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Xavier LAPRAY
ne conduit pas immédiatement ou exclusivement à une tactique,
c’est-à-dire à une méthode de combat collectif. Pour ce faire, on doit
préciser ce qu’on entend par cette notion et ce qu’elle désigne lorsque
elles appliquée à légion manipulaire.
La signification de la tactique manipulaire
Si l’on veut aborder le problème des différentes étapes nécessaires
à la mise en place de la tactique manipulaire, il faut répondre
non seulement à la question quand – quand cette tactique de combat
a-t-elle été établie ? – mais aussi à la question quoi – qu’entend-on
par tactique manipulaire ? La tactique, issue de la notion grecque de
ta/cij, désigne au départ la disposition des hommes sur le champ de
bataille mais cette acception s’est depuis élargie. Si, d’un point de vue
général, le concept désigne selon Clausewitz l’emploi des forces au
combat (Gefecht), il renvoie aujourd’hui plus précisément à l’art de
disposer, de manœuvrer et d’employer les troupes au combat, d’où
les deux dimensions capitales que sont l’articulation des forces et leur
combinaison 14 . Appliquée à la légion, la tactique manipulaire désigne
donc la manière d’employer les manipules au combat c’est-à-dire la
façon de les disposer sur le champ de bataille, de les faire manœuvrer
et de les combiner durant l’affrontement. Trois aspects sont donc en
question: celui de l’articulation de la légion en unités plus réduites,
celui de la position de ces unités dans l’espace et enfin celui de leur
fonctionnement durant le combat. Le point de départ de la mise en
place d’un tel système de combat est constitué par le dispositif en
phalange. Celle-ci était composée de plusieurs rangs continus et
étroitement solidaires de fantassins armés de boucliers ronds et de
lances. Ce dispositif est en vigueur dans les armées romaines au moins
jusqu’au début du IV e siècle. C’est donc entre le début du IV e siècle et
le milieu du II e siècle que s’est opéré un double fractionnement du
dispositif de combat: en profondeur, avec la division en trois lignes
de bataille et, le long du front, avec la division de chaque ligne de bataille
en manipules; ce fractionnement étant censé procurer à la disposition
des soldats beaucoup plus de souplesse que le rigide système
14 C. von Clausewitz, De la guerre, Paris, 1955 pour l’édition française, 118;
M. Yakovleff, Tactique théorique, Paris, 2009, 35 sq. et 189 sq.