R Classica&Christiana _nr7_2_2012_curbe - Facultatea de Istorie ...
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L’ADOPTION DE LA TACTIQUE MANIPULAIRE<br />
<strong>de</strong> la phalange. Encore s’agit-il <strong>de</strong> déterminer le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> souplesse<br />
que ce dispositif autorise et l’échelle <strong>de</strong> combat à laquelle il s’applique.<br />
S’agissant du fractionnement en profon<strong>de</strong>ur, on ignore quand<br />
la séparation en différentes lignes <strong>de</strong> bataille a été établie. Elle est<br />
sûrement antérieure à la légion manipulaire compte tenu du fait qu’il<br />
y eût très tôt <strong>de</strong>s distinctions entre différentes catégories <strong>de</strong> soldats<br />
selon leur capacité à s’équiper avant que le critère <strong>de</strong> l’âge ne l’emporte<br />
15 . Surtout, la division <strong>de</strong> l’armée en plusieurs lignes <strong>de</strong> bataille<br />
ne conduit pas forcément à leur autonomie tactique sur le champ <strong>de</strong><br />
bataille, phénomène qui est seulement attesté à partir <strong>de</strong>s opérations<br />
que Scipion l’Africain conduit en Espagne dans la secon<strong>de</strong> partie <strong>de</strong><br />
la <strong>de</strong>uxième guerre punique. Auparavant, bien que séparés, ces trois<br />
corps <strong>de</strong> bataille paraissent étroitement dépendants au point qu’ils ne<br />
peuvent mener <strong>de</strong>s attaques dans <strong>de</strong>s directions différentes. On observe<br />
par ailleurs que ce fractionnement s’exerce à une échelle relativement<br />
importante du combat puisque chaque ligne <strong>de</strong> bataille regroupe plus<br />
d’un millier d’hommes 16 ce qui, à l’échelle d’une bataille antique, peut<br />
être assimilée à <strong>de</strong>s manœuvres <strong>de</strong> «gran<strong>de</strong> tactique» 17 . Le fractionnement<br />
<strong>de</strong> long <strong>de</strong> la ligne <strong>de</strong> front en manipules conduit également à<br />
s’interroger sur la liberté d’action <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong> ces unités. Les manipules<br />
regroupant une centaine d’hommes, à une échelle <strong>de</strong> combat<br />
donc inférieure à celle <strong>de</strong> la ligne <strong>de</strong> bataille, elles relèvent individuellement<br />
<strong>de</strong> la «petite tactique», sauf s’il s’agit <strong>de</strong> prendre en compte la<br />
15 Avec les vélites et les cavaliers, le critère <strong>de</strong> la richesse et <strong>de</strong> l’armement<br />
<strong>de</strong>meure (cf. M. Humm, op. cit., 296-297) sans parler <strong>de</strong> l’équipement <strong>de</strong>s triaires<br />
qui, jusqu’à une date inconnue, se différencie <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux premières lignes. Sur le passage<br />
du critère <strong>de</strong> richesse à celui <strong>de</strong> l’âge, voir notamment J. Marquardt, op. cit.,<br />
20; E. et F. Lammert, op. cit., col. 484.<br />
16 Chaque ligne <strong>de</strong> bataille regroupant dix manipules, cela aboutit au chiffre<br />
théorique <strong>de</strong> 1200 hommes pour les <strong>de</strong>ux premières lignes et <strong>de</strong> 600 hommes pour<br />
la troisième ligne. Cf. E. Meyer (op. cit., 199, n. 1 et 263).<br />
17 C’est à partir du milieu du XVIII e siècle qu’on commence à distinguer, notamment<br />
chez le baron <strong>de</strong> Guibert, la tactique élémentaire <strong>de</strong> la «gran<strong>de</strong> tactique»,<br />
laquelle désigne l’art du général, le mouvement <strong>de</strong>s armées. Ce n’est qu’à l’extrême<br />
fin du XVIII e siècle que l’on commencera <strong>de</strong> distinguer la tactique, qui concerne l’action<br />
au contact <strong>de</strong> l’ennemi, <strong>de</strong> la stratégie qui quant à elle désigne l’action hors <strong>de</strong><br />
portée <strong>de</strong>s armes ou <strong>de</strong> la vue <strong>de</strong> l’ennemi. Au XIX e siècle, cette notion <strong>de</strong> «gran<strong>de</strong><br />
tactique» en vient à désigner les actions qui préparent le combat, avant que n’apparaisse<br />
au XX e siècle la notion d’art opératif. On emploie ici l’expression dans le<br />
sens qui lui était conféré au XVIII e siècle (nos remerciements vont à T. Wi<strong>de</strong>mann<br />
pour les précisions qu’il a bien voulu apporter sur ces questions <strong>de</strong> terminologie).<br />
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