MÉMOIRE - Laure Botella

Et l’ensemble des pamphlets et caricatures a conduit à une détérioration de l’image des deux
souverains.
Ainsi, selon Annie Duprat 86 , quoiqu’il fasse, Henri III subissait critiques et calomnies. Par exemple,
même s’il était un :
« Roi très pieux, Henri III est accusé d’être un sorcier ; quand il fait retraite dans un
monastère, on prétend qu’il y va violer les religieuses ; s’il se montre soucieux d’établir
un protocole digne de la monarchie française, c’est qu’il est orgueilleux et se met à l’écart
de sa cour… »
Il est alors traité d’«“hypocrite”, un terme fréquemment utilisé à l’époque pour dénoncer les
hérétiques ».
Annie Duprat constate malgré tout une différence entre les deux époques. S’il y a peu de pamphlets
sur l’épouse de Henri III, les principales accusations sont portées envers Marie-Antoinette, épouse
de Louis XVI. Si ce dernier est vu comme un roi impuissant et manipulé par son épouse, il est malgré
tout préservé et presque apprécié de ses sujets. Marie-Antoinette, quant à elle, est accusée d’avoir
des mœurs légères, d’entretenir des relations lesbiennes, de dilapider les biens publics, et en plus
d’être une étrangère. Il s’agit bien d’une « inversion significative des genres » 87 .
Le scandale du « collier de la reine » en est un bel exemple, puisqu’il est resté à travers les siècles.
Coupable ou non, innocentée ou non par le procès, la reine Marie-Antoinette, sera l’objet de
« pamphlets libertins, pour ne pas dire obscènes, […] diffusés, à la ville comme à la cour, puisqu’on dit
même que la reine en trouvait chaque matin sur sa table de nuit ! » comme l’écrira Annie Duprat 88 . Elle
ajoute plus loin que « l’on ne compte pas moins de 106 estampes concernant cette affaire dans la seule
collection du baron De Vinck à la Bibliothèque nationale de France » 89 . Et il ne s’agit ici que des
pamphlets répertoriés dans cette collection, non de l’exhaustivité des pamphlets, chansons
grivoises, images et dessins qui ont pu circuler à l’époque.
Et pourtant, sans rentrer dans les détails de l’affaire, la reine était innocente et victime d’une
escroquerie 90 . Plus intéressant pour notre propos est le fait que la reine continua d’être vilipendée,
raillée et diffamée. Nous sommes quatre ans avant la révolution. Consciente de ceci, Marie-
Antoinette et le roi organisent ce que nous appellerions aujourd’hui une riposte de communication
86
DUPRAT Annie, Les rois de papier. La caricature de Henri III à Louis XVI, Belin, 2002, 369 pages. P. 45
87
Ibid. P. 84
88
Ibid. P. 140
89
Ibid.P. 140
90
VITAL-DURAND Gabriel Vital-Durand, 25 janvier 1785 - L'Affaire du collier de la Reine, Herodote.net [en ligne], 24
janvier 2016 [consulté le 8 septembre 2017]. Disponible sur : https://www.herodote.net/25_janvier_1785-evenement-
17850125.php
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