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11) Brouillard au pont de Tolbiac - QueenDido.org

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Le bruit fait par les oise<strong>au</strong>x dérangés dans leur sommeil n'avait attiré<br />

personne. C'était bien plus tard qu'un type était venu, un type que je n'avais pas vu, à<br />

c<strong>au</strong>se du ban<strong>de</strong><strong>au</strong>, que j'avais seulement senti, un type nerveux, agité. Il avait encore<br />

plongé ses mains dans mes poches, m'avait mis <strong>de</strong>bout et... Et puis, plus rien. C'était le<br />

second coup <strong>de</strong> matraque <strong>de</strong> la soirée. Je m'étais retrouvé sur la berge, ensuite,<br />

dés<strong>au</strong>cissonné, rampant vers le fleuve <strong>au</strong> risque <strong>de</strong> m'y engloutir, balancé d'une<br />

voiture, disait le clodo. J'avais dû rêver. Ça ne rimait à rien, tout ça. On m'avait<br />

assailli, matraqué, ligoté, laissé tout seul avec <strong>de</strong>s oise<strong>au</strong>x, puis remis en circulation.<br />

On ne m'avait pas posé <strong>de</strong> questions, rien. J'avais dû rêver. Et je <strong>de</strong>vais rêver encore.<br />

Ça ne rimait à rien. A moins qu'on ne m'ait f<strong>au</strong>ché le portefeuille. Mais, bon sang ! que<br />

d'embarras pour f<strong>au</strong>cher un portefeuille. Et mon portefeuille...<br />

Un vent coulis avait éteint la première allumette. Une secon<strong>de</strong> fut frottée. Une<br />

flamme j<strong>au</strong>ne persista. On avait dû allumer une bougie.<br />

Je vis, à travers une brume, le clochard brandir mon portefeuille, le tendre à<br />

sa compagne, une loqueteuse, comme lui :<br />

— Tiens, Dussèche, puisque, toi, tu sais lire...<br />

— C'est un flic, dit la clochar<strong>de</strong>, <strong>au</strong> bout d'un petit silence. Je t'ai dit qu'on<br />

<strong>au</strong>rait <strong>de</strong>s emm...<br />

— Flic ou pas flic, c'est mon pote. J'y ai s<strong>au</strong>vé la mise. Il s'en souviendra. Et<br />

puisqu'il est flic, il nous filera un coup <strong>de</strong> main...<br />

— C'est pas un vrai flic. C'est un détective privé. Tu sais ce que c'est, Bébert<br />

?<br />

— Non. C'est un flic ou c'est pas un flic?<br />

— C'est un flic sans être un flic.<br />

— Oh ! mer<strong>de</strong> ! Refile-moi son crap<strong>au</strong>d que j'y refoute en fouille.<br />

— Je connais cet homme, dit la Dussèche d'une voix changée. Lui et son<br />

frangin...<br />

Le clochard, campé <strong>de</strong>vant moi, me dominait. Il se pencha, mon portefeuille à<br />

la main :<br />

— On t'a rien barboté, p'tit pote. On est pas <strong>de</strong>s voleurs, nouzigues. Mais<br />

t'oublieras pas le service, hein?<br />

Il glissa le portefeuille dans ma poche. La lumière s'éteignit. J'entendis une<br />

bouteille en heurter une <strong>au</strong>tre, puis un glouglou et un claquement <strong>de</strong> langue<br />

significatifs.<br />

— Hé ! Dussèche, protesta le clochard, tu écluses en Suisse, à c'tte heure ?<br />

— Elle cracha une injure, puis :<br />

— Ça réch<strong>au</strong>ffe.<br />

— Passe-moi le g<strong>org</strong>eon.<br />

— Je vais lui en offrir moi-même, chevrota la clochar<strong>de</strong>.<br />

— Je la sentis qui s'approchait :<br />

— Eclairez, Albert, que je voie la bobine <strong>de</strong> notre hôte.<br />

— Voui, Dussèche.<br />

Une allumette fut craquée.<br />

— Buvez ça, dit-elle. C'est <strong>de</strong> la saloperie, mais j'ai pas les moyens d'acheter<br />

<strong>au</strong>tre chose. Dans le temps, j'avais <strong>de</strong>s caves pleines...

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