Cartographie des OSC

ethnies en matière de délivrance des pièces d’état-civil. Ces traitements inégalitaires, selon le point de vue de
nombreuses OSC rencontrées risquent de rendre difficile pour les citoyens l'accès aux services de santé,
d'éducation et d’emplois publics.
Parmi les principaux problèmes qui préoccupent les organisations de la société civile mauritanienne militant
pour l’instauration et la consolidation de l’Etat de droit et impliquées dans la défense des droits humains, l'accès
des citoyens à la justice représente un élément prioritaire qui n’est pas garanti.
Dans ce domaine, les entretiens avec les organisations de la société civile ont fait ressortir un certain nombre de
questions telles que : (i) la mise en doute de l’indépendance de la justice, d’où le caractère inéquitable des
procès, l’impunité dont jouissent certains milieux sociaux ou politiques et donc l’ineffectivité de la règle de
droit ; (ii) le non-respect du principe de la présomption d'innocence qui se manifeste par des détentions
préventives abusives, un maintien prolongé des prisonniers après l’expiration de leur peine ; (iii) le manque de
prise en compte des profils des juges et de la hiérarchie du corps des magistrats dans l’affectation de ces
derniers aux différentes tâches judiciaires 104 .
La problématique complexe de l'accès à la justice est actuellement abordée par le Projet "Etat de Droit" financé
par l'UE, qui prend la relève de l'ancien Programme de Renforcement et de Réhabilitation du Secteur de la
Justice (PRRSJ) 105 .
Le Projet Etat de Droit (MR/FED/2012/024-220) en cours financé par l'Union européenne et ayant une durée de 72 mois
dispose d’un budget de 7 million d'euro. Le Maître d’ouvrage de ce projet est le Ministère des Affaires Economiques et du
Développement, et le Maître d’œuvre est le Ministère de la Justice. L'objectif global est celui de "contribuer à la
consolidation de l’Etat de droit en Mauritanie dans sa composante juridique et judiciaire". Par contre celui spécifique
concerne l'amélioration de la prestation de services dans le secteur de la justice". Les résultats attendus du projet sont : i)
L’accès au service public de la justice est renforcé ; ii) L’accès à la justice est amélioré par l’action des acteurs non étatiques ;
iii) Les capacités des acteurs et institutions opérant dans le domaine de la justice sont améliorées ; iv) La politique pénale et
pénitentiaire est soutenue ; v) Les possibilités de réinsertion des détenus sont augmentées.
En dépit de plusieurs faiblesses du secteur de la justice, le Ministère de la Justice s'est doté d'une Plan triennal
pour le secteur qui s'articule autour de trois axes : l'amélioration de la perception de la justice, l'amélioration de
l'efficacité de la justice et de sa performance et le renforcement de l'Etat de Droit 106 .
Selon les OSC rencontrées, la sécurité foncière des femmes représente un élément prioritaire dans le cadre de
problématiques liées à l'Etat de Droit. En dépit de la promulgation en 1983 de la loi stipulant l’égalité des
hommes et des femmes en matière d’accès à la propriété foncière, le système foncier dominant demeure celui
fondé sur le caractère collectif, indivisible et inaliénable des terres qui exclut les femmes de manière subreptice.
Même dans les communautés fortement attachées à la religion musulmane, les femmes sont privées par toutes
sortes d’astuces de participer à l’héritage des terres constituant des indivisions familiales. Dans le meilleur des
cas, elles reçoivent des biens meubles en compensation de leur droit sur la terre. L’application de la loi foncière
en vigueur n’a profité aux femmes que dans les zones urbaines où les propriétés sont individuelles selon les
plans de lotissement. Dans les zones rurales, les femmes ne peuvent accéder qu’au droit d’usage révocable à
tout moment par la communauté dont elles sont issues. Dans les zones oasiennes, les femmes accèdent au droit
de propriété limité par les lois coutumières qui leur interdisent de céder de quelque manière que ce soit, les
terres qui leurs sont attribuées 107 .
Une autre problématique liée à l'Etat de Droit se manifeste à travers la violence basée sur le genre (surtout
femmes et enfants) et renvoie aux problèmes liés aux violences conjugales, les viols, les infanticides. Les
violences exercées contre les femmes sont devenues un phénomène de société depuis des années à la faveur du
développement des centres urbains 108 et à cause, notamment, de la paupérisation des populations charriées par
l’exode rural consécutif à la sécheresse persistante. Dans la société rurale mauritanienne, les violences exercées
104 Ces éléments ont été soulevés lors du focus group sur la thématique Etat de Droit/Bonne Gouvernance Décentralisation qui s'est
tenu le 28 janvier 2016 à Nouakchott à la présence de 21 OSC intervenant dans ces domaines.
105 Ce Programme, qui a opéré entre 2009 et 2013, était doté d'un financement de l'UE de 1,9 milliards d'ouguiyas sur quatre ans. Il
avait trois axes principaux : i) meilleur accès à la justice pour le justiciable ; ii) renforcement des capacités des acteurs de la justice ;
iii) accompagnement de la réforme pénale et pénitentiaire.
106 Ministère de la Justice : Plan triennal 2015-2017 et de perspectives 2017-2019 (http://www.cdhah.gov.mr).
107 C’est la règle du houbs bien connue en droit musulman et pratiquée dans surtout dans les oasis.
108 Dans les campagnes, le mariage est encore endogamique. Le lien de consanguinité entre les membres du couple empêche le
mari de brutaliser son épouse. Dans les centres urbains, le mariage est devenu essentiellement exogamique.
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