
(Erwan Le Goffic)
silence régnait toujours. J’ai fini par refermer la porte derrière moi et j’ai allumé
ma lampe. J’y étais… Il fallait maintenant trouver le toutou débile.
C’était une maison de vieux, je dis ça parce qu’il y avait des meubles et des
bibelots partout, le genre de chose caractéristique de ceux qui ont la vie
d’avantage derrière eux que devant : Souvenirs accumulés, exposés un peu
partout dans chaque pièce, et qui feront sans nul doute l’embarras de leur
progéniture le jour où ils viendront à disparaître. Quant à moi, il fallait que je
fasse gaffe à ne rien faire tomber, le dessus des meubles étant couvert de
cadres et de tout un patacaisse de petits objets : Autant de choses qu’un geste
de trop pouvait faire tomber et trahir ma présence.
Bon, où était-il ce maudit clébard ? Je pensais le trouver dans la cuisine, mais
le halo de ma lampe torche n’a rien découvert. Dans le salon, rien non plus,
même si pour cette pièce je ne m’aventurai pas à l’intérieur et restai à l’entrée : le
sol était en parquet et si je marchais dessus, les grincements pouvaient alerter
les proprios. Maintenant j’avais un problème : il restait encore deux portes au
rez-de-chaussée, mais elles étaient fermées, et je n’avais aucune idée de ce qu’il
pouvait se trouver derrière, aussi vite j’allais tomber sur la chambre des proprios
et je n’en savais rien. Je commençais à gamberger sur tout ça, quand j’ai
entendu un bruit à l’étage.
« Poum Poum » : Le son m’a fait sursauter, et le rayon de ma lampe torche
est allé pendant un bref instant balayer le plafond. Mon cœur et ma respiration
se sont accélérés, et je n’allais pas avoir l’occasion d’être serin de suite, car s’en
est suivi plein de petits « poum » à l’étage… J’ai reconnu les bruits des pattes du
chien. Il ne dormait donc pas au rez-de-chaussée et j’avais dû faire assez de
bruit pour le réveiller. Le problème était que dans ce cas, dans tout au plus une
dizaine de secondes, il allait être en bas de l’escalier et allait aboyer comme un
fou en me voyant. J’avais prévu une escalope pour calmer l’animal… eh bien il
n’y avait plus qu’à espérer que ça fonctionne : J’ai donc pris l’escalope de ma
poche, l’ai sortie du sac, et l’ai posée en bas des marches alors que j’entendais
le chien commencer à descendre l’escalier. J’ai juste eu le temps de me cacher
dans la cuisine, mais il s’en est fallu sûrement d’un rien pour qu’il ne
m’aperçoive. J’avais l’air fin comme ça, planqué dans la cuisine, complètement
paniqué à craindre qu’une saleté de Yorkshire ne me trouve et ne m’aboie
dessus. En tout cas, mon escalope a eu l’air de faire son effet puisque j’ai pu
entendre la chose s’arrêter en bas de l’escalier, et que s’en sont suivi des bruits
de mâchonnement. Au moins le coup de la viande marchait, surtout que comme
je ne l’avais pas coupée en morceau, il allait avoir sacrément du boulot pour
bouffer tout ça.
J’essayai de me calmer. Caché et immobile derrière l’encadrement de la porte
de la cuisine, j’appréhendais que Trébor puisse arrêter de bouffer son escalope
pour venir me débusquer et m’aboyer dessus. Il fallait que je réfléchisse : À la
base, initialement, j’avais prévu d’attaquer l’animal pendant son sommeil, par
surprise. Je n’avais pas pensé qu’il dormirait à l’étage, mais plutôt par exemple
dans un panier à la cuisine. Il devait sûrement passer la nuit sur le lit de ses
maîtres, quel beau tableau ils devaient faire tous les trois ! En tout cas
maintenant c’était cuit pour l’effet de surprise, heureusement que j’avais prévu de
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