Talons aiguilles et peinture fraîche (Harlequin Red Dress Ink) - Free

Minute — Jacob n’est pas Jerry ?
Minute — elle, c’est Jerry ?
C’est Jerry Hall ?
Ou Gerry ?
— Génial, elle va l’adorer, dit Will à Jacob, inconscient de ma profonde confusion concernant les
noms.
Il se tourne vers moi.
— Jerry est végétalienne.
Pas végétalien, végétalienne. Et moi qui pensais…
— Je le suis devenu aussi.
— Végétalien ?
Will acquiesce.
— Elle veut que nous vivions tous les deux, ensemble, jusqu’à un âge très avancé.
— Ma belle-sœur Rachel est végétalienne.
Voilà la seule réponse, lamentable, dont je suis capable.
De toute évidence, Will s’en fiche. Jacob aussi.
Même moi je m’en fiche.
Silence gênant. Que, bien entendu, je me sens obligée de combler. Vous voyez, j’aime mettre tout le
monde à l’aise. Même Will. C’est l’un de mes défauts les plus agaçants.
— Comment va ta carrière ? fais-je l’erreur de demander à Will, passant au sujet qu’il préfère entre
tous.
— Géniale.
Evidemment.
Il va maintenant m’annoncer qu’il tient la vedette d’une reprise obscure et parvenir à donner
l’impression qu’une nomination aux Tony Awards est imminente. Quand j’étais encore jeune et peu sûre
de moi, j’étais convaincue que Will incarnait le futur Michael Crawford.
— Où exactement à Westchester as-tu acheté ta maison ? demande Will.
— Glenhaven Park, dis-je, me demandant en quoi cela l’intéresse et en quoi cela concerne son
dernier premier rôle.
— La nôtre est à Scarsdale, répond-il négligemment, et Tigerlily à Larchmont.
Voyez comment je connais bien Will : ma première réaction est d’en déduire que lui et Jerry Hall
ont une fille, Tigerlily, qu’ils font vivre dans une ville différente de la leur parce qu’apparemment, Jerry
déteste les enfants autant que Will.
— Tu devrais passer un jour, continue Will. C’est adorable.
Je ne devrais pas être surprise qu’il parle de son enfant comme de ça, mais je le suis. Même la
vendeuse de jouets ne parlait pas de la poupée ainsi.
— Quel âge a-t-elle ? dis-je à Will, en appuyant sur le elle.
— Quel âge a qui ? demande Will en appuyant sur le qui.
— Tigerlily.
Silence.
Puis il éclate de rire. Fort.
Il tend le bras et ébouriffe mes cheveux d’un geste tendre, comme on le ferait avec une adorable
demeurée.
— Elle croit que Tigerlily est une personne, dit-il en se tournant vers Jacob.
— Et ce n’en est pas une ?
— Non ! Tracey, quelle rigolote tu fais, dit-il avec beaucoup plus d’affection qu’il ne m’en a jamais
témoigné auparavant.