11) Brouillard au pont de Tolbiac - QueenDido.org
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— Vous y avez donc lu le nom d'Etienne Larpent ?<br />
— Larpent? Ce n'est pas cet homme qu'on a trouvé assassiné et porteur d'une<br />
copie du Raphaël volé <strong>au</strong> Louvre? Une copie... ou l'original. Vous savez, je n'accepte<br />
pas toujours d'emblée ce qu'impriment les journ<strong>au</strong>x.<br />
— Oui.<br />
— Elle me regarda à travers ses longs cils :<br />
— C'était mon amant.<br />
Je ne dis rien. Je ne pouvais exprimer ni condoléances ni félicitations.<br />
— Et ce n'est pas moi qui l'ai tué, ajouta-t-elle, en balançant, d'un geste <strong>de</strong><br />
colère, sa cigarette dans un cendrier qu'elle loupa.<br />
Je me levai, ramassai le mégot, le mis où il fallait et me rassis :<br />
— On vous en accuse ?<br />
— Oui.<br />
— La police ?<br />
— La police m'a interrogée. Je lui ai fourni un... comment appelez-vous ça ?<br />
— Un alibi.<br />
— Un alibi oui. Cette nuit-là, nous n'étions pas sortis ensemble, Etienne et<br />
moi. Il avait, paraît-il, <strong>de</strong>s affaires à traiter. J'ignore quelles affaires... enfin, je<br />
l'ignorais, parce que, maintenant... Enfin... Je suis sortie avec <strong>de</strong>s amis qui en ont<br />
témoigné et la police n'a jamais mis en doute ce... cet alibi. Mais cet homme prétend<br />
qu'il n'y a pas d'alibi qu'on ne puisse détruire et que...<br />
Elle s'interrompit, ramena une jambe sous elle, me laissant admirer l'<strong>au</strong>tre,<br />
dégagée bien plus h<strong>au</strong>t, be<strong>au</strong>coup plus h<strong>au</strong>t que le genou.<br />
— Quel homme? <strong>de</strong>mandai-je.<br />
— Mon alibi n'a pas été inventé <strong>de</strong> toutes pièces, monsieur Nestor Burma.<br />
J'aimerais que vous n'en doutiez pas.<br />
— Je n'en doute pas. Quel homme ?<br />
— Un maître chanteur. Un apprenti maître chanteur. Mais tout cela est<br />
ridicule, je m'en aperçois maintenant.<br />
— Dites toujours. Je n'agirai que si vous m'en donnez l'ordre, ma<strong>de</strong>moiselle.<br />
— C'est un individu que j'ai rencontré dans un cocktail, que je connais un<br />
peu, que je n'ai jamais encouragé, mais qui ne s'est jamais découragé, si vous voyez ce<br />
que je veux dire... Un certain M<strong>au</strong>rice Chassard...<br />
— C'est ce malotru dont vous voulez que je vous débarrasse ?<br />
— Plus maintenant. Je m'en débarrasserai moi- même. J'étais nerveuse, tout à<br />
l'heure, quand je vous ai téléphoné. Tout cela est ridicule.<br />
— Comme vous voudrez, dis-je.<br />
A ce moment, le téléphone sonna. Elle se leva pour aller répondre, me<br />
montrant, dans le mouvement, une appétissante surface <strong>de</strong> cuisse qui réveilla en moi<br />
<strong>de</strong>s instincts d'anthropophage. Debout, l'écouteur à son oreille rose, sa main g<strong>au</strong>che<br />
caressant sa hanche, elle prenait la pose, la pose mannequin. Elle fronça les sourcils,<br />
son visage durcit :<br />
— Non, dit-elle. Je ne suis pas là. Non. Je... Oh ! un moment.<br />
Elle mit sa main sur le micro :