Talons aiguilles et peinture fraîche (Harlequin Red Dress Ink) - Free

Exact. Pourtant…
— Je crois qu’elle l’adorerait.
Hayley est ma nièce — la fille de mon frère Danny et de sa femme Michaela, qui vivent à
Brookside. Elle aura trois ans en juin et raffole des poupées.
Je suis la boutique du regard tandis que nous passons devant, notant mentalement son emplacement.
Charmant. Adorable.
Adorable n’est pas un mot que j’utilise souvent, mais depuis notre arrivée à Glenhaven Park, je me
surprends à dire, ou penser, sans cesse :
— Ooh ! Regardez ! C’est une pâtisserie ?
— Oui, n’est-elle pas adorable ? demande Verna, versant elle aussi dans le patois local.
— Tellement adorable. Regarde, Jack, elle s’appelle « Les tartes du paradis ».
La boutique, bleu ciel, est perchée au deuxième étage d’un étroit bâtiment et son nom, peint à la
main, s’étale sur une enseigne blanche en forme de nuage joufflu.
— J’adore. N’est-ce pas un nom génial qui lui va à la perfection ?
— C’est presque aussi charmant que « La souris sur le tapis », s’extasie-t-il d’un air moqueur. Mais
à moins qu’on y vende des souris et des tapis, je ne vois vraiment pas pourquoi…
Je le coupe et m’adresse à Verna.
— J’imagine que cette pâtisserie vend des tartes délicieuses.
D’habitude je trouve Jack amusant quand il se moque de mon enthousiasme. Pas aujourd’hui. Je ne
veux pas que Verna se vexe et décide de ne pas nous vendre de maison.
Bon, peut-être suis-je parano. Mais j’ai vraiment envie que tout se passe bien. Je sens que
Glenhaven Park pourrait bien se révéler mon prochain chez-moi.
— Oh, absolument ! Ils font des tartes sublimes.
— J’adore les tartes !
Je ne m’autorise plus à en manger beaucoup ces temps-ci. Mais à l’époque où j’étais grosse et
déprimée, dévorer une tarte entière à moi toute seule ne m’aurait pas effrayée. C’est l’une de mes
pâtisseries préférées.
— Si vous avez le temps, vous devriez en acheter une pendant que vous êtes là et la rapporter à
New York, conseille Verna. Les prix sont très raisonnables et leur tarte au citron vert est une merveille.
Ils ne la proposent qu’une fois par an, pour la Saint-Patrick, donc ils en auront ce week-end.
Une merveille à un prix raisonnable ?
Qu’y a-t-il à jeter dans les tartes du paradis ?
Ou dans Glenhaven Park, d’ailleurs ?
Oui, je peux nous imaginer vivant ici — Jack et moi. Sans pot de colle. Je parle de Mitch.
J’ai envie de fêter ça. Avec une part de tarte par exemple.
— La première maison que nous allons visiter se trouve juste là, dit Verna.
Elle tourne à droite à l’angle, puis encore une fois à droite.
Je m’attends presque à ce que le paysage, merveilleux et adorable, de la rue ne cède la place à un
îlot sordide, mais jusque-là, tout va bien. Les maisons sont plus près de la rue et plus rapprochées les
unes des autres, mais ce n’est pas si grave. Pas de délinquant ni de rat en vue.
Nous y voilà.
Verna fait glisser la Mercedes le long du trottoir.
Un bref instant, je crois qu’elle désigne l’édifice Tudor en stuc dont la tonnelle de bois blanc forme
un arc au-dessus de l’entrée.
— J’adore ! Je l’adore vraiment ! Mais je ne vois pas…
Oh. Oups. La voiture passe son chemin.
Et s’arrête devant la maison voisine de la demeure Tudor.