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J'ai mang l'innocence - elgweb.com

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" J’ai <strong>mang</strong>é l’innocence "<br />

(Erwan Le Goffic)<br />

toujours pas arrivé à la maison et n’avait pas donné de nouvelles, c’était donc<br />

sûrement eux qui venaient d’appeler.<br />

« Pourquoi n’ont-ils pas appelé avant ? » me suis-je alors demandé. La<br />

réponse était évidente : Le fil du téléphone était pris pour faire autre chose…<br />

Alors ils avaient sûrement appelé avant ? mais <strong>com</strong>bien de fois ? J’avais<br />

débranché le fil du téléphone vers dix heures et demie… ça pouvait faire deux<br />

heures qu’ils appelaient <strong>com</strong>me ça.<br />

Le désarroi, la peur… puis la panique sont successivement venus me prendre<br />

en otage, car si ça faisait bien deux heures qu’ils appelaient et n’obtenaient<br />

aucune réponse, alors que Christophe au moins aurait dû répondre, ils devaient<br />

être en train de <strong>com</strong>plètement paniquer (et à raison). Peut-être avaient-ils pris la<br />

voiture et étaient en route pour Nantes ? Peut-être appelaient-ils depuis une<br />

cabine téléphonique ? Peut-être que l’un des deux parents était resté à la maison<br />

et appelait pendant que l’autre était sur la route ? Et Cholet, la ville où ils<br />

habitaient, n’était finalement qu’à cent cinquante kilomètres, tout au plus…<br />

Alors ? Eh bien alors j’avais l’impression en déduisant tout cela que le sol allait<br />

se dérober sous mes pieds.<br />

Je réalisais qu’ils pouvaient arriver ici à tout moment.<br />

Soudain pris de panique, je me suis précipité jusque dans la cuisine pour<br />

ramasser mes affaires et tout mettre dans mon sac à dos. Une fois le sac rempli,<br />

fermé, endossé, je suis retourné au pas de charge au chevet de Christophe :<br />

Cette fois-ci, je n’y suis pas allé de main morte, je l’ai secoué <strong>com</strong>me un prunier,<br />

il n’a qu’à peine réagi, mais tant pis, je n’allais pas attendre. J’ai enlevé d’un<br />

coup les couvertures, et je lui ai enfilé son pantalon <strong>com</strong>me j’ai pu. Se sentant<br />

sûrement bousculé, il a gémi plus fort, et j’ai fini par deviner dans la bouillie des<br />

sons qu’il faisait un « qu’est ce qu’il y a ? »… Je n’ai pas répondu. Je suis arrivé<br />

tant bien que mal à fermer son pantalon, je l’ai saisi alors par les jambes et je l’ai<br />

fait pivoter sur le côté du lit pour lui mettre aussi sec ses chaussettes et baskets.<br />

Le pauvre pouvait geindre tant qu’il voulait, de toute façon il allait venir avec moi<br />

qu’il le veuille ou non. J’ai fait ensuite le tour du lit pour me placer derrière lui, et<br />

ça a été franchement <strong>com</strong>pliqué mais je suis arrivé à lui enfiler un tee-shirt et un<br />

pull, puis je l’ai poussé par les épaules pour le mettre assis. Je ne l’ai lâché qu’à<br />

peine quelques secondes pour pouvoir revenir devant lui : au moins il tenait assis<br />

tout seul, c’était déjà ça. Il avait l’air <strong>com</strong>plètement perdu, hébété, mais je n’y<br />

accordais pas d’importance, il fallait déguerpir d’ici, et vite. Je me suis assis à<br />

côté de lui, j’ai placé mon bras sous son épaule, et je l’ai relevé, enfin… j’ai peiné<br />

à le relever : il était quand même bien dodu, et puis par-dessus le marché il ne<br />

faisait aucun effort pour se mettre debout. Après on a avancé, clopin-clopant,<br />

jusqu’à la sortie de l’appartement. Je lui ai pris son blouson qui traînait sur une<br />

<strong>com</strong>mode près de l’entrée et je le lui ai fait mettre, il réagissait finalement quand<br />

même un peu.<br />

Derrière la porte d’entrée, le couloir était vide, et on a croisé personne dans<br />

l’ascenseur. Arrivé dans le hall de l’immeuble, je craignais aussi de tomber face<br />

à face avec quelqu’un. Son père au pire, ou même n’importe qui d’autre :<br />

Qu’allaient dire les gens de l’immeuble s’ils me voyaient avec un de leurs voisins<br />

appuyé sur l’épaule et <strong>com</strong>plètement dans les vapes ? Qu’allaient-ils me<br />

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